Les Cévennes, où c'est ?
Voila ce que tente d'expliquer "Cherchemidi", Léon Larguier, dans le livre que J.P. CHABROL a écrit : LES REBELLES.
"Avant même d'être devenu "Cherchemidi", Léon Larguier s'était fabriqué une série de réponses toutes prêtes, une sorte de "tirade du nez", du pied de nez !
Vulgarisateur : vous voyez le Massif Central, vous voyez la Méditerranée ? A mi-chemin, par le chemin le plus court, la ligne droite ...
Consolant : Vous connaissez Nimes ? Bien sûr. Quand vous quittez la "Cité romaine" en direction du nord-est, avant d'arriver au Puy (vous connaissez Le Puy ? Naturellement !), vous traversez tout un troupeau de montagnettes désolées, quelques hameaux dépeuplés que personne ne connaît ... Une grande ville, pour vous fixer les idées ? Attendez ... attendez ... Non, il n'y a pas de grande ville dans les Cévennes. Les Cévennes sont ce désert où personne ne passe, dont personne ne parle ... vous voyez : il n'y a pas de honte...
Anatomique : Les Cévennes, c'est quand le Massif Central met les pieds dans le plat. Ce sont ses gros orteils qui se tendent vers la Méditerranée, pour voir si l'eau est bonne entre Sète et Marseille.
Touristique : au lieu de foncer à tombeau ouvert sur la grand-route bleue, prenez donc à droite, après Moulins. Si vous connaissez déjà la Côte d'Azur, il y a un endroit où vous aurez envie de vous arrêter, cet endroit, c'est les Cévennes...
Superbe : Les Cévennes ? mais c'est le petit pays devant lequel le Roi Soleil dut mettre les pouces !
Cuistre : "Quod se Cevenna ut muro munitos existimabant ..." Relisez donc Caesar ! De Bello Gallico, livre VII, chapitre VIII ...
Et bien d'autres, hélas ! devenues machinales, dont il était le premier fatigué, si bien qu'il lui arrivait de répondre : je ne vous le dirai pas ! si trop de gens le savaient, les Cévennes ne seraient plus ce qu'elles sont !
Et puis, ailleurs qu'au pays, les gens étaient toujours trop pressés. On n'avait pas le temps de se répondre vraiment.
Les Cévennes ne se présentent pas par téléphone.
Mais, insensiblement, devenant Cherchemidi, Léon Larguier finissait par oublier lui-même ses Cévennes, il n'avait plus, devant la fameuse question, le sursaut cévenol fait de pudeur et d'orgueil. Pour un Cévenol, parler de sa Cévenne, c'est parler de la vie, du pêché, de la mort, de la vie éternelle, de la responsabilité, de la mort à attendre, de la mort à recevoir, de la mort à donner aussi, parfois... La Cévenne, c'est une confidence."