Trace dans un pavé devant la pharmacie du campo San Stefano
(La panacée)
Beaucoup d'entre nous doivent se rappeler du crédit qu'on portait à la "teriaca", autant pour son usage externe que pour son usage interne. Nos anciens prêtaient une confiance encore plus grande à ce remède inventé, selon certains, par le fameux Mitridate, roi del Ponte et, selon les autres, par un grec prénommé Andromaco. Plus de soixante ingrédients la composaient, dont l'opium, l'orne de Crête, la myrrhe troglodyte et même des extraits de vipère. Depuis le XVIIème siècle, Venise se distinguait dans la préparation de la teriaca, sous la surveillance du magistrat de la santé, à qui le soin revenait de veiller sur le choix, la qualité des ingrédients, la justesse et l'uniformité des manipulations. Les pharmacies qui avaient obtenu la licence pour fabriquer la teriaca se nommaient "teriacanti", et, chaque année, tenaient exposés, disposés de belle manière et bien décorés, les ingrédients, tandis qu'une partie de ceux là étaient broyés, dans la rue même, dans des mortiers de bronze, situés au dessus de quelques cercles de silex, encore visibles à quelques endroits. C'était le travail des "facchini" qui endossaient des veste blanches, des pantalons rouges, des chaussures jaunes et des bérets bleus, surmontés de plumes ou de fleurs sèches. Entre deux coups donnés au mortier avec la masse, ceux-ci entonnaient quelques strophes, semblables à la suivante :"Pour les poisons, les flatulences et autres mauxLa tiriaca est le premier des remèdes"Parmi les pharmacies "teriacanti", celle de la tête d'or, à S. Bartolomeo se vantait.. Elle avait l'habitude de distribuer un petit imprimé énumérant tous les mérites de la teriaca : guérir de la peste , et de toutes les maladies contagieuses, chasser du corps toutes les mauvaises humeurs, en redonnant la quiétude à l'esprit; guérir des piqûres de scorpion, de vipère et des morsures de chien, libérer de la tuberculose et des fièvres putrides, guérir des maux d'estomac et éclaircir la vue…En dépit d'aussi belles prérogatives, l'usage de la teriaca a beaucoup diminué aujourd'hui, et l'on peut dire qu'il ne s'en fabrique que seulement pour l'usage des pays étrangers.Anecdotes historiques vénitiennes" - 1897 -Giuseppe Tassini - Merci à Claude Soret pour ses traductions.