Magazine Journal intime

Jour 66

Publié le 07 juin 2011 par Miimii
Jour 66

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Quelques heures de disparition, c’est ce que je fais de mieux...

Je suis rentrée ce soir là, j’ai fermé mon mobile... Je n’ai pensé à rien. Juste au fait que la moindre sonnerie m’aurait mis dans un état d’hystérie incontrôlable. Je m’enferme dans ma chambre, dans le noir, dans mes draps... et je reste là, le regard dans le vide, en train d’interroger mes autres sens que la vue. J’étais dans le noir car je ne voulais rien voir de ce qui pourrait me rappeler que je suis en vie. Enroulée dans mon drap d’un blanc immaculé, je me sens dans un linceul, à l’étroit dans le froid, le noir d’une tombe... Jusqu’au matin... Tous mes sens étaient annihilés. Je ne sentais pas le bout de mes doigts, je ne m’en suis pas inquiétée, je m’en fichais, j’étais peut être en train de crever et ce n’était pas plus mal. Je me disais qu’encore une fois, je me suis brûlée en jouant avec le feu. Comme une bonne vieille conscience non corrompue qui réapparaissait de nulle part... je me disais que c’est tout ce que je méritais.

Voilà ce qu’une fille comme moi, (j’expliquerais le « comme moi », ultérieurement, pour ceux qui ne me connaisse pas assez) récolte après des mois de travail et de « jeu ». Une fille qui se veut plus intelligente, qui se croit plus maline, plus « meneuse », plus rebelle, plus libre, plus émancipée... venons en au fait... une gamine gâtée pourrie et dépourvue d’expérience... et soit dit en passant, qui vit dans un monde qu’elle se crée de toutes pièces pour avoir l’air d’y mener la danse.

Les jeux sont faits, ..., Mademoiselle a perdu le pied... Quel avenir peut-elle envisager avec l’homme qui l’a menacée ? Et même sans lui ? A qui Mademoiselle peut-elle dorénavant faire confiance ? Déjà peut-elle avoir confiance en son jugement propre ? Sur elle et sur les autres ?

C’est le matin ?... Supposons que je doive me lever... Mais pour faire quoi ?... Aller travailler ? Dans quoi ? Dans le projet qu’on vient de me reprendre ? ... Pour être plus exacte, sur lequel je ne pourrais plus jamais travailler avec un psychopathe qui me menace ? Dans le regard duquel, je verrais ma défaite, ma perte de contrôle. « Celle qui ne l’a pas vu venir » ?

Pourquoi il a fait ça ? Je suis dans l’incompréhension totale... Créer tout un projet pour avoir une emprise sur une personne... C’est intelligent ?... je dirais plus que c’est culotté, ingénieux, surprenant, inattendu, preuve d’une force mentale proche de l’aliénation.

Qui est fou ? Lui... ou moi, qui ai fricoté avec l’ami de mon père avant de faire une association dans un projet d’investissement ? Où avais-je la tête ? Et qu’est ce que je vais faire des heures, des jours de travail...perdus. Quel sens va avoir ma vie dès aujourd’hui ?

En plein milieu de la journée, je ne sais pas, il devait être 15 ou 16h, on a sonné à ma porte. Je suis obligée de voir l’heure quand je vais pisser, puisque dans ma salle de bain, j’ai eu l’ingénieuse idée d’accrocher une horloge en face des chiottes. La dernières fois que j’y suis allée, il était 14h, bien qu’ayant perdu toute notion de l’heure depuis la veille, je spéculais sur le fait qu’il se soit écoulé une heure ou deux.

Je n’ai pas ouvert et je n’ai même pas pu bouger ou pensé à bouger. La personne a insisté pourtant et puis elle est partie. La seule personne qui me vient en tête, c’est D.

Je vois son visage déçu dans le noir impénétrable de ma chambre, c’est la seule chose que j’ai réussit à imaginer depuis hier. Je me mets à sa place... Sans être sûre d’en être incapable, de quoi suis-je capable finalement ?... Il a du attendre mon appel et quand il ne l’a jamais vu arriver, il s’est décidé à mettre un dernier coup de pied dans son égo et de m’appeler. Ayant accès directement à ma boîte vocale, il comprend que j’ai volontairement éteint mon téléphone, le plus logique est d’imaginer que j’ai choisis mon camp et que je dois être convaincue de préférer l’associé (du diable) et il a quand même du s’inquiéter et passer chez moi à l’instant avec une chance de trouver le remplaçant déjà en position, et peut être moi, complètement indifférente et très froide, et je n’ai pas eu la force de lui ouvrir.

Et si j’étais lui ? Cela aurait été l’ultime chance d’avoir des explications qui aurait pu s’avérer convaincantes, et à l’instant t+1, la personne aurait pu me supplier à genoux, je n’aurais pas pardonné. Mais vu le sale coup que je viens de me prendre dans les dents, est ce que je ne mérite pas de demander pardon et de me faire rembarrer ?

Quelle serait la punition ultime pour ma naïveté ? L’humiliation ? Pas assez chère payée ma belle ! ... Se faire jeter comme une poisseuse ? S’entendre dire qu’on le mérite ? et ça ne serait pas suffisant... Je veux qu’il me punisse même si je pense n’avoir aucune chance qu’il me pardonne... et je veux qu’il m’humilie comme je l’ai humilié... Je veux sentir que je le perds et que je perds tout ce qui a eu un jour de la valeur à mes yeux... parce que je suis nulle... Une pyromane sans extincteur...Une masochiste qui adore jouer à la sadique.

Et si j’appelais ma mère ? Pour lui faire mal ? ... pour qu’elle se rende compte à quel point sa fille est tordue et mal intentionnée. Elle qui avait presque de quoi être fière depuis qu’elle est au courant de mes projets... pensant que sa fille avait trouvé l’associé idéal, quelqu’un de confiance, quelqu’un de la famille... Comment lui dire : « Maman, je n’ai pas raté une occasion de foutre les pieds dans le plat, ..., il me fait chanter pour les faveurs en nature que je lui ai offertes... ». Je pense que ça la tuerait. Je n’ose même pas imaginer ce que ça ferait à mon père et mes frères. Je pense qu’en bons tunisiens qui se respectent, ils iront le tuer et je devrais m’exiler et écrire un livre sur mon histoire, comme Mouna Ayoub ou Souad de (Brûlée Vive). Je pense que je vais brûler vive de l’intérieur, de peine, de honte, de déception...

Je ne suis pas une fille assez courageuse pour affronter mes géniteurs et ceux que je décevrais au plus haut point... J’empoigne mon téléphone, que je rallume pour appeler D.

Je pense qu’il sera tout aussi déçu, mais je m’en remettrais un jour. Ce n’est pas un frère, un père ou une mère. Qui devront continuer malgré eux à entretenir, ne serait-ce que socialement un lien de consanguinité.

Le temps qu’il s’allume je m’abstiens de réfléchir, sinon, je me connais dégonflée que je suis... j’allais flancher et continuer à devenir un légume neurasthénique.

Sur mon mobile, il est appelé « D. », exactement comme ici sur le blog. Il est mon secret jalousement gardé que je viens de mettre en péril.

Ça sonne, mais il ne décroche pas...

Je fais une chose que je ne ferais jamais en temps normal...Je rappelle. Au bout des quelques sonneries, il décroche « Myriam, je te rappelle ».

Il était direct, froid et sec. Il a raccroché aussi sec, et il m’a appelé Myriam pour la première fois.

Je ré-éteins mon mobile, allez savoir pourquoi, plutôt que d’attendre qu’il me rappelle... Et je me suis recouchée, en me tenant l’estomac parce que des contactions dues à une nausée violentes me soulevaient de douleur.


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