La vitre éclate dans un cri aigu. Les débris pleuvent aut...
Publié le 20 novembre 2011 par M.
La vitre éclate dans un cri aigu. Les débris pleuvent autour de ma tête. Je pars avec l'intention de ne jamais revenir, mais lorsque je me retourne une dernière fois, un arbre a surgit de la coupure béante, cramponné aux briques comme un champignon obstiné. Je porte à mes lèvres la clope condamnée qu'ensuite j'écrase avec mesure dans un gobelet fragile et crade. J'étudie la façon si particulière qu'ont vos yeux de briller - et l'éclat de verre fiché dans celui de gauche. La lumière artificielle des fluos s'y reflète dans un juste mélange de violence infinie et de tendresse abrupte. Les mots sortent enfin de ma bouche, après des mois d'attente où la salive les a rongés sans les éteindre, et je dis, je sais, je dis, c'est toi qui me l'a apprise, la valeur de la vie. Je reconnaissais les sons mais je n'en comprenais pas le sens. Je ne dis pas merci. Je tousse. Je te donne des chiffres, je ris. T'es con, dis-tu, avec ce ton réservé aux morsures ambigües des fins de nuits froides. La portière claque et le taxi s'engouffre sous le tunnel. Je n'ai pas le temps de répondre. Je ne dis pas, non pas cette fois, cette fois j'ai gagné. Je ne dis pas, est-ce que t'es fier de moi ? J'aimerais bien que tu sois fier de moi. Je prends des photos de ce qu'il reste. J'arrache un câble électrique mort, et les mains noires je retourne quelques uns de nos os perdus sous la poussière et les lambeaux du plafond défoncé. J'enfourne dans un sac des poignées colorées de plastique translucide et des lettres ratées. Au mur, tout est déjà punaisé : le silence, la ville aux lueurs aveugles, le grésillement des néons sales, l'arbre parasite et puis autour, les battements alarmés de nos coeurs au fond de la cuisine miteuse. J'écoute une berceuse au piano. L'univers convulse avec son ventre ouvert pendant que des reins se creusent, peut être sous mes doigts tièdes, mon corps est un sauvage et je ne peux pas changer ce à quoi j'appartiens, je suis amoureuse, vois-tu, de cet être défectueux qui n'a jamais été humain.