La débutante et le blanc-bec

Publié le 08 juillet 2011 par Secondflore

Château Rouge, 1h17. Depuis Barbès je rentre à pied vers la Porte. Du côté droit – celui du Vanoprix incendié, celui des bancs publics, des trafics, de l’épicerie, de la piste cyclable et des putes. En bas du boulevard j’ai croisé la première, une grosse quadragénaire, qui semblait me parler – Mais si,viens, chéri - mais qui ne regardait qu’elle, et le trottoir.
Maintenant elles sont quatre, plus jeunes, sur la bouche d’aération du métro, groupées autour d’un seul homme.
C’est l’heure du briefing.
Je passe tranquillement, coups d’œil fugaces. L’une des femmes, 25 ans peut-être, ressemble à la fière Meriem, une élève de nos cours d’alphabétisation. J’arrive à hauteur, soulagement idiot, ce n’est pas elle. Mais elle a détourné la tête du petit groupe, elle a vu que.

Ça va ?

La voix est étouffée, douce aussi, accompagné de cet œil fuyant qui dit Pardon en même temps.
Rien du timbre franc de l’approche provocante de la professionnelle. Rien de la voix lasse de l’habituée, ni même la douce ironie de certaines rouées des boulevards qui savent bien que ce petit blanc-là n’est pas client et qu’il en faudrait peu pour le faire fuir.
Rien non plus de l’appel subliminal au secours (et quand bien même…), plutôt un appel à l’échange perçant timidement sous la contrainte.
Le "ça va?" raté et touchant de la débutante.

Mon "bonsoir" aura sans doute été hésitant, le sourire franc sûrement barré par cette moue un peu conne qui dit Désolé, pour ça et pour tout. Je n’ai même pas osé penser "bonne nuit".
Un peu plus loin un autre briefing, puis des hommes en goguette. Marcadet-Poissonniers marquera la limite, après cela Paris dort, il se lève tôt.

 _
PS - Au fait, Axl, j’ai enfin retrouvé la dernière phrase de B.a.-ba.
Il n’y a pas de recette et l’appétit vient en mangeant.
Bon appétit.

PPS - Et ce lien qui na va nulle part. Envolées, les archives 20six. Disparue, la petite putain de Zagreb qui appelait muettement à l'aide. Fugacité du deuxpointzéro. Snif.