LE VOYAGEUR SANS VOYAGE (extrait)
La Russie.
La Chine.
La Mongolie.
Ou un autre pays
Personne n’avait entendu parler d’un autre pays.
- Il existe, dit l’enfant.
Quelque part, près d’ici, le train bleu se détournait de sa destination, roulait sans s’arrêter, de nuit comme de jour, traversait des montagnes, surplombait des lacs, glissait au-dessus des barrages aux lents remous d’orage, roulait au milieu des champs, des terres, au milieu des vols de corbeaux, roulait dans les forêts de sapins, dans le regard des animaux.
Et le jour se levait. Et la nuit revenait.
Le train bleu roulait pour ne plus s’arrêter.
Je me demandais qui conduisait le train bleu, pourquoi aucun voyageur ne descendait, aucun ne montait, peut-être étaient-ils pris sous la glace, peut-être que leurs regards de statue attendaient, tournés vers la porte, avec déjà cette fine anxiété, - main serrant la poignée d’une valise - le terminus où personne ne descendrait.
Peut-être étaient-ils déjà arrivés, les wagons étaient vides, les passagers avaient laissé la gare derrière eux et le train était reparti, un soir, quelques minutes avant la tombée de la nuit. Vide.
- Il n’est pas vide, dit l’enfant.
Pierre Cendors, Le Voyageur sans voyage, Cadex Éditions, Collection Texte au carré, 2008, pp. 21-22-23-24. Préfacé par Cécile Wajsbrot.
PIERRE CENDORS
Source
■ Voir aussi ▼
→ (sur Calou, L’ivre de lecture, de Pascale Arguedas) plusieurs pages sur Pierre Cendors, dont une note de lecture sur Le Voyageur sans voyage
→ (sur remue.net) L'appel du large, un dialogue entre Pierre Cendors et Cécile Wajsbrot (3 mai 2008)
→ (sur le site de Cadex Éditions) une fiche bio-bibliographique sur Pierre Cendors
→ Endsen, le blog de Pierre Cendors
Retour au répertoire d’octobre 2011
Retour à l' index des auteurs