La route… ou l’espoir inversé

Publié le 13 juin 2011 par Stella

C'est un récit de cendre et de poussière, de pluie et de froid. Un récit ? Une fiction, plutôt, car de cette histoire nulle ne voudrait. Que s'est-il passé avant ? Le lecteur ne le saura pas vraiment. Qui sont les personnages ? Mystère... Il y a l'homme, un adulte, le père. Et "le petit". L'enfant, âgé probablement d'une dizaine d'année. La seule chose que l'on sache, c'est qu'ils s'aiment et se comprennent. Pourtant, leurs dialogues sont réduits au minimum. Mais leurs mots transpirent de cette affection mutuelle. La mère ? Elle a disparu, emportée par la tourmente, par le cataclysme plutôt dont on devine qu'il a posé le décors actuel. L'homme et l'enfant marchent vers le sud, semble-t-il, sous la pluie et dans le froid, poussant un caddy dans lequel tiennent tous leurs biens : une bâche imperméable, quelques jouets témoins d'une ancienne vie, des boîtes de conserve, surtout, qui les aide à survivre. La nourriture et un coin discret pour dormir, voilà leur quête quotidienne. Celle de l'homme, surtout, parce que le petit est trop faible pour décider de quoi que ce soit. Trop maigre. Trop... tout. Et l'on se rend compte peu à peu que le père n'est pas en meilleur état. De temps à autre, dans la nuit d'un monde entièrement brûlé et dévasté par on ne sait quelle catastrophe, surgissent des fantômes menaçant, poursuivant le même but : survivre. Manger. Tout ce qu'il est possible de manger.

Ce livre est une merveille. Un spectacle, même s'il est gris et sombre. On s'attache immédiatement à ces deux protagonistes et l'on palpite aux mêmes espoirs, on redoute les mêmes ennemis et notre coeur se serre. Il se serre de plus en plus car au fil du récit, on s'aperçoit que le cataclysme en question n'est pas récent. Rien ne pousse sur cette terre de cendre, pas une herbe, pas un arbre, pas un animal et ce depuis... deux, trois, cinq ans ? Alors, les boîtes de conserve prennent tout leur sens : celui d'un éphémère moyen de survie. Comment, dans ces conditions, préserver notre humanité ? Rester des gentils ? L'homme et le petit sont des gentils. Il y en a d'autres, il suffit de les trouver. De tomber dessus. Si possible.

Ne dévoilons pas la fin, même si elle se profile dans le récit. Disons simplement que ce texte est probablement l'une des meilleures fictions parues ces dix dernières années. C'est une traduction, mais elle est parfaite. Un film a été tiré de cette oeuvre, qui donne des visages à l'homme et au petit, mais les éditions Pointdeux Editions ont resserré la photo, si bien que seule notre imagination va donner une forme à ces deux êtres. C'est mieux. Cela rend l'expérience de cette lecture pas comme les autres encore plus étonnante et poignante.