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Radiant Housewife : trois ans après

Publié le 21 juin 2011 par Unefilleenchine

Il y a tout juste trois ans je vous annonçais ici ma nouvelle vie, passage en mode cool après dix ans de boulot en mode « trop ». Le choix d’une pause pour voir davantage les zenfants parfaits, apprendre le chinois, avoir un rythme plus tranquille et être là tout simplement : difficile de mener de front deux carrières avec leurs deux plannings de réunion soumis au décalage horaire et leurs deux jeux de déplacements professionnels réguliers. Welcome Home donc, après plusieurs années de retours pour l’heure du coucher les bons jours, et joie des enfants à l’annonce de la nouvelle : « Super, tu es à la retraite ! … » Retraite je n’espère pas, même si cette pause pas faite pour durer se prolonge avec le choix d’un travail à la maison, pendant les horaires d’école et à 16h on remballe.

Ai-je regretté ma décision ? Pas une minute. Les enfants sont beaucoup plus épanouis (pas toujours facile d’être l’un des trois seuls enfants dont la mère travaille sur une classe de 25 à Pékin, le jour de la sortie scolaire où toutes les autres mamans pointent présentes par exemple) et nous avons le temps d’en profiter le soir et de faire les devoirs tranquillement avant de sortir prendre l’air de la rivière ( en français les devoirs, ce n’est donc pas la nounou chinoise qui pourrait aider si je n’étais pas là). Mon chinois s’est amélioré par trois semestres à l’université où j’ai rajeuni de dix ans, je lis, fais du sport et me suis même mise à la cuisine, ce qui était loin d’être gagné.

Est-ce que c’est une situation facile ? Oui et non.
Certes, c’est un bonheur d’avoir pu profiter de ma grossesse, de m’occuper de Ptitprince toute la journée sans avoir le couperet de la fin de congé mat en perspective, de récupérer les grands au bus le soir, prendre deux mois de vacances l’été, vivre en jeans et avouons le, m’installer régulièrement dans mon canap pour une heure de lecture le matin à peine la porte fermée sur deux loulous en sakado et un papa en cravate. J’apprécie à sa juste valeur la chance de pouvoir me permettre de faire un break et de mettre en place tranquillement mes prochaines activités, tout en ayant de l’aide à la maison pour les tâches ménagères. « Forcément t’es en Chine ». Oui, et on ne va pas refaire l’histoire ; en France je n’aurais probablement jamais eu ne serait-ce que l’idée d’arrêter de bosser.
Mais mieux vaut avoir bien réfléchi à la question et être très claire sur son choix avant de franchir le cap, puisque ta vie sociale fait une chute libre du jour au lendemain, en même temps que les regards extérieurs évoluent : tiens le toi pour dit mon amie, si tu ne bosse pas, bien souvent tu n’es pas grand chose. « Et vous madame, que faites vous ? » « I write my blog » « Ha. What exactly is a blog? »… Quand toutefois on te pose la question, puisqu’on ne s’imagine pas toujours sous nos tropiques que l’épouse décorative puisse avoir ou avoir eu un boulot. Même les copains s’égarent parfois : « Ha tu montes ta boite ? Saint-Jack va te faire ton business plan » . T’as déjà oublié qu’on a fait les mêmes études ? Même que parfois le soir on cause budget et compte d’ex, ça me fait une récré.
« I’m running my own business donc », voilà qui sonne mieux, même si ton business est de faire tes vitres ou tes courses chez Uniqlo. Au risque d’entendre comme ce matin au détour du portant shorts en jeans : « Alors, on dépense pendant que les maris travaillent ? ». De la bouche d’un homme of course.
Mais les pires, ma soeur, ce sont les femmes, enfin, certaines. A coup de remarques insidieuses, teintées de jalousie, mépris ou pestitude, épargnez moi les exemples. L’humour vous évitera alors d’être grossière : « Tu sais ce n’est pas si facile d’être en week-end tous les jours, je me suis encore fait une ampoule avec mes mini-palmes ». Impossible d’ouvrir un magazine féminin sans qu’on te cause indépendance ou états généraux de la femme et qu’on t’explique qu’une Vraie Femme, aujourd’hui, travaille. Souviens-toi comme ta grand-mère s’est battue pour avoir le droit de sortir de chez elle et avoir un compte en banque ;  tu en fais quoi de son combat, tu n’es pas féministe ? Si justement, c’est pourquoi je suis contre le principe du gros poste au salaire de stagiaire de fin d’études parce que tu comprends « on est en local on n’a pas tellement de budget, mais ton mari gagne bien sa vie non ? »  Malheureusement on y a presque toutes eu droit.
Fini les business trips en longs courriers donc, mais est-ce vraiment si pénible de profiter d’une petite semaine à Paris pour faire le tour des copines, ou d’intervenir en province sur un sujet en rapport avec la Chine devant un amphi tout ouies ? Peut-être pas aussi passionnant que de lire pour la douzième fois de suite une fraisi-histoire vers 19h30, mais intéressant quand même hein ? (Notons qu’avec le temps les fraisi-histoires mutent en « Malheurs de Sophie » ou « Petites Filles Modèles », et que là on s’éclate).

La Radiant Housewife attitude à l’étranger est finalement selon moi une question de timing. Difficile à vivre quand elle est subie, comme trop souvent en expatriation, mais une vraie chance quand elle est choisie, assumée, et à durée déterminée. Ou pas, à chacune de faire son choix.


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