14/02/2008 | Mise à jour : 21:57 |
Les «connecteurs temporels et spatiaux» ou les «déterminants» vont céder leur place aux bons vieux «sujet, verbe, complément». L'apprentissage devra être rigoureux et non plus au fil des textes.
Fini le jargon grammatical ! Les nombreux parents qui ont transpiré sur les explications grammaticales de leurs enfants seront rassurés. Les nouveaux programmes de l'école primaire, qu'évoquera aujourd'hui Nicolas Sarkozy en déplacement à Périgueux, seront détaillés dès la semaine prochaine par Xavier Darcos dans un document de 24 pages. C'est un changement radical dans l'apprentissage de la grammaire qui s'annonce.
Une piste déjà recommandée par le linguiste Alain Bentolila et l'écrivain Erik Orsenna dans leur «rapport de mission sur l'enseignement de la grammaire» remis en novembre 2006 à Gilles de Robien, le précédent ministre de l'Éducation nationale.
En 1995, à la suite d'une rénovation de l'enseignement de la grammaire, des termes barbares sont entrés dans les programmes et manuels scolaires : des «connecteurs temporels et spatiaux» au «groupe nominal» en passant par le «complément d'objet second» ou le «déterminant». «Les linguistes ont cherché à se démarquer de la grammaire traditionnelle», explique Alain Bentolila. Pour mieux enfoncer le clou, la matière a été rebaptisée «organisation réfléchie de la langue».
Cependant, certains enseignants ont fait de la résistance, utilisant en classe des terminologies plus classiques. Et les valeurs sûres, telles que le Bled et le Bescherelle, restent de grands succès de librairie.
Les parents applaudissent
Depuis la rentrée 2007, la matière a déjà été rebaptisée «étude de la langue-grammaire». Et, désormais, les terminologies devraient redevenir plus traditionnelles. En clair, sera mis à l'honneur, le classique trio «sujet, verbe, complément». Parallèlement, les termes abscons devraient disparaître des manuels.
D'ores et déjà les parents applaudissent. «Pourquoi utiliser des mots compliqués sur des apprentissages fondamentaux ? Il faut avoir des mots simples», explique Anne Kerkhove, présidente de la fédération de parents d'élèves PEEP. «Et peu importe si nous sommes taxés de passéistes…», souligne-t-on au gouvernement.
Reste que le débat sur la terminologie grammaticale n'est pas nouveau. L'universitaire Éric Pellet rappelle que «lorsqu'au début du XXe siècle F. Brunot a introduit le terme de “complément d'objet” dans les programmes, il s'en est trouvé beaucoup pour dénoncer cette nouveauté scandaleuse, et pour estimer bien suffisant le terme “accusatif” que l'on avait “toujours employé”, ou même celui de “régime”, utilisé à l'époque par les grammairiens moins conservateurs…»
Les nouveaux programmes devraient comporter une autre réforme fondamentale pour les élèves. Celle-ci concerne les modalités d'enseignement de la grammaire. En effet, les instructions de 1996-1997 recommandaient un traitement ponctuel des questions de grammaire à l'occasion de l'étude des textes, en excluant un cours spécifiquement grammatical. «Actuellement, on explique les règles de grammaire au fur et à mesure des éléments rencontrés dans les textes, ce qui peut entraîner des confusions pour les élèves», explique Alain Bentolila.
Dans les dernières instructions concernant la mise en œuvre du cycle commun de connaissance et de compétences voulu par François Fillon lors de son passage à l'Éducation nationale, les nouveaux programmes datant de 2007 préconisaient déjà un enseignement de 20 à 30 minutes portant sur des questions précises. Cette démarche devrait être systématisée dès l'année prochaine. Il s'agira désormais non plus d'enseigner la grammaire au fil des textes, mais de manière rigoureuse et progressive. Sans garantie de rendre la matière moins rébarbative.