Entre deux billets j'insère un post de mon fils Alexandre. Après un bref passage à Paris, voici Alexandre et Julie repartis, cette fois-ci à moto, vers des horizons moins exotiques, en Europe. Première étape de ce parcours, L'Auberson où Alexandre retrouve un cousin, fromager en Suisse.
700 Mont-d'Or en cours de fabrication !
Bénédicte et Vincent ont su peu à peu gravir les échelons, à force d'amour de leur travail. Au début, employés par la coopérative paysanne, il leur fallait à deux recevoir le lait deux fois par jour (dès 5 heures du matin, puis de nouveau vers 18 heures), faire les fromages, tenir la boutique, et tenir les comptes. Aujourd'hui, ils sont propriétaires d'une entreprise prospère avec 7 employés et toujours autant de travail.
Bénédicte aux commandes
Fascinés (nous sommes tellement accros au fromage que nous avons même eu besoin de manger une fondue savoyarde à Bali, à 38° !), Julie et moi suivons deux jours durant la routine quotidienne. Les vaches ont la mauvaise habitude d'êtres traites deux fois par jour et ne connaissent pas les dimanche et jours fériés, sans parler des trente-cinq heures. Du coup ça commence tôt, ça termine tard, et il n'y a pas de jour chômé. En quelques chiffres :- 7000 l. Quantité totale de lait amenée par les producteurs chaque jour.
- 140 l. Quantité de lait amenée par les plus petits producteurs. C'est presque de l'artisanat.
- 3600 l. Contenance de chacune des deux grandes cuves dans lesquelles le lait est caillé.
- 35 kg. Poids d'une meule.
- 700. Nombre de vacherins Mont d'Or produits en une matinée.
Pose de la sangle d'épicéa autour des Mont-d'Or
Je suis frappé par la combinaison de haute technologie et de savoir-faire artisanal nécessaire pour produire des fromages de cette qualité. D'un côté, un ordinateur central pilote l'ensemble du circuit dans lequel passe le lait, la température des cuves, le nettoyage automatique, la traçabilité depuis chaque apport de lait jusqu'à chaque fromage... et d'un autre côté, Vincent prend les "vraies" décisions comme la température et le temps qu'on chauffe le lait, le moment où on "décaille", etc. la main plongée dans le bac, le regard absent. Et quand il dit "c'est bon!", alors on sait que c'est bon, mais on ne sait pas pourquoi. Et l'ordinateur non plus ne sait pas pourquoi. On retrouve ce savoir-faire chez les ouvriers qui, chaque jour quasiment, frottent et retournent les meules de 35kg en affinage. Dédé, 66 ans, au poste tous les matin à 4h30, sait exactement quand une meule a besoin de plus de sel, de moins de ceci ou plus de cela. Il le sent, c'est tout. 52 ans dans le métier, il passe ses semaines de vacances à... visiter des fromageries dans les environs. Repassant le petit poste frontière deux jours plus tard, je ne puis m'empêcher de penser que certains métiers sont plus concrets que d'autres. Que produit un trader par exemple ? Qu'apporte-t-il à la société ? Dans le cas de Bénédicte et Vincent, j'ai la réponse. Nos sacoches en sont remplies.