Récit d’accouchement douloureux: tentative d’AVAC

Publié le 23 septembre 2011 par Madameparle

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Cette rubrique est à vous. J’y publie les récits que je reçois.

Certaines histoires ressemblent à des contes de fée, d’autre sont beaucoup plus douloureuses.

J’ai pris le parti de tout publier.

La vie est ainsi faite.

madameparle@yahoo.fr

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La semaine dernière Magalie, nous racontait comment elle avait vécu son prmeier accouchement, il s’agissait d’une césarienne programmée car son bébé était en siège.

3 ans plus tard elle apprend sa seconde grossesse et appréhende les choses d’une toute autre façon.

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Lorsque j’appris ma seconde grossesse le 11 janvier 2010, ce fut un choc. Je me sentais bizarre depuis quelques temps mais je ne pensais pas qu’une telle chose puisse m’arriver sans prévenir. J’avais eu mon retour de couche le 17 mai 2009, Océane était toujours allaitée et il fut long à revenir et j’étais persuadée de ne pas être très fertile ayant mis de longs mois pour tomber enceinte la première fois. Mais un petit retard de règles et déjà les doutes m’assaillaient et je préférais faire un test plutôt que de voir les jours passer et mes règles ne pas venir par mes doutes et questionnements. J’étais donc enceinte depuis peu mais je ne savais pas exactement depuis quand. J’étais troublée, anxieuse, j’ai même pleuré mais cette fois-ci, c’était des larmes de peur, ne sachant comment Mathieu allait prendre la nouvelle, ce bébé nous le voulions, mais pas déjà, nous prévoyions de le mettre en route aux alentours des quatre ans d’Océane et voilà que ce bébé nous prenait de vitesse alors que nos vies professionnelles à Mathieu comme à moi n’étaient pas au beau fixe, 2010 devait être l’année de tous les efforts d’un point de vue travail et la nouvelle me plongea dans l’angoisse. De plus, je venais juste de rencontrer les parents d’une petite fille que je devais garder, étant assistante maternelle et il me fallait prendre une décision quant au fait de continuer avec eux donc de mentir sur ma grossesse ou leur dire la vérité. Je décidais de leur annoncer la nouvelle rapidement afin qu’ils prennent eux-mêmes une décision, le contrat n’étant pas encore signé. Ils décidèrent de me garder.

Cette seconde grossesse n’allait pas être aussi idyllique que la première, pas d’un point de vue santé, où tout s’est déroulé sans encombre hormis les quelques maux sans gravité du premier trimestre, mais d’un point de vue mental. Je vécus dans une anxiété permanente avec le boulot qui ne se passait pas d’une façon optimum à partir du mois d’avril ; même si ce bébé, nous avons souhaité le garder, j’avais du mal à entrevoir un avenir dans la situation dans laquelle nous nous trouvions. De plus, un trop plein d’émotions m’envahissaient et je revivais ma césarienne, me rappelant tous les points noirs que j’avais occultés, soulevant un bon nombre de choses qui m’apparaissaient comme insupportables alors que je pensais avoir bien assimilé l’ensemble de cette naissance. Cette seconde grossesse mettait une loupe sur chaque sentiment enfoui lors de l’extraction de ma fille, son éloignement durant de longues heures en couveuse, le fait qu’elle ait fait une insuffisance respiratoire où elle aurait pu y passer, une photo d’elle où je la voyais branchée de toute part… Le fait de m’être réveillée sans elle, sans Mathieu qui était rentré à la maison puisqu’on lui avait dit de partir, alors qu’il aurait été souhaitable qu’il soit là au moment de mon réveil. Avec tous ces sentiments qui dénotaient tant avec le récit que j’avais pourtant écris, ne relatant que les faits positifs ou plus ou moins positifs, je revivais intensément les coulisses et les zones d’ombres de la naissance de mon enfant. Bien entendu, une relation extrêmement particulière était née avec ma fille, des années d’allaitement, de câlins, de cododo nous ont permis de rattraper les manques qui ont débouchés sur cette naissance surmédicalisée. Je me culpabilisais d’autant plus de n’avoir pas su me renseigner pour vivre autre chose, mais cela ne me dérangeait pas avant de le vivre, je ne savais pas les risques ou si je les savais, je les avais totalement mis de côté pensant qu’il n’y avait qu’à faire confiance en l’équipe qui me suivait. Pourquoi douter des blouses blanches ? Ils savent eux !!!

Je ne voulais pas revivre le scénario de la césarienne et me mettant en tête de vivre un Accouchement par les voies naturelles suite à ma césarienne (AVAC), je m’armais d’un panel de connaissances pour ne plus me sentir à l’écart de cette grossesse ou de la naissance dont je rêvais. Je choisis donc un suivi avec une sage-femme libérale, la même qui m’avait fait la rééducation du périnée trois ans et demi auparavant. En parlant de ma première expérience, je n’ai pu retenir mes larmes et mes émotions. Un trop plein de sentiments revenaient à la surface alors que je les avais si bien enfouis. La grossesse a cette faculté avec les hormones de faire ressortir ce qu’on aurait pas soupçonné et d’invisible, tout redevint visible voire même criant, hurlant… j’étais en proie à une telle hargne vis-à-vis de cette césarienne, la manière dont j’avais finalement vécu tout cela. Je rédigeais donc un projet de naissance dont voici un petit résumé de départ :

« Le mal-vécu de ma césarienne :
Ma fille se trouvait en siège et ma gynécologue m’avait bien énoncé que la seule façon d’accoucher à ce moment-là était la césarienne. Je n’ai pas pensé à contredire ses dires, n’ai pas fait de plus amples recherches à ce sujet, je ne voyais pas en quoi une césarienne pouvait être néfaste pour moi par la suite et je m’attendais simplement à accueillir ma fille, que ce soit par ce biais ou par les voies naturelles, je restais confiante.

La césarienne s’est bien déroulée quoique seule au bloc sans le papa et cela a été assez pénible en soi, même si l’équipe est restée très chaleureuse de bout en bout, à me rassurer et à faire en sorte que l’ambiance soit la plus décontractée possible ce qui a dédramatisé l’intervention.

J’ai pu voir ma fille quelques instants et m’imprégner de son visage, son regard bien que très proche du mien. On l’a vite emmenée pour une surveillance accrue suite au fait qu’elle ait inhalé du liquide clair au moment de l’extraction (insuffisance respiratoire).

Je suis allée ensuite en salle de réveil où j’ai eu très froid et où je me suis sentie très seule malgré les personnes autour et le bruit ambiant. Au retour dans ma chambre une fois avoir repris peu à peu mes esprits, je me suis sentie glacée et démunie car ni ma fille ni mon compagnon n’étaient près de moi. J’ai appris l’insuffisance respiratoire de ma fille au téléphone avec une sage-femme et qu’elle se trouvait seule en pédiatrie sous surveillance.

Mon compagnon, de son côté s’est senti mis à l’écart, désinvesti dans son début de rôle de père, absent physiquement et inquiet quant à mon sort et celui de sa fille, ne sachant pas où nous nous trouvions, cherchant des informations au bout d’un moment. D’ailleurs encouragé à rentrer à notre domicile après avoir vu notre fille en couveuse, au lieu de rester sur place et de m’accueillir après mon réveil.

Tout cet épisode, qui s’est déroulé sans que je n’en dise rien reste gravé en moi, je n’ai pris conscience de tout cela que les semaines qui ont suivi l’hospitalisation et cela refait surface d’autant plus fortement que je suis de nouveau enceinte. »

Ma gynécologue qui m’avait fait la césarienne et avec qui j’étais restée pour le suivi de cette seconde grossesse en parallèle avec les sages-femmes libérales, semblait me dire au fur et à mesure des rendez-vous mensuel qu’il me fallait penser à revivre une césarienne car elle était persuadée qu’avec un utérus cicatriciel, il était suicidaire de vouloir tenter un accouchement par les voies naturelles. D’ailleurs, c’est en ces termes qu’elle me dit les choses quand je tentais de lui expliquer que je voulais vraiment éviter d’en repasser par là. Me sentant particulièrement butée, elle en prit ombrage et monta sur ses grands chevaux en m’affirmant que j’étais dangereuse pour mon enfant comme pour moi-même, qu’il fallait quand même faire confiance à ceux qui connaissent leur travail. Si j’avais fais moins confiance aveuglément justement, je n’en serai certainement pas là pourtant… Nous décidions d’un commun accord d’en rester là définitivement, ce rendez-vous fut un enfer et j’avais de toute façon l’intention de la lâcher pour son incompétence et son manque de discernement. Elle fut d’ailleurs extrêmement vexée de ma réaction quant à la césarienne, ne comprenant pas pourquoi j’étais si remontée et elle n’apprécia pas non plus que je la condamne quant à son manque de temps, les rendez-vous étant minuté… 10 minutes maximum, voilà qui est bien rentable !

Avec le projet de naissance, le suivi avec deux sages-femmes libérales, je décidais aussi d’être suivie par un ostéopathe. Peu importait désormais le coût, je voulais me donner toutes les chances de vivre un accouchement digne de ce nom. Dés le premier rendez-vous, il a vu que mon bassin n’était pas droit, que cela datait certainement depuis longtemps d’où peut-être la position en siège d’Océane qui n’avait pu se retourner par manque de place. Quoiqu’il en soit, suite à ce rendez-vous, où il me remit le bassin droit, Timéo s’est mit instantanément tête en bas et il y resta jusqu’à la fin !

Je voulais aussi une préparation à l’accouchement en pratiquant la sophrologie mais finalement, les rendez-vous avec les sages-femmes ont été surtout de longs dialogues car j’avais énormément besoin de parler de ma césarienne et de cet accouchement que je voulais le plus naturel possible. Bien entendu, elles essayaient aussi de me faire accepter qu’une éventuelle césarienne était possible, ce que je n’acceptais évidemment pas, même si je disais avec la bouche que oui, effectivement si cela devait se produire, il faudrait que je me résigne mais au fond de moi, il n’en était absolument pas question. Tout mon être la refusait, corps et esprit.

Ne faisant confiance qu’à moitié à mes sages-femmes libérales dont le discours parfois me semblait souvent empreint de crainte vis à vis du protocole des maternités non pas seulement de ma ville mais de toute la région, je voulus essayer un suivi avec une doula. J’ai pris beaucoup de temps avant de me décider, me méfiant, recherchant une personne qui pourrait me correspondre aussi bien par son tempérament que par ses tarifs n’étant pas non plus pleine aux as ! J’avais envie de pouvoir me confier, de parler encore plus librement, de me préparer au sens le plus large à cet accouchement que je voulais réussi. Je ne voulais plus rien laisser au hasard… Alors je fis appel à une doula qui m’en présenta une autre et celle-ci nous convint à Mathieu comme à moi-même. Elle m’a aidée à mieux appréhender cette expérience, à me laisser porter sans vouloir « gérer » absolument tout. Il me fallait lâcher prise. Je tentais alors de le faire malgré la difficulté.

Le dernier trimestre fut moins stressant, j’avais donc fini par choisir ma maternité étant restée dans le doute depuis le début. Je décidais d’être suivie au même endroit que pour ma fille, je voulais vraiment rattraper quelque chose et il fallait que ce soit là, à cette maternité-là de surcroît toute proche de chez moi. J’avais bien entendu un peu peur de faire LE mauvais choix mais je savais aussi que celle-ci n’était pas pire que les autres, toutes les maternités de la région se valaient tout simplement, à la limite, ce n’était pas la pire… Les sages-femmes m’avaient dit qu’ils avaient fait des progrès en matière d’accouchements physiologiques, que suite à ma césarienne en 2007, des travaux de réaménagement avaient été faits et que les salles d’accouchement étaient plus pour une approche naturelle. Il n’y avait certes pas de baignoires, mais il y avait des ballons, la possibilité d’écouter de la musique et d’avoir une ambiance zen et tamisée avec images au mur etc. Forte de cela, j’avais pris rendez-vous avec LE meilleur gynécologue qui a une liste d’attente longue comme un bras, rendez-vous pris fin mai, pour le rencontrer pour la première fois fin juillet. Il finit de me rassurer en acceptant en tout point mon projet de naissance. Je me méfiais un peu malgré tout car je savais après m’être renseignée sur le net qu’il arrivait que le projet de naissance ne soit pas un problème mais que le jour J, la moitié des souhaits n’étaient pas forcément respectés mais qu’une fois les pieds dans les étriers, on ne pouvait plus faire marche arrière. J’étais quand même assez flippée d’être confrontée à cette éventualité. Mais tout de même, ce gynécologue avait si bonne réputation, j’en entendais parler depuis si longtemps que j’eus envie de lui faire confiance un tant soit peu. Il prit d’ailleurs tout son temps pour répondre à toutes mes interrogations, prenant le temps lui-même pour tout m’expliquer, pour lire mon projet et accepter point par point tout ce que je voulais. En bref, j’étais satisfaite.

Après avoir vécu la majeure partie de ma grossesse dans un stress omniprésent, une détresse quasi permanente, j’attendais le jour de mes 30 ans pour passer cette fichue radio du bassin obligatoire pour avoir l’aval de vivre l’accouchement de mes rêves. Heureusement pour moi, les résultats furent tout à fait satisfaisants et depuis le jour où j’appris cette bonne nouvelle même si la pelvimétrie n’était pas quelque chose de fiable en soi, je fus vraiment soulagée et décidais de vivre cette fin de grossesse un peu plus sereinement. Bébé tête en bas, radio du bassin satisfaisante, je n’avais plus de réelles raisons de m’en faire.

J’attendais donc la fin de la grossesse, l’entrée en maternelle de ma fille, autre raison de m’inquiéter quant à la séparation déjà, et puis au chamboulement que cela allait occasionner chez Océane, cumulé avec l’arrivée de son petit frère. Mais tout se passa bien, elle était pressée depuis des mois de vivre sa première rentrée scolaire et même si les derniers jours elle eut un peu peur, elle ne pleura pas tellement et vécut tout cela beaucoup plus sereinement que moi-même. Rassurée par son comportement, je n’attendais plus que la naissance de mon second bébé, j’avais hâte de vivre cet accouchement, hâte et une peur bleue aussi !

Les premières contractions douloureuses se firent tout à fait supportables, le 8 septembre dans l’après-midi. Elles durèrent une heure toutes les vingt minutes. Je pensais que ça travaillait et que ma rencontre avec mon bout de chou allait maintenant être imminente. Elles revinrent dans la nuit du 9 septembre, réveillée par une particulièrement douloureuse, je me levai et m’installa sur le ballon. Elles étaient à intervalles d’un quart d’heure et finalement supportables. Une fois debout, à m’activer un peu, elles disparaissaient mais dés que j’étais au repos, elles revenaient. Je me disais que ce serait pour le week-end certainement… J’étais excitée et impatiente et ne pouvais plus dormir. Mais je les trouvais tout de même très gentilles ces contractions, je me demandais comment seraient les prochaines ; je m’attendais quand même à connaître quelque chose de plus transcendant. Je me sentais bien, prête et heureuse de ressentir cette sensation jusqu’ici totalement inconnue. J’étais enfin active dans la naissance de mon enfant, j’aimais ressentir mon corps, j’avais tellement envie d’aider ce petit être à prendre place en ce monde ! Avec toutes les informations que j’avais accumulées sur comment gérer la douleur de la naissance, j’étais si bien armée pour faire face…

Le 10 septembre au soir, rebelote mais elles disparaissaient toujours au bout d’un moment. Je ne notais même plus l’heure à laquelle elles apparaissaient comme si j’étais un peu blasée finalement et je devais l’être un peu… Durant le week-end, elles m’ont fichu la paix pour revenir dans la nuit du 13 septembre, le jour de l’anniversaire de Mathieu. J’ai pensé que ce serait drôle que bébé naisse le même jour que son père, mais les contractions étaient toutes les dix minutes voire tous les quarts d’heure. On fêta donc l’anniversaire de papa sans aller à la maternité. Les contractions devaient décidément m’empêcher de dormir dans la nuit du 14 septembre, surtout qu’en s’intensifiant je ne pouvais réellement plus dormir du tout tant la douleur une fois allongée me saisissait complètement. J’étais mieux sur le ballon à respirer profondément. Ce qui commença à me miner, c’est qu’effectivement, j’avais surtout mal la nuit et mon homme dormait pour être en forme pour aller travailler. Moi je ne dormais quasiment plus durant plusieurs nuits et ma mère vint en journée pour m’aider avec Océane, l’emmener à l’école, la ramener, lui faire son repas et moi, j’essayais de me reposer entre deux contractions qui en journée s’espaçaient. Je désespérais un peu et commençais à être très fatiguée physiquement me demandant quand bébé allait réellement se décider.

Par trois fois, je me suis rendue à la maternité pour rien à revenir chez moi de plus en plus démunie. La troisième fois, j’en pleurais tant je ne pouvais plus supporter ces douleurs qui n’étaient que le pré-travail qui me rendit de plus en plus dingue. L’attente et la douleur croissante eurent raison de moi.

La journée du 16 septembre fut une épreuve, ce fut ce jour-là où je me rendais pour la troisième fois à la maternité avec une sage-femme pas spécialement douce que j’avais déjà vu le 14 et qui m’avait auscultée de manière sauvage. Elle ne m’encouragea pas une seconde, me disant que de toute façon, le bébé viendrait quand il viendrait et que pour le moment, mes contractions ne servaient à rien, que mon col ne bougeait pas. Elle ne parvenait surtout pas à atteindre mon col étant donné que la tête de mon bébé était très basse, il lui fallait passer au-delà de sa tête pour atteindre mon col et elle y allait tellement fort, que j’avais trop mal, et elle ne pouvait pas voir où j’en étais. La veille, lors d’un autre contrôle, une autre sage-femme beaucoup plus douce et patiente, parvint à faire ce travail et me dire que ça avançait, que mon col était ouvert à 1 doigt ce qui m’encouragea malgré tout, tout ce pré-travail n’était pas vain ! Mais le 16, en retrouvant cette idiote de sage-femme, mes espoirs retombèrent et avec ma mère et ma fille, on se rendit au parc où j’étais totalement en proie aux larmes et à la douleur. En rentrant à pied à la maison, les contractions se firent encore plus intenses à en crier, et suite à cette ultime visite foireuse à la maternité, je n’y croyais plus, je ne comprenais pas que le travail ne se mette pas en route ; je n’osais même pas prendre les granules d’homéopathie prescrite par ma sage-femme libérale pour le début de travail, car depuis plus d’une semaine, j’avais des contractions et je ne savais plus si je devais les commencer ou non… J’étais perdue.

Complètement crispée, angoissée, ne respirant plus, les contractions devinrent insupportables mais elles devinrent aussi beaucoup plus rapprochées. J’avais déjà eu ces derniers jours des contractions se rapprochant ostensiblement des cinq minutes, mais elles s’espaçaient aussi donc je n’y croyais plus. J’attendis longtemps aidée de ma mère et de Mathieu qui était revenu du travail, pour voir si elles étaient bel et bien régulières, toutes les cinq minutes comme il le fallait pour pouvoir enfin me rendre à la maternité sans être refoulée. Ma mère repartit chez elle vers 18h30 et les contractions perduraient quant à elles. Je n’en pouvais plus.
Comme durant la grossesse, envolée la sérénité, détruit le sentiment d’œuvrer à la naissance de mon enfant, j’avais l’impression d’être une débile qui ne savait pas reconnaître le moment ultime. J’y croyais depuis des jours et les jours passaient sans que bébé ne se décide !

On mangea un peu, et j’appelais une nouvelle fois la maternité un peu après 21h pour savoir ce que je devais faire. On m’invita à revenir une fois encore même si ça devait être une fois de plus pour rien. Mathieu me dit que cette fois c’était la bonne ; je n’étais pas aussi catégorique ! On se rendit donc à la maternité aux alentours de 22h avec Océane, on l’avait bien briefée quant à son sort une fois que le moment serait venu, elle savait que sa mamie viendrait la garder chez nous le temps que papa et maman vivraient la venue au monde de son petit frère. Elle savait depuis un moment qu’il devait sortir du ventre incessamment sous peu.

Une fois à la maternité, je tombais sur une sage-femme très gentille, réellement attentive à mon bien-être. Elle m’ausculta elle aussi en y allant doucement après l’avoir avertie que la tête du bébé était très basse. Le monitoring montra enfin un réel début de travail effectif, et cette fois-ci était vraiment la bonne ! Je restai donc à la maternité. Mathieu appela ma mère qui refit le trajet de chez elle à la maternité afin de récupérer Océane. J’étais très anxieuse, je tremblais de tout mon corps, me crispant encore et ressentant les contractions d’autant plus violemment. La sage-femme trouva les mots pour me détendre, me dit que tout cela était normal mais qu’il fallait que je respire bien pour mieux appréhender les contractions. Je le savais bien mais j’étais en proie à des émotions incontrôlables et mon corps n’obéissait en rien. Pour ne pas faire peur davantage à ma fille qui m’avait déjà vue troublée et abandonnée à la douleur, je tentais très fort de me raisonner et de sourire aux blagues de Mathieu.

A l’arrivée de ma mère, un bon trois quart d’heure après, Océane était de toute façon très fatiguée et n’avait qu’une hâte c’était de rentrer pour aller se coucher ce qui me rassura car j’avais peur que la séparation soit plus difficile. Vue l’heure à laquelle elle se coucha, il était prévu que ma mère la laisse dormir le lendemain et qu’elle n’aille pas à l’école. Quant à nous, on nous mit dans une chambre de pré-travail et non en salle d’accouchement par manque de place et vu le nombre croissant d’accouchements pour la nuit, la sage-femme semblait sûre que j’accoucherai dans la nuit vu que j’étais dilatée à trois et que ça avait l’air de bien avancer. Elle lut mon projet de naissance en me disant qu’il était tout à fait envisageable de faire comme je le souhaitais. Cette sage-femme était calme, posée et semblait encourageante quant à mon cas.

J’arrivais enfin à me détendre pour vivre au mieux les contractions. Je voulais vraiment me passer de la péridurale et reprenant confiance en moi et reprenant foi, je vivais les contractions beaucoup mieux même si l’intensité de la douleur était toujours aussi forte. Je respirais entre chaque. Le monitoring fut posé qu’à intervalles et non pas en continue mais quand j’étais clouée sur place, attaché à ce machin, j’eus du mal à supporter les contractions attendant avec impatience qu’on m’enleva cet instrument de mesure et de torture. J’arrivais bien mieux à respirer sans cela surtout que d’entendre le cœur de mon bébé me stressait. De minuit à 5h du matin, j’essayais de maintenir le cap, appelant à la rescousse Mathieu quand vraiment ça devenait trop dur, clouée au lit, ne rêvant que de dormir alors que depuis des nuits je ne dormais plus, Mathieu fatigué de sa journée rêvant de dormir dans mon lit alors qu’il était à somnoler sur un fauteuil en mettant les pieds sur le ballon, position inconfortable…

Ne vivant les contractions que la nuit, je commençais à trouver le temps réellement long, et à me retrouver finalement seule, conditions d’accouchement que je n’avais pas pensé vivre, puisque Mathieu n’étant finalement pas avec moi, il faisait bien comme il pouvait, m’aidant quand je l’appelais mais j’aurais aimé une présence de tous les instants et ce ne fut pas le cas. Excédée par la douleur et la solitude, me disant que ça devenait réellement trop dur pour moi, n’ayant envie que de dormir, je fis venir la sage-femme très prise par les accouchements qui s’enchaînaient car mon tour ne venait décidément pas. Mon col n’avait pas bougé et était resté à cinq depuis les deux heures du matin. Je me décourageais et je pleurais. Je lui demandais de m’aider, je n’en pouvais plus. Elle me proposa deux possibilités :
La péridurale ou une injection de morphine. Dans les deux cas, je n’étais pas enchantée mais je savais intimement que j’avais fais plus que je ne pouvais supporter. Je me détestais à cet instant, me trouvant lâche après tous ces efforts. J’y étais presque et je lâchais prise, je voulais juste me reposer, dormir, ne plus souffrir. La morphine, je ne voulais pas, ne sachant pas exactement quel impact ça aurait sur le bébé et la douleur serait revenue au bout d’un temps réduit. Quant à la péridurale, elle pouvait être mal dosée, ne servir à rien, n’était pas forcément le mieux pour le bébé ou pour moi, pour l’avancement du travail. La sage-femme me laissa réfléchir pendant un moment. Et je pris la décision de prendre la péridurale. Je voulais dormir, me reposer pour recharger les batteries pour les poussées. On m’installa en salle d’accouchement et j’attendis un moment avant que l’anesthésiste ne vienne pour me faire l’injection. Il l’a dosa parfaitement. Je sentais mes jambes, je pouvais même les bouger un peu, et je sentais toujours les contractions mais sans la douleur. J’étais contente de ne pas être totalement dépossédée de mon corps et des sensations. A un moment, la sage-femme m’ausculte à nouveau et la dilatation était bien avancée même avec la péridurale. Mais ce fut aussi la fin de sa garde et l’air un peu désolée, elle me dit qu’elle allait y aller, qu’elle me souhaita bonne chance pour la suite. Moi, j’étais assez déçue, je la trouvais si bien ; je craignais de ne pas tomber sur une sage-femme aussi compréhensive et attentive et ce fut effectivement ce qui se passa.

J’ai pu dormir quelques heures. L’effet de la péridurale commença à faiblir, plus ça allait plus je sentais le bébé descendre, une drôle de sensation qui me donnait une envie irrépressible de pousser mais n’osant pas sans la présence de la sage-femme. Celle-ci n’était pas très disponible ni très bavarde. Je disais à Mathieu d’aller la chercher, et la première fois, elle me regarda le derrière et s’en fut sans rien me dire comme si vraiment, j’abusais de la déranger pour si peu de choses… Sauf que je continuais à avoir cette sensation de pesanteur et cette envie dingue de pousser. Je commençais à me tordre dans tous les sens tant ça me gênait et que j’avais peur que le bébé sorte sans que personne ne soit là pour le réceptionner. Elle revint et apparemment, elle vit que le moment était arrivé… enfin ! Elle voulu me mettre sur le dos, en préparant les étriers. Ne sachant pas exactement où j’en étais de l’effet de la péridurale, je ne savais pas si je pouvais demander à me mettre dans une position plus physiologique…
Je n’osais plus rien dire, j’avais bien mon projet de naissance en tête mais pour moi, cette sage-femme là avait bien dû le lire et savoir ce que je voulais vivre…
Mais comme j’avais opté pour la péridurale, je doutais de la possibilité d’aller au bout de mes souhaits, je me sentais dépossédée de moi-même et pas confiante en cette sage-femme particulièrement froide et peu expressive. Je la regardais mais n’osais rien lui dire. Mathieu était à mes côtés mais lui aussi se laissait porter par ce que disait la sage-femme comme si mon briefing n’était qu’un lointain souvenir. J’avoue que moi-même, j’étais si perdue, sachant que le moment était venu, mais ne sachant plus ce qu’il convenait de faire, attendant finalement les directives, étant de nouveau prise de tremblements incontrôlables…
Le fait de ne plus me sentir en confiance me faisait perdre le nord et ma capacité à mettre au monde mon enfant…
Je demandais malgré tout une autre position voyant que la position allongée, pieds dans les étriers me gênait particulièrement, on me permit de me mettre sur le côté. Je poussais durant les contractions comme elle me le disait, les poussées ont duré longtemps, je poussais tout ce que je pouvais mais cela ne donnait rien. Une demie heure passa et ça m’épuisait, la sage-femme me regardait comme si j’étais une imbécile heureuse incapable de faire ce qu’elle me disait. J’avais envie de lui en mettre une mais je continuais de pousser comme une dératée ne sachant ce qui pouvait bloquer, je sentais mon bébé prêt à sortir mais il ne passait pas…
Une fois de plus, je me sentais si impuissante, incapable en effet de mettre mon bébé au monde malgré tous mes efforts. Je vis à un moment que du monde était là, je m’endormais à moitié entre chaque contraction et chaque poussée, l’aide soignante plus sympathique que la sage-femme m’encourageait doucement mais je ne l’entendais pas très bien, je sentais bien qu’elle était plus à l’écoute mais si discrète elle fut dans son action que je ne me rendais compte qu’à moitié de sa présence. Une autre femme nous avait rejoins, elle avait pris le relais, et je la reconnus, c’était la gynécologue dont je ne voulais pas avoir affaire…
Désappointée je me disais que décidément, je n’avais pas de chance ! Elle commença à me mettre des spatules dans le vagin pour faire sortir le bébé. Cette sensation fut tellement désagréable que je lui sommais de retirer ces machins en me tordant de douleur ! J’en avais si marre ! Elle me répondit sur un ton de défi que je pouvais toujours rêver ! J’avais une envie de meurtre, je me tordais dans tous les sens en criant tant mon corps entier était douloureux. On fit venir un anesthésiste, je n’entendais plus grand-chose, ne voyais plus grand-chose non plus, j’étais présente par moment, perdant notion du temps, entendant quelques bribes de conversation et me rendormant l’espace d’un instant mais ressentant mon corps qui ne m’appartenait plus comme un tronc de douleurs avec un truc à expulser mais quoi déjà ?
Je sentis une coupure et je criais « aie !!! » une seconde coupure « aie !!!!!! »
Je sus plus tard que l’équipe avait oublié que la péridurale m’avait été injectée plusieurs heures plus tôt et qu’elle ne faisait plus effet. C’est Mathieu qui me raconta que l’anesthésiste était troublé par mes cris et que c’est lui qui émit le fait que la péridurale ne faisait plus effet ! Moi je hurlais que je voulais tout stopper, qu’il fallait qu’ils arrêtent, qu’ils m’enlèvent tout, je ne voulais plus accoucher, je voulais tout arrêter, je voulais qu’on me foute la paix !

On me dit et je l’entendis vaguement qu’il fallait qu’on m’endorme pour faire sortir le bébé. On me présenta un truc pour respirer et je pris quelques inspirations.

J’entendis un petit pleur alors j’ouvris les yeux en tournant la tête du côté où le bruit était émit. Je vis Mathieu porter un bébé habillé et je ne compris pas. Mathieu avait l’air un peu triste en voyant ma mine déconfite. Je compris que j’avais manqué le moment magique de la naissance. On m’expliqua que j’avais eu une épisiotomie et une déchirure et qu’on venait de me recoudre. Dans mon esprit je me disais que j’avais eu la totale, pour un accouchement naturel, on pouvait repasser…
De voir mon enfant habillé je me suis d’autant plus sentie dépossédée de sa naissance, une fois de plus on m’avait volé les premiers instants de vie, on m’avait volé tout le travail de préparation de ce moment unique. Une colère monta en moi pour ne plus redescendre mais je pris mon bébé dans les bras. J’étais perdue, je le regardais, je l’aimais déjà mais il ne me vint pas à l’esprit de faire connaissance avec lui réellement. Je ne pensais plus à la tétée de bienvenue. J’étais perdue. Je demandais à Mathieu comment il était arrivé, si on avait attendu pour le clampage du cordon comme je le voulais, si on avait fait une révision utérine ou pas…
Mathieu ne savait pas, il était parti avec lui pour les premiers soins… soins que je ne voulais pas qu’on pratique… pas si vite…

Tout mon projet de naissance avait été fait en vain. Voilà je voulais mon AVAC, voilà comment je l’ai vécu.

A l’heure où je suis entrain d’écrire la fin de mon récit, seize jours se sont écoulés depuis que Timéo est né. Il a choisi un jour particulièrement symbolique, il nous a rejoint le 17 septembre 2010, soit 8 ans pile après notre rencontre avec Mathieu, il ne pouvait choisir une plus jolie date. Il est né à 11h42, il pesait 3085 kg pour 49 cm. Un joli bébé qui tète aujourd’hui comme un chef, un allaitement mit en route en douceur par mes soins.

Le lendemain de l’accouchement, la gynécologue qui m’avait charcutée la veille vint me voir, toute doucerette pour me dire que ça avait été très dur de faire sortir le bébé. Il avait deux tours de cordons lâches autour du cou. Il n’était pas en souffrance mais je ne pouvais pas le faire sortir rien qu’avec mes poussées qui étaient effectivement totalement inefficaces. Elle reconnut avoir eu elle-même du mal à le faire sortir. Voilà la raison de cette naissance manquée, de ce rendez-vous loupé…

Seize jours après, ma colère et ma rancœur sont toujours aussi vives. J’ai mal à mon intimité à cause de cette épisiotomie, bien plus que pour la déchirure que je sens à peine. Je me sens diminuée et mutilée, ne sachant si un jour j’arriverais à accepter ce qui m’est arrivé. J’en veux tellement à tous les intervenants présents lors de la naissance de mon fils. Je sais que je vis actuellement un joli baby blues mais il y a aussi des zones d’ombres et j’aimerais y mettre de la lumière. Bientôt, je demanderai à la maternité les deux dossiers, celui de la naissance de ma fille, celui de la naissance de mon fils pour pouvoir faire le deuil des mises au monde raté.

Le seul réconfort que j’ai, c’est l’amour inconditionnel que j’éprouve pour mes enfants, pour mon homme. Que de plaies à panser, heureusement qu’il me reste l’allaitement, le maternage, l’amour des miens pour surmonter ces épreuves-là.