Notes de l'isba (12)
ASPIRATIONS. - Il a fait ce matin une aube toute pure à l’isba, toute belle rose et toute belle bleue, transparente, soyeuse, immatérielle, indicible et toute belle, toute bonne et toute vraie.
J’aspire à la beauté. Telle est ma vérité. Ce n’est pas plus compliqué que ça. Je reste fasciné par les simulacres de la beauté, toujours en proie à une fantasmagorie remontant à l’adolescence, mais je sais que tout ça n’est qu’un leurre sensuel, la beauté n’est pas ça, la beauté n’est pas trouble, la beauté est ailleurs. J’aspire à la sagesse, non pas à l’ataraxie détachée mais à une sérénité vivante et bonne, à une forme de bonté paisible accordée à une paix intérieure excluant elle-même, non sans force et même violence, les simulacres et les consentements bas – j’aspire à cela, ce qui ne veut pas dire que je le vive sans trouble ni lutte. J’aspire à ma vérité. Je sais qu’elle est aussi dans cette lutte continuelle, et je le vis dans la difficulté comme je sais que le vivent à peu près toutes et tous.
MARCHANDS – Ce que tu qualifies de beauté, ils n’y voient que des reflets illusoires, d’ailleurs tout dépend du critère de beauté, arguent-ils en invoquant les cultures variées, il y a beauté et beauté, et quand tu leur demandes ce qui les touche, eux, en matière de beauté, ils te répondent qu’ils n’ont pas travaillé la question, mais il va de soi que Rothko et Pollock les font vibrer quelque part, et puis ils restent à l’écoute, enfin ta ferveur un peu rétro les amuse, qui leur rappelle ces folles années où le marché de l’art ne les occupait point autant.
MEHR LICHT ! - Je veux voir le ciel, je veux le voir tout le temps, je vais donc mettre plus de fenêtres à l’isba et de tous les côtés, cette moche masure va devenir la maison de verre d’où je verrai le ciel de partout jusqu'aux anges et vous verrez ce que vous verrez !
Image JLK : L'aube à La Désirade.