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Trois mille milliards de dollars.

Publié le 14 septembre 2011 par Sebastienjunca

Si pour Marx la religion est l’opium du peuple, le patriotisme ne l’est sans doute pas moins.

Par le passé, l’idée de Dieu fut l’incontournable prétexte à ne nombreuses guerres d’invasion et de civilisation. On séparait ainsi les âmes des corps comme le bon grain de l’ivraie avec la seule et noble intention de les sauver de la damnation éternelle. On purifiait une terre impie de ces « presque-humains » en leur faisant embrasser la croix avant de les vider de leur sang à grand renfort de sermons, de prières et d’alléluia. Plus prosaïquement, pendant de nombreux siècles, la religion fut la voie royale pour l’enrichissement et la puissance de ceux qui s’en réclamaient et qui surent de tous temps s’en faire les légitimes porte-paroles et ardents défenseurs.

Aujourd’hui, le sentiment national, l’appartenance à l’histoire d’un pays, d’une nation, le patriotisme en somme, ont pris le pas au sein des pays dits développés sur toute sorte de fanatisme ou appartenance religieuse. Les héros nationaux ont remplacé les saints. Les drapeaux et bannières ont succédé aux croix et autres emblèmes religieux. Les monuments aux morts et autres mausolées se sont élevés en lieux et place des églises et des temples. Enfin, les articles des différentes constitutions ont progressivement damé le pion aux versets bibliques quand ils ne s’en sont pas largement inspirés.

De nos jours, le patriotisme, l’idée de la Nation, font davantage recette et mobilisent beaucoup plus les forces vives et les richesses d’un pays que le seul sentiment religieux.

Concernant les attentats du 11 septembre 2001, je ne suis pas plus adepte de la version officielle (dont j’imagine qu’elle ne nous dit pas tout) que de la théorie du complot ; qui pour le coup, nous en dit sans doute un peu trop. Il n’en demeure pas moins que cette dernière semble progressivement remonter à la surface comme le ferait le corps d’un noyé dont on espérait qu’il serait à jamais englouti par les flots boueux de l’information et de la communication.

Car en définitive, et avec dix ans de recul, à qui auront majoritairement profité les attentats contre les tours jumelles ?

Après une décennie de guerre anti-terroriste menée sur les deux fronts Irakiens et Afghans ; après trois mille milliards de dollars en passe d’être engloutis dans un conflit qui semble encore avoir de belles années devant lui ; à qui, en définitive, aura profité le crime ?

Depuis que la civilisation a contaminé le monde en général, et l’humanité en particulier, la guerre a toujours été le moyen le plus radical de s’enrichir pour ceux qui en connaissaient les plus subtils rouages. Et si les économies des pays belligérants étaient de la sorte saignées à blanc comme l’étaient aussi les familles généreuses pourvoyeuses de soldats, les industriels du crime et les marchands de canons quant à eux ont toujours su tirer force profit de tous les conflits armés. Hitler l’avait bien compris. Il savait que la meilleure façon de relancer l’économie du Troisième Reich passait par la réanimation artificielle des usines métallurgiques du bassin de la Ruhr. La guerre se chargerait du reste. Quant aux alliés, ils savaient l’ampleur du gouffre financier que provoquerait leur entrée en guerre sur le vieux continent. Mais ils savaient aussi que ces dépenses astronomiques seraient largement compensées par ce que rapporterait à l’économie Américaine le « plan Marshall » et la reconstruction d’une Europe essentiellement détruite par les bombardements alliés.

Toute destruction est la condition sine-qua-non à toute reconstruction. La mort des valeurs actuelles est le préalable à toutes les formes de progrès et de renouveau. Les bâtisseurs de demain sont le plus souvent les démolisseurs d’aujourd’hui.

Qui ne s’est d’ailleurs surpris à penser que la plupart des conflits armés n’étaient pas déclenchés à seule fin d’entretenir une économie parallèle florissante ?

Car en effet, si la guerre menée par les États-Unis et ses partenaires de l’Otan depuis dix ans a littéralement mis à genou une économie déjà fragilisée, elle n’en a pas moins profité à tous les généreux pourvoyeurs de la machine de guerre Américaine. Tous ces crédits pharaoniques votés par le Congrès et inlassablement prélevés sur la sueur du contribuable Américain finissent bien quelque part, dans d’autres poches. Les flux financiers de toute sorte n’échappent pas au principe des vases communicants. Et si l’argent disparait à un endroit, comme l’eau, on doit normalement s’attendre à le retrouver ailleurs.

Or, à qui profite le crime, depuis que le monde est monde, sinon aux industriels, marchands d’armes et de technologies guerrières ? Où sont immanquablement passés ces milliards de dollars sinon dans les caisses de Lockheed Martin, Boeing, Northrop-Grumman, General Dynamics, Raytheon, L-3 Communications, United Technologies... et tous les autres nécrophages en col blanc de la bannière étoilée ? Autant de milliards arrachés au pays, aux plus humbles, à ceux qui sont véritablement la Nation et qu’on saigne à force de patriotisme et de manipulation politico-médiatique.

La vie et la mort ne sont rien que commerce. À se demander d’ailleurs si ce commerce a réellement vu le jour avec l’avènement de l’homme et de la civilisation. Car depuis la nuit des temps, toutes les formes de vie, à leur manière, ont su tirer profit de ce commerce éternel entre la vie et la mort. L’une n’étant toujours qu’à la condition de l’autre.

Commerce que même l’horreur du 11 septembre ne saurait faire oublier, quand bien même les cérémonies, les mémoriaux et les bannières étoilées soient revêtus de tout le lustre de l’émotion, de la douleur et de la dignité.

N’oublions pas non plus que les plus puissants hommes d’état ne seraient rien sans les empires industriels qui en sous-main, les manipulent comme de vulgaires pantins. Depuis leurs campagnes électorales jusqu’à leur accession au pouvoir, tout n’est que le résultat de sombres tractations, de compromis et de compromissions, d’engagements réciproques, d’obscures alliances et de plus obscures trahisons ayant pour seul objectif le partage à court terme d’une partie de la richesse nationale. L’accession au pouvoir de leur « champion » permettra à ses mécènes de l’ombre de se partager ce qui reste de la dépouille d’une nation presque exsangue. Accords secrets, contrats (souvent frauduleux), parts de marché, prises (illégales) d’intérêts sur toute forme de transaction publique ; autant de moyens d’assouvir leur soif de richesses et de pouvoir. L’homme politique, le candidat à l’investiture n’étant plus, dès lors, qu’un cheval de Troie... de trois mille milliards de dollars.

C’est ainsi qu’un mandat présidentiel, même non renouvelable, suffira à enrichir de façon éhontée une poignée d’hommes influents, riches industriels, pétroliers, dont personne ne connaîtra jamais ni le nom, ni le visage. Le mandat arrivé à son terme et le pays toujours plus endetté, on laissera bien volontiers sa place à un autre. On passe le relai. C’est le principe de la pyramide. Celle-là même qui figure au dos des billets de un dollar accompagnée de l’inscription Novus Ordo Seclorum (Nouvel ordre pour les siècles)...

Tant que le système fonctionne on continue d’en faire profiter ceux qui sont dans le secret. Aux prochains de redresser un bilan financier catastrophique du seul point de vue de l’État. À lui surtout de s’enrichir davantage. À lui d’actionner à son tour les manettes de cette merveilleuse machine à sous pour lui et ses affidés. D’autres en ont profité avant lui. D’autres en profiteront après. Au diable le peuple ! De toute manière, il ne sait rien et n’y comprend rien. Au diable la nation ! Elle en a vu d’autres et elle en verra d’autres. La terre elle, ne mourra jamais. Elle s’épuise mais ne meurt jamais.

« Suppose au contraire que doivent venir aux affaires publiques des hommes qui, dans leur dénuement, ont faim de biens qui ne soient qu’à eux, convaincus que le pouvoir est l’endroit voulu pour en arracher le bien comme un butin, cette possibilité disparaît ; car alors le pouvoir est devenu l’enjeu d’une lutte, et, comme une semblable guerre est congénitale et intestine, elle fait leur perte et celle du reste des citoyens. »

Platon, La République, VII.

Sébastien Junca.


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