« Tout dépend de ce que vous entendez par crise, dit-il. Si l’on se réfère aux chiffres, la France tire son épingle du jeu. Prenons le fameux critère de Maastricht. Il impose que le ratio de la dette publique (2) sur le PIB (produit intérieur brut) n’excède pas 60 %. Actuellement seule l’Espagne le respecte… et fait mieux que nous qui sommes à 82 %. Quand l’Allemagne affiche 83 %, l’Italie à 120 %. Hors de l’Europe, c’est pareil, les États-Unis sont à 95 %, le Japon à plus de 200 % ».
Que peuvent les politiques sur l’économie ?
Les marchés fonctionnent beaucoup plus vite que l’économie réelle, beaucoup plus vite que la décision politique…
Et ?
Les politiques pourraient décider de freiner ces marchés. Appliquer la taxe Tobin (3) serait un bon moyen, comme de rendre moins opaques les nouveaux marchés des denrées où on ne sait pas qui fait quoi… Il en est question, Mais, il n’en reste pas moins que cette impression que les politiques, volontairement ou non, sont à la remorque des marchés, c’est vrai.
Un exemple ?
La règle d’or, telle qu’elle est définie par l’accord Merkel/Sarkozy. C’est vouloir imposer l’équilibre budgétaire comme règle absolue. Et reconnaître, dans le même temps, la démission du politique qui ne pourra plus adapter sa politique à la conjoncture. Cette règle d’or est faite pour rassurer les marchés. Gardons en tête, cependant, que nous évoluons dans un cadre européen. Cadre dans lequel le politique français ne dispose plus de certains leviers : la monnaie et bientôt le budget. Sur quoi peut-il jouer ? Le chômage et les salaires.
Une solution ?
Si l’on peut douter de la capacité des gouvernants à résoudre la crise actuelle, ils ne peuvent ignorer que les électeurs sont de plus en plus sensibles au partage des sacrifices, à une répartition des richesses plus équilibrée, à la revalorisation des revenus du travail par rapport à ceux du capital. On ne peut bâtir une société sur le principe du chacun pour soi. Il y a un degré d’inégalité que l’on ne peut dépasser. Et tout est lié : la baisse du pouvoir d’achat et l’insécurité vont au même rythme.
En clair ?
On ne vote pas uniquement sur des questions économiques.
Pourquoi voter ?
Commençons par nous demander sur quoi voter ? Un bilan ou l’avenir ? Pour le changement ou un espoir plus large, sans vouloir parler d’utopie ? Est-ce que l’on vote égoïstement, pour son intérêt personnel, une diminution de l’impôt, le maintient de ses privilèges, ou dans l’intérêt général ? N’est-ce pas sur cette question que le politique a perdu le plus et dévalué son action ?
Vous ?
Si je suivais les économistes libéraux, je voterais égoïstement, au plus près de mes intérêts. En tant que citoyen, je ferai exactement le contraire.
Daniel MARTIN
daniel.martin@centrefrance.com
(1) Professeur agrégé de sciences économiques, directeur du master professionnel de gestion de patrimoine. Responsable de la licence professionnelle de gestion des organismes de l’économie sociale et solidaire, à Clermont. Auteur de nombreux essais.
(2) Dette publique = dette des collectivités + dette de la Sécurité sociale + dette de l’État.
(3) Elle consiste en une taxation des transactions monétaires internationales afin de ne plus inciter à la spéculation à court terme. Le taux choisi serait faible, de 0,05 % à 1 %.
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