"Sur le marché forain de Carpentras, il m’est apparu que l’une des dimensions majeures de l’ensemble des relations nouées dans un anonymat relatif à l’occasion des achats sur les étals était la mise en scène d’une interconnaissance (ou d’une "amitié") généralisée censée manifester l’appartenance à une même communauté locale et régionale.
Entre les linéaires d’une grande surface ou dans une salle d’attente d’un aéroport, l’enjeu des relations éphémères et ténues qui s’engagent peut être d’une tout autre nature: dans de tels espaces sociaux, il ne sera plus question d’être ou de jouer à être "du coin", mais plutôt de se présenter comme un consommateur averti sur le marché mondial ou un acteur à part entière de la modernité cosmopolite."
Cela me fait penser à l’air que je prends (l’air détaché de celui qui n’est pas en visite), quand je suis sûr de croiser un touriste devant la gare de l’Est et quand je me figure qu’il m’observe attentivement: jouissance de faire voir, ou de faire croire, par une indifférence très étudiée, que je suis un bel exemple d’indigène de la grande ville.
par Filippo