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La France, un dimanche de juillet, elle a une gueule de...

Publié le 25 juillet 2011 par Fabrice @poirpom
La France, un dimanche de juillet, elle a une gueule de...

La France, un dimanche de juillet, elle a une gueule de dimanche.

Coin coin.

Sur le périph’, deux cartons à trois kilomètres d’écart ratatinent les bagnoles. On oublie les clignos, on change de file quand rien n’avance, on paramètre le GPS en basque, on se cure le blaze en changeant de radio.

Remontée de file acrobatique.

Sur les lieux des cartons, pas de casque écrasé. Pas de fourche pliée, de carénage arraché. Pas de tar-mo esquinté.

Cool.

Que des pare-chocs frottés, des frayeurs hypoglycémiantes. Une grosse flèche qui clignote, un panier à salades et, appuyés sur le rail, des conducteurs de Kangoo et de Nevada diesel, modèles jambes de coton, qui radotent. Et des flics polis qui leur balancent quelques banalités. Un très léger sourire aux lèvres.

Rien de vilain, ce matin. Alors le mec savoure la frayeur des conducteurs. Attend patiemment qu’ils redescendent un peu. Que leurs jambes reprennent contenance. Avant de remplir ses papiers.

Sur l’A6, le flot réchauffe gentiment le bitume. Deux trois crétins jouent les pilotes en 4x4 Béhème.

La vallée de la Chevreuse laisse dérouler le bitume sur ses rondeurs.

Et la pampa franchouillarde prend tranquillement place.

Les silos des coopératives, immenses masses grises et mutiques, imposent leurs lois. Pas une maison qui cligne des volets dans un rayon de dix kilomètres autour d’eux.

Les familles de prolos en Renault et les retraités en Citroën se calent sur les aires des départementales et font crépiter l’alu des sandwiches. Jambon beurre, camembert et terrine cornichons se font vriller sur des langues de bitume de trois mètres, des bas-côtés larges et défoncés.

À Chartres, les groupes de japonais, les familles indiennes et les couples d’italiens défilent et prennent la pose sur le parvis fleuri de la cathédrale. Pour les plus férus d’histoire, le conducteur du petit train qui fait le tour du vieux centre raconte la vie des bégonias.

Sieste polyglotte sur un banc du parvis.

Retour en piste.

Les Z.A.C. et les Z.I. roupillent à la sortie des villes.

Dans les bleds, les vieilles édentées calent leurs coudes sur les rebords des fenêtres et reluquent en mastiquant leurs veuves gencives. 

Droite. Gauche. Une voiture dans un sens. Une moto dans l’autre. Un camion par-ci. Une caravane par-là. Droite. Gauche. Arthrite. Complainte.

Comme au tennis. En dix fois plus lent, plus éparse. Échange de regards sporadiques. Hochements de tête accidentels.

Coin coin.

Dans la verdure, avec la pluie de ces dernières semaines, l’odeur est tellement forte qu’il faut souvent s’arrêter. Reprendre son souffle. Calmer l’ivresse de la chlorophylle.

Des matrones nettoient le pas de leur porte, des bricolos démontent, poncent, peignent, polissent, nettoient.

Les nuages menacent mais se retiennent gentiment.

Sauf exceptions, le bitume est propre, sympa. Les courbes sont douces, amples. Glissent entre deux bosquets, taillent entre les champs, serpentent dans les villages. Jusqu’au bercail du soir.

Pour une toile et une bécane? Ouaaais, j’ai un coin sympa.

Tout au bord du Loir. Un ponton de bois, des Cannes à pêche plantées le long du cours d’eau.

La mienne est calée juste là. Faut pas hésiter pour se détendre.

Une meute de canards squatte les berges. Les hollandais et les belges, par paquets de douze, placent et déplacent leurs caravanes. Les français regardent le 20 heures sur des LCD posés sur des frigos, sous les toiles greffées aux caravanes. Des mini-barbeuc’ accueillent tant bien que mal saucisses et steaks. Sur les pas de portes des mini-maisons à roulettes, des fleurs en pots. Des tapis pour l’espace dînatoire en extérieur. À la nuit tombée, des maxi lampes anti-moustiques par dizaines.

Mini village paisible. Quelques familles, beaucoup de retraités.

Vivement le mois d’août. Que y’ait des jeunes qui foutent un peu le bordel.

Seb’ taffe ici depuis trois mois et jusqu’à fin septembre. Il vit à Montoire-Sur-Le-Loir depuis quinze ans, après avoir passé toute la première partie de sa vie à la Garenne Colombe, dans le neuf deux. Un chignon retient son épaisse tignasse, un anneau lui déforme le lobe. Il accompagne les nouveaux arrivants, de l’accueil à leur emplacement, en VTT.

ROULEZ AU PAS

La France, un dimanche de juillet, elle a une gueule de congés payés. De semaine de 40 heures. Elle sent la merguez-chipo et l’indice 20. Elle râle contre la grisaille mais elle vit sa vie.

Coin coin.

Ok, ok. Bonne nuit, les canards.


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