Pour comprendre l’intérêt de la poésie, dans une recherche spirituelle, il n’est que d’essayer de suivre cette expérience avec Yves
Bonnefoy ( par exemple…, en effet il s’en explique …) :
Si le poète dit refuser l’esthétisme, c’est pour ne pas enfermer le poème sur lui-même : « "La part esthétique, dans le poème, c'est l'occasion qui deviendrait la faute si on lui sacrifiait la vérité"
A lire: Introduction à la lecture de l'oeuvre d'Yves Bonnefoy par Jean-Michel Maulpoix: ici: http://www.maulpoix.net/Oeuvre%20de%20Bonnefoy.htm
Il y a, à mon avis, dans la définition même que fait Yves Bonnefoy de la poésie ; une tentative de réponse sur la spiritualité de la Parole dans le catholicisme :
« Le langage, c'est assurément pour communiquer, et la parole, cela porte alors de la signification, de la signification conceptuelle, mais la poésie, c'est pour rendre aux mots - dont cet emploi conceptuel prive qui s'y prête d'avoir plein rapport aux choses, disons l'arbre en toutes ses branches, toutes ses feuilles, et en sa place ici, maintenant, à ce détour du chemin - cette capacité de susciter des présences que la signification, et sa pensée, abolissent. Et que fait-elle, alors, la poésie ? Elle tente de réveiller ces présences dormantes sous les concepts, ce qui nous rend présents à nous-mêmes, qui alors ne sommes plus dans l'espace de la matière mais dans un lieu, elle substitue ce lieu au dehors du monde, elle fait de ce dehors une terre. La poésie n'est pas un dire, mais un déblaiement, une instauration. En cela le même silence que dans le maçon d'autrefois qui triait les pierres, les soupesait, les rapprochait les unes des autres dans la courbe du mur s'orientant vers la clef de voûte. » » interview dans l’Express le 22/11/2010
Dans son essai sur Balthus (L'Improbable, 40) Yves Bonnefoy écrit : "Nous sommes des Occidentaux et cela ne se renie pas. Nous avons mangé de l'arbre de science, et cela ne se renie pas. Et loin de rêver d'une guérison de ce que nous sommes, c'est dans notre intellectualité définitive qu'il faut réinventer la présence qui est salut."
O poésie,
Je ne puis m'empêcher de te nommer
Par ton nom que l'on n'aime plus parmi ceux qui errent
Aujourd'hui dans les ruines de la parole. […]
(…)
Je sais que tu seras, même de nuit (…)
La première parole après le long silence,
Le premier feu à prendre au bas du monde mort. »
Les Planches courbes (2001)