Je porterais de hauts talons hauts. Ou des ballerines. Peut-être que je mettrais du rouge à lèvres pour illuminer les jours gris. J’aimerais les robes légères, les sandales qui claquent sur les pavés chauds de l’été, j’aimerais les pantalons fuselés à la taille basse, j’aimerais une vieille couverture où enrouler ma tasse de thé. J’aimerais l’été, j’aimerais la mer, les bikinis dépareillés. J’aimerais les pulls d’homme qui descendraient jusqu’aux genoux. J’aimerais me préparer pour le soir, les crèmes les pinceaux et le blush. J’aimerais le noir au beau nom de khôl. J’aimerais la caresse du vent sur mon visage nu. Mes cheveux longs éparpillés par le vent.
Moi, si j’étais une femme, et que je devais tomber raide dingue d’un homme, raide dingue sur le champ, j’aimerais Marlon Brando en T-shirt blanc. J’aimerais Brad Pitt dans « Et au milieu coule une rivière. » J’aimerais Keith Richards à cent mille ans. J’aimerais Morgan Freeman à 150 ans. J’aimerais Lenny Kravitz, là tout de suite et maintenant. Je serais prête à tomber raide dingue pour un homme qui aurait de la gueule avec du feu dedans.
Moi, si j’étais une femme.
Je n’aurais aucun regard, pas l’ombre d’un frisson pour un vieux bonhomme petit et gros dans une chambre d’hôtel. Pas la moindre émotion. Et même si je le surprenais nu au sortir de son bain, je détournerais le regard pour ne pas voir les chairs qui tombent et la graisse qui pend. Pour ne pas voir les poils épars perdus sur des seins plus gros que les miens. Pour ne pas voir les premières taches de la mort sur ce ventre enceint.
Moi, si j’étais une femme, comment aurais-je pu, dès le premier regard, désirer ce type vieux, gros et la queue en avant. Je sais bien que je suis un homme, mais ne me prenez pas pour une conne. Je veux bien que Brad Pitt m’entraine à l’instant sous une porte cochère ou que Morgan Freeman m’enferme dans le placard à balais. Mais lui, vous l’avez regardé ? Il lui manque tout : le format, l’allure, l’étincelle et cette chaleur diffuse qui fait qu’on pourrait parfois se jeter dans les bras d’un homme. Vous l’avez regardé ? Vraiment ? Imaginé nu dans sa chambre d’hôtel ? Fermez les yeux un instant et mettez-vous dans la peau de cette femme. 9 minutes laissent peu de place à l’imagination. 9 minutes sont avant tout une affaire de deux corps qui se reniflent avant de se reconnaitre. Deux corps. Son corps à lui. Un objet de désir. Vous le croyez ? Vraiment ?
Moi, si j’étais une femme, je ne croirais pas trop aux histoires que racontent les hommes.