A propos d' " homme-arbre " ( cf article précédent ... )
« Le dernier des soleils tombe.
où se couchera t-il sinon en moi ?
A mesure que se mourrait toute chose,
je me suis, je me suis élargi, comme le monde,
et ma conscience plus large que la mer !
Dernier soleil.
J’éclate. Je suis le feu. Je suis la mer.
Le monde se défait. Mais je suis le monde
La fin, la fin disons-nous.
Quelle sottise. Une paix proliférante d’obscures puissances.
Branchies opacules palmes syrinx pennes.
Il me pousse invisibles et instants par tout le corps,
secrètement exigés, des sens,
et nous voici pris dans le sacré
tourbillonnant ruissellement primordial
au recommencement de tout.
La sérénité découpe l’attente en prodigieux cactus.
Tout le possible sous la main.
Rien d’exclu.
Et je pousse, moi, l’homme stéatopyge assis
en mes yeux des reflets de marais, de honte,
d’acquiescement
pas un pli d’air ne bougeant aux
échancrures de ses membres
Sur les épines séculaires
je pousse, comme une plante
sans remords et sans gauchissement
vers les heures dénouées du jour
pur et sûr comme une plante
sans crucifiement
vers les heures dénouées du soir
La fin !
Mes pieds vont le vermineux cheminement
plante
mes membres ligneux conduisent d’étranges sèves
plante plante
et je dis et ma parole est paix
et je dis et ma parole est terre
et je dis
et
la joie
éclate dans le soleil nouveau
et je dis :
par de savantes herbes le temps glisse
les branches picoraient une paix de flammes vertes
et le terre respira sous la gaze des brumes
et la terre s’étira. Il y eut un craquement
à ses épaules nouées.
Il y eut dans ses veines un pétillement de feu.
Son sommeil pelait comme un goyavier d’août
sur de vierges îles assoiffées de lumière
et la terre accroupie dans ses cheveux
d’eau vive
au fond de ses yeux attendit
les étoiles…. »
Extrait d’un poème tiré du recueil "cent poèmes d’Aimé Césaire" de Daniel Maximin, ed Omnibus, 2009