Magazine Journal intime
Calanque noire
Publié le 20 février 2008 par Eric MccomberPaul DeLaroche, La Jeune Martyre, 1855
Muddy Waters
chante au micro
nuit noire
nuit noire
la nuit noire s'est effondrée
sur la pierre grise
la nuit noire
macule les champs
la nuit noire
rien qu'un autre jour
en fuite
mon frère est à la guerre
et je suis seul
puis-je entrer
pour une seconde
puis-je entrer
dans le cercle
à demi dément
dans la nuit noire
comme chaque fois
la nuit des profondeurs
la nuit de ta noyade
revient me couvrir
maquiller mon visage
de peintures charbonneuses
stries poisseuses
balafres salines
les mains tendues
vers le bûcher
nous sommes nus
dans la froidure
à demi déments
entre deux mondes
un pied sous terre
un pied sous l'eau
maîtres de rien
fils du large
et filles de l'air
Ne brise pas
la perle
ne brise pas la perle
l'hiver est sur le point
de sa rupture
et tout
est à venir
ne brise rien
l'autre nuit
je rêvais au soleil
de juin
étendu dans mon lit
dans les collines
l'autre nuit
mon soleil
se couchait
dans l'océan
emportant la lumière
les astres pourtant
et la face poudreuse
ne se montraient pas
le soleil s'abimait
sous l'eau
l'autre nuit
je rêvais à toi
puis plus rien
nuit noire
les sécheras-tu
seras-tu à mes flancs
quand ils auront disparu
t'allongeras-tu
quand la nuit tombe
brutalement
comme une tour
qu'on abat
quand la nuit
chute
sur la femme d'argent
quand les profondeurs
reprennent sa nimbe
et langent sa chevelure
de varechs aveugles
—© Éric McComber