Il m'amuse, moi, Orelsan. Il a un flow un peu bizarre de gamin de province, sa voix ne dégage pas l'esprit de rébellion péri-urbaine de la plupart de ses collègues du hip-hop français, qui trouvent généralement la source de leur inspiration et de leur répertoire dans un mix culturel mêlant vie de la té-ci, relation à l'autorité, pratiques marginales voire hors-la-loi et rêves de succès, de fric et de filles. Orelsan parle un peu de tout ça, mais ne cherche pas non plus à noyer le poisson de sa petite contradiction : oui, c'est un gamin normand issu de la classe moyenne, pas forcément hyper défavorisé, alors le rap comme moyen d'émancipation et de révolte artistique contre un quotidien pas glop, ce n'est pas tout à fait pour lui. Mais qui a dit qu'il fallait porter en soi la rébellion des cités pour avoir le droit de faire du hip-hop. Personne. Et d'ailleurs, la plupart des artistes hip-hop seraient bien emmerdés si les collégiens et lycéens bourges ou issus des classes moyennes cessaient d'acheter leurs albums.
C'est que même si on ne vient pas d'une banlieue embrasée, on peut avoir des raisons de se rebeller dans la laïfe, vois-tu. Il n'y a pas que dans les banlieues chaudes que la crise frappe (et encore heureux, d'une certaine façon). En ce sens, la présence Orelsan dans le microcosme du hip-hop français, sous ses dehors de semi-bourge blanc un peu replet, est salutaire. Pas de raison de diviser les communautés musicales au nom d'une origine ethnique ou géographique, et puis quoi encore.
Bon, par contre, le brushing de Clark Kent, là, ça me perturbe. J'ai un truc avec les cheveux, tu sais. Mais le titre est rigolo. Quelques idiots crieront à l'hérésie, voire à la tribune sexiste, ne se rendant probablement pas compte qu'ils font le beurre du mec en montant des polémiques à deux balles. Sans Sale Pute et surtout sans le bruit que tout le monde a bien voulu faire autour, qui saurait encore qui est Orelsan aujourd'hui ? De ce fait, dévoilant peut-être un penchant cynique (pas forcément absent du reste de son répertoire, du reste), Orelsan n'oublie pas de remercier les Chiennes de Garde dans ce nouveau single.
Merci
Une irrévérence qui lui servira probablement de signature pendant un moment, avant qu'il ne faille trouver un message plus profond. En attendant, et parce qu'il n'y a heureusement pas que la provoc' dans les chansons d'Orelsan, les fans devraient continuer à faire bloc derrière ce jeune homme pas forcément subtil dans son approche marketing, mais loin d'être bête, dont les mots et la gouaille donnent voix à une génération de blancs becs qui, si elle n'a pas souffert de la ghettoïsation ni de la condescendance raciste, n'en est pas moins paumée et malmenée. A ce jeu-là, sarcasmes et potacheries ont toujours été un remède propre à adoucir l'aigreur.