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L’histoire commence avec Jou-Jou. Une histoire un peu...

Publié le 19 novembre 2011 par Fabrice @poirpom
L’histoire commence avec Jou-Jou. Une histoire un peu...

L’histoire commence avec Jou-Jou. Une histoire un peu longue. À épisodes. Avec digressions et temps morts. Mais pas vraiment de rebondissements. Tout çà pour une histoire qui n’est qu’un prologue finalement.

Neuf heures et quatre minutes pour la raconter. Une vie pour un enragé du clavier - de quoi repenser totalement au moins l’un des Testaments. Un battement de cil pour un lent besognard. Peu de chances qu’une virgule apparaisse de manière définitive.

Pas le choix, quoi qu’il en soit. Sans compter les longues ronflettes, le bourdonnement perpétuel conséquent, la pause déjeuner micro-ondée, les mioches qui font leur jogging dans l’allée pour se dégourdir les pattes ou bien encore les turbulences qui viennent chatouiller l’intérieur du corps d’une bien étrange façon.

Neuf heures et trois minutes. L’écran incrusté dans l’appuie-tête est un mec super.

Température extérieure: -48°. Crépitement de sachets plastiques protecteurs et hygiéniques. Les couvertures bleues et oreillers blancs à usage unique atterrissent sur des jambes qui se préparent à l’engourdissement, se calent aux creux d’épaules un peu nouées.

Deux mois et demi plus tôt, affalé dans le canapé, dos rond, épaules affaissées, Jou-Jou tire sur un zouzou. Celui du vendredi soir. Le zouzou qui vient apaiser les secousses de toute la semaine. Marseille, septembre, en pleine campagne. Au paroxysme de la bricole. Comme tous les ans, les bancs en palette ont un succès fou. Nouveauté de la saison: une pépette en mini short s’est risquée, après quelques conseils et démos à coups de visseuse, à bricoler un mini mur végétal. Toujours à l’aide d’une palette. Et de bouteilles en plastique. Et le résultat est tellement chouette que l’asso en voudrait par paquets de dix. Et que nombre de loulous de son équipe en veulent dans leur appart’ ou leur jardin.

Pleine campagne, donc. Et Jou-Jou tend le cierge.

Faut qu’on parle.

Pas de rupture en approche. Puisque pas de couple formé avec Jou-Jou. Il boit quelques gorgées d’eau pétillante et fraîche, les doigts posés sur le plastique de la bouteille, rendu opaque par la condensation.

C’est à ce moment-là que l’histoire commence. Pendant cette soirée zouzou du vendredi soir. Bavardages et internet, affalés dans les canapés de la petite maison de ville qui tient lieu de résidence à Marseille. Les doigts, humidifiés par la condensation, s’agitent sur les trackpads des portables. Nouvelle info, nouvel onglet.

La ville la plus dangereuse du pays. Éviter de se promener le jour. Éviter, sauf impératif, de s’y promener la nuit. Ne jamais sortir avec les originaux de vos papiers d’identité. Éviter de laisser appareils photo et caméras à la vue de tous. En cas de déplacement en voiture, verrouiller systématiquement les portières. Privlégier les véhicules à vitres teintées.

Le zouzou du vendredi soir. Celui qui vient apaiser les secousses de la semaine.

En cas d’agression, ne JAMAIS résister.

Deux jours plus tard, un des big boss ricains paye son private meeting dans le lobby de son hôtel standing. Pingouins derrière le comptoir, star du concert à venir qui se pilonne la tête à l’étage et liquette bleue claire à col dur pour le ricain. Casual mais corpo. Il déblatère tout en douceur. Confirme cordialement ce que Jou-Jou a évoqué le vendredi soir, cierge au bec.

A la one again euh one again. You guys very super. Tough city, tough job.

Un américain, c’est comme un écran incrusté dans un appui-tête. C’est un mec super.

L’écran sur pattes en liquette à col dur nous présente leur souhait à eux, les grands patrons, d’aller monter des projets en Amérique Latine. Dans trois pays. Trois villes.

K-Pu, calé chez les caribous depuis un bon mois, se récupérerait Bogota. La chef de proj’ british Mexico city. Reste la troisième ville.

Caracas, mon pote.

Calé dans le canapé, Jou-Jou déplie lentement un sourire. Puis Internet donne les premières infos.

Ne JAMAIS résister.

Avant le décollage, alors que l’Airbus glisse tranquillement vers la piste de décollage, Jou-Jou pose son regard sur les avions stationnés le long des terminaux de Roissy. Courte logorrhée. Avions, réacteurs, portance… Une minute durant, c’est un môme de quatre ans qui a le nez ventousé au hublot. Même de dos, il a les yeux qui pétillent.

Un pote dans toute sa splendeur. Un mec capable de surprendre par une passion sortie de nulle part. Un mec qui s’émerveille. Un mec qui a des chatouilles dans le bide devant un truc dont tout le monde se fout. Quelques milliers de mètres plus haut, le même lascar aura une montée de sucre en voyant l’avion passer la barrière des nuages et voler au-dessus des grosses boules de coton. Là-haut, la lumière est tellement forte que couvrir le hublot est une question de survie pour les rétines.

Entre négos, contre-temps et planning fluctuant, les contours de l’aventure prennent forme lentement fin octobre début novembre. Un premier voyage d’un mois jusqu’à mi-décembre pour déblayer le terrain et monter un projet pilote. Puis retour au bercail avant un autre voyage, sans doute de deux à trois mois, début 2012, pour la campagne.

En cabine, les hôtesses ont une tenue tailleur ou pantalon selon leur préférence, un tablier additionnel pour le service du repas, un petit tricot qui fera son apparition au bout de quelques heures pour lutter contre la fraîcheur ambiante.

Jou-Jou incline son siège. Neuf heures et zéro minute avant l’atterrissage à l’aéroport international Maiquetia.

Caracas, mon pote.


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