Mémé MARGUERITE et Grand père VALERE

Publié le 25 février 2008 par Elisabeth Leroy

Ma Mémé Marguerite vivait seule depuis son divorce d'avec mon grand père Valère, quand ma maman avait 6 ans et ma tante Nicole 2 ans. Elle n'avait  eu que deux filles qu'elle avait élevé difficilement en faisant des ménages à droite et à gauche. Il y avait eu également la guerre 39-45 qui l'avait obligée à s'installer pour quelque temps chez sa soeur, Jeanne, à la frontière belge.

Elle vivait seule dans un deux pièces, dans un petit immeuble vétuste d'une petite rue du centre ville. Quand elle n'avait rien à faire, elle passait son temps, assise à sa table de cuisine, à regarder les gens entrer et sortir de la boulangerie d'en face ou du débit de tabac juste à côté. Elle connaissait tout le monde et pouvait en raconter des histoires sur les uns ou les autres.

Nous, ses petits enfants, passions la voir le jeudi après-midi ou quand nous faisions quelques courses dans son quartier. Elle nous offrait à chaque fois des carambars qu'elle sortait de son buffet. Elle nous servait un petit verre de liqueur. Quelquefois, elle confectionnait de délicieuses gauffrettes ou des caramels qu'elle nous faisait goûter.

Avant la rentrée des classes, nous partions avec elle dans les pâtures chercher des pissenlits que nous mettions dans son panier. En rentrant de promenade, elle en faisait une salade.

Elle allait promener seule également pour se changer les idées. Elle ne marchait pas, elle ne savait pas, elle trottinait en regardant le paysage, la nature ou les devantures des magasins.

Elle passait au moins une fois par jour chez nous pour prendre des nouvelles et en donner. Elle ne nous embrassait pas sur la joue comme tout le monde, Elle nous faisait une bise sur le sommet de la tête, sur nos cheveux. Mais, au fur et à mesure que nous grandissions, elle devait se soulever sur la pointe des pieds. Si bien que, arrivés à la taille adulte, nous plions les genoux pour lui dire bonjour. C'était comme un salut organisé. Elle était facilement joyeuse malgré sa solitude. Elle avait quand même une préférence pour mon cousin Michel qui est resté 6 ans le fils unique de ma tante Nicole. Puis, sont nés ma cousine Dominique et mon cousin Pascal. Mais ma mémé a continué à garder une préférence pour son petit fils Michel. Je ne lui en veux pas, personne ne lui en voulait dans la famille. Elle aimait tous ses petits-enfants, c'est ce qui comptait.

Quelquefois, le samedi après-midi, elle venait voir son émission préférée chez nous : une heure d'accordéon. Car ma mémé n'avait pas la télévision. Elle ne l'a eue que très tard, j'étais déjà mariée je pense.

A chaque fois, elle était transformée, elle qui aimait danser. Toute sa jeunesse remontait dans sa mémoire en écoutant ces magnifiques morceaux de musette.

Quant à mon grand père Valère, il était remarié à Olga, la belle soeur de son frère Calixte.

Je me souviens des dimanches où nous passions leur rendre visite en famille. J'aimais regarder les oiseaux qu'il possédait dans une cage, moi qui n'avait que des chats à la maison. Il nous emmenait aussi voir les lapins qu'il élevait dans son jardin, enfermés dans des clapiers. Il avait aussi un chien et moi j'en avais peur. J'attendais qu'il l'attache pour entrer dans la cour. Nous étions heureux ainsi mais ces moments là étaient toujours trop courts. Au moment de sa mort, nous avons su qu'il avait regretté toute sa vie de ne pas nous avoir vus plus souvent. Mais il ne fallait pas que ma Mémé et lui se retrouvent le même jour, au même endroit, C'était ainsi, ils avaient divorcé depuis longtemps.

Son frère Calixte est décédé d'un cancer de la gorge avant mon grand-père. Nous étions allés le voir pour la première fois, je m'en souviens, peu avant son décès. Il avait un gros pansement et parlait difficilement. J'étais adolescente et cela m'a marquée.

Mon grand père Valère est décédé en 1976 d'un cancer des intestins. J'habitais déjà dans le Midi et je ne l'ai pas vu malade. Je n'ai pas pu aller à son enterrement non plus.

Ma mémé est décédée 10 ans après.

Les souvenirs les plus heureux vont rester gravés dans ma mémoire jusqu'à la fin.