La guitare et le blues, une longue histoire d'amour

Publié le 25 février 2008 par Elisabeth Leroy

Les noirs du Sud des Etats Unis, à la fin du XIXè siècle, transformaient les chants du travail (hollers) en blues.

Le blues a ainsi remplacé le chant de travail quand les chanteurs ont décidé d'accompagner leurs chants par une guitare et non par un banjo, pourtant très répandu à l'époque.

Elle avait l'avantage d'être plus humaine.

Les notes courtes et saccadées du banjo ne s'accordaient pas avec le style vocal du blues car il n'offrait ni les notes prolongées, ni la profondeur et la chaleur de la sonorité de la guitare.

Le blues avait besoin d'un instrument à effets quasi vocaux, ce que la flexibilité de la guitare offrait. La guitare fonctionnait comme des choeurs, très en vogue dans le Gospel et la musique religieuse noire.

Charlie PATTON, mort en 1934, fut un des pionniers dans l'utilisation de la guitare.

Durant les années 20-30, Blind Lemon JEFFERSON au Texas, inventa le fingerpicking en faisant alterner les basses fortement marquées et des arpèges mélodiques.

Blind BLAKE en Géorgie créa un style proche du ragtime agrémenté de rythmes volés aux musiques des Caraïbes.

Tommy JOHNSON jouait les basses ambulantes du boogie-woogie pianistique.

Son HOUSE, Bukka WHITE, Tampa RED et Robert JOHNSON explorèrent à fond la technique du bottleneck, adaptation indirecte de la guitare hawaïïenne largement en vogue au début du XXè siècle dans le Sud.

Cette technique est une des forces majeures de la guitare bluesy.

Big Bill BROONZY, aussi à l'aise dans le picking que dans le ragtime, marque l'histoire de la guitare et celle du blues.

Lonnie JOHNSON inventa très probablement le flat picking : la guitare devenait entre ses doigts un instrument soliste et elle fut alors placée au niveau de la trompette ou du saxphone dans la musique noire américaine. L'après guerre et le début des années 40 furent marqués par l'invention de la guitare électrique. C'est à T. BONNE WALKER que l'on doit l'intrusion de l'électricité dans le monde du blues. La guitare électrique facilitait le passage du Blues Rural au Blues Urbain.

T. BONNE WALKER sera le premier à reprendre sur l'électrique le jeu note à note de Lonnie JOHNSON en accentuant encore plus tous les effets émotifs.

On ira même jusqu'à utiliser des sections de cuivres.

Dès 1945, Muddy WATERS créa les formules orchestrales du Chicago Blues et de tout le blues moderne. Champion du bottleneck, B.B. KING portera au début des années 50 la technique instrumentale à son sommet. Il va donner à la guitare ses pleines possibilités expressives. Il transformera les notes en paroles grâce aux effets de furieux glissandos et de brusques ruptures du volume sonore. La guitare sera "la voix", multipliant l'intensité émotive du chant par des solos où le paroxysme est atteint par graduation.

La présence de B.B. KING est si forte que les guitaristes apparus ensuite ne purent pas échapper à son influence. Certains ont pu offrir un discours parfois original comme :

Otis RUSH, Buddy GUY,

Jimmy DAWKINS, Lowel FULSON, Magic SAM, Freddy KING

Albert KING

Luther ALLISON, Magic SLIM, Son SEALS, Lonnie BROOKS, Mighty JO YOUNG,

Albert COLLINS,

Phillip WALKER, Fenion ROBINSON.

Luther ALLISON disait "le blues, tu dois le faire corps et âme, sans te retenir, les gens ne doivent pas dire que Luther n'a pas craché toutes ses tripes ! A chaque fois, tout doit sortir de ton coeur et de tes tripes par la guitare ! Le blues c'est la guitare et moi ! et c'est un rude combat !"