Magazine Journal intime

Tous les jours dimanche ?

Publié le 08 mars 2007 par Thierry

Il y a des moments dans la vie qui baignent tellement dans l'insouciance, qu'on en vient même à se demander pourquoi les gens se plaignent. En ce qui me concerne, je dois reconnaitre que pendant plusieurs années, mes seuls sources de stress et / ou de mal-être étaient assez peu difficiles à gérer. Savoir quoi porter, savoir où déjeuner, savoir comment faire pour obtenir telle ou telle paire de chaussures, savoir avec qui s'envoyer en l'air ce jour, ou savoir dans quel bar on finira.

Le fait est que les tenues, les bars, les salaires et les hommes sont de plus en plus gérés au fur et à mesure que vous grandissez. Et que, petit à petit, vous vous rendez compte que ces questions sont certes toujours vitales, mais que d'autres peuvent parfois venir s'y apposer.

Un après-midi. Il fait gris mais bon. Pas trop froid. Pas très chaud non plus, mais on n'est qu'au mois de mars, en même temps. Après une escapade chez Ombres Portées, C. et moi nous asseyons chez Tous les jours Dimanche pour discuter de ces trois derniers mois sans s'être vus, et déguster leur déjà célèbres pâtisseries.

Ce qui frappe dans ce lieu, c'est qu'à peine rentré, vous ressentez une âme. Au départ, on se croirait chez un antiquaire. À l'entrée, on tombe nez à nez avec des gâteaux et des tartes maison qui trônent fièrement sur un vieux bahut. Et dire qu'ils nous font de l'oeil serait un euphémisme : non non non, ils nous draguent ouvertement. Gens de petite moralité, fuyez !
Une fois assis dans un des fauteuils club du coin bibliothèque, on ne peut plus décoller de tout l'après-midi. Normal, le fauteuil s'est tellement enfoncé qu'il vous recouvre de son moelleux. Endroit parfait pour une session de papotage, disposant d'une faculté ineffable à nous faire oublier montres, horloges et téléphones, nous voilà partis pour un retour dans le temps.

On commence par rattraper le temps perdu. Les escapades, le boulot et les cocktails de l'un, les péripéties, les études et les soirées de l'autre. Doucement, le ton s'aggrave. Les doutes s'expriment, les peurs s'avouent. Les dilemmes, les choix cornéliens auxquels on doit faire face. Les renoncements qui découlera de la décision. L'un parle, l'autre écoute. Elle comprend. Ne conseille pas. La conversation ne durera pas dans le temps, car les montres n'existent plus, mais la douleur qui en ressort envahira tout l'espace.

C. aussi a des démons à faire sortir. Elle aura du mal à parler. Puis du mal à se taire. Pas de jugement non plus. Peu de mots. Des regard. Des larmes aussi. Un avortement. De la douleur. De la tristesse. Je n'imaginais pas que ça puisse être aussi dur. " Parfois, les décisions les plus sages sont les plus douloureuses". Je ne peux m'empêcher de me demander si cela sera valable pour moi.

C. est une de mes plus anciennes potes. Je la connais depuis pas mal de temps, maintenant. On a évolué ensemble. On s'est vu, puis perdu du vue, puis retrouvé. On a réussi à conserver cette amitié sincère, sans avoir à se voir régulièrement. De ces amitiés basées sur ce je-ne-sais-quoi, et sur l'amour commun de notre ville. En nous voyant assis dans ce nouveau lieu, en écoutant nos paroles respectives, je n'ai pu m'empêcher de nous revoir cinq ans en arrière.

Assis en terrasse, aux mêmes endroits sempiternellement, à parler couture, soirées, cinéma, fac' un peu et mecs beaucoup. De nos relations si semblables dans leurs déboires. Ces heures d'insouciances, ces problèmes si "graves" et ces vies si "compliquées".
Aujourd'hui, nous voilà. Un nouveau lieu. De nouveaux mots. Plus de rire, plus d'insouciance. Mais des larmes dans les yeux, et des sujets blessant le coeur et meurtrissant le ventre. Je ne regrette pas le Lille d'antan, les relations d'antan, les insouciances d'antan. La vie et les villes changent. On découvre de nouveaux lieux. On parle de nouvelles choses. Parfois c'est bien, comme ce cheesecake au spéculoos. Et parfois dur, comme tout ce qui l'a accompagné...

J'ai fêté mes quatre ans de couple avec C&T. Une autre histoire, une nouvelle chose. Un nouveau tournant aussi. Comme pour avec C., on garde les mêmes protagonistes, mais des choses changent...


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