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Les enfants de la Terre – Volume 1 (et pas plus loin)

Publié le 08 décembre 2011 par Paumadou

Les enfants de la terre de Jean M. Auel est une série de 6 (je crois) romans qui vous transportent à la préhistoire. L’auteur, américaine,  veut son oeuvre réaliste et a fait des recherches. Ce sont des romans, parait-il, particulièrement bons vis à vis de cette époque. Auel s’est baladée à Lascaux, a demandé des tas de renseignements partout et à des tas de spécialistes de la préhistoire. Tans mieux pour elle.

Je vous averti tout de suite : je n’ai pas aimé (voilà, maman, si tu lis ça et je sais que tu le feras, comme tu as un bon souvenir du livre, ne va pas plus loin

Wink
)

La première fois que j’ai entendu parlé de ce livre, c’était par ma tante pendant mes études. Elle m’avait glissé qu’elle avait aimé l’histoire, que ça devrait m’intéresser car ça parlait choc des cultures entre néandertaliens et cro-magnons. A l’époque, j’avais pas donné suite parce que lire un roman, je n’avais pas vraiment le temps.

Puis, par hasard il y a un peu plus d’un an, je suis tombée sur le livre  dans une librairie. Comme c’était une série et que j’étais dans une fringale boulimique de lecture, j’ai pris le premier tome en hésitant à prendre immédiatement le second. Finalement, je n’ai pas acheté le second et j’ai bien fait.

Les enfants de la terre, le clan de l’ours des cavernes raconte donc le début de l’aventure d’Ayla, jeune cro-magnonne adoptée par un clan de néandertaliens. Ce livre date de trente ans et ça se sent. Si l’on passe sur les découvertes et inventions de l’intégralité de la préhistoire « amalgamées » en quelques années de vie (ce qui est un choix artistique), on ne pourra pas zapper sur des idées reçues particulièrement pénibles comme, notamment, l’idée que les néandertaliens vivaient dans des cavernes profondes, sombres avec chacun son petit feu. Heum… l’homme des cavernes n’y a jamais vécu ou alors dans des abris ouverts à flanc de falaise, pas des grottes profondes, enfermés et enfumés (imaginez donc 4 ou 5 feux de camp dans un grotte, vous allez d’abord crever de chaud en moins de dix minutes, puis vous enfumer en moins de quinze et finalement, vous verrez que même si la grotte est vaste et l’oxygène se renouvelle bien malgré la combustion, il est impossible de vivre décemment dans ces conditions).

Passons ce détail tout de même horripilant pour quelqu’un à qui on n’a cessé de répéter pendant deux ans que les hommes des cavernes n’avaient jamais habités dans les dites cavernes.

Les néandartaliens sont des brutes, machistes, patriarcaux à mort et impressionnés par la nature et ses mystères (Ayla et sa grosse tête pleine de cervelle pige pratiquement tout de suite le rapport « sexe/bébé » quand depuis des millénaires, sa famille adoptive croit que les bébés tombent du ciel… elle est trop forte quand on sait qu’elle a deux ou trois ans quand elle est adoptée)

Beaucoup de détails m’ont vraiment agacée en fait (presque tous) : Ayla est donc une cro-magnonne qui n’est « pas belle » aux yeux des néandertaliens qui sont petits, trapus, bruns (et tout poilus, nan, ça c’est pas dit je crois). En gros entendez qu’Ayla est grande, possède une chevelure blonde et bouclée, avec une tête de mannequin stéréotypé. Le profil d’héroïne américaine typique donc (ce n’est pas pour rien que j’ai précisé « auteur américaine »). Un peu agaçant surtout que l’histoire se situe dans le sud de l’Europe… j’en connais pas beaucoup des blonds d’origine dans cette région-là (et puis je crois qu’elle a les yeux bleux ou verts, le genre même pas marrons-comme-tout-le-monde)

En plus d’être la plus belle, Ayla est la plus intelligente, l’héroïne de l’histoire, la plus gentille, la plus futée, la plus douée, la plus inventive aussi… En gros, elle fait passer le reste de l’humanité (qui dans ce roman se contente des néandertaliens) , certes douée et avec une culture élaborée, des rites très précis et des connaissances particulièrement importantes, pour des idiots incapables de penser autrement que dans la tradition millénaire, d’innover et de s’adapter. En gros, les néandertaliens ont disparu à cause de leur organisation sociale inadaptée.

Quelle organisation ? Le chef qui commande, les autres qui obéissent. Un mauvais roman féministe et non-violent : en désignant arbitrairement une espèce disparue comme violente et machiste, avec le sous-entendu qu’Ayla est une femme courageuse qui arrivera à ne pas mourir (elle), l’auteur dessert son sujet. Ca marchait sans doute dans les années 80, j’avoue qu’en 2011, c’est très vieillot comme concept. Surtout qu’une des théories de la disparition des Néandertaliens est justement une extermination par les Cro-magnons que nous sommes (et qui sommes, comme on a toujours pu le constater, des pacifistes invétérés)

En fait, l’image des hommes cro-magnons dans ce roman n’est pas non plus flatteuse puisque les 2 ou 3 qui sont présentés, le sont à travers le récit d’un viol subit par 2 ou 3 femmes néandertaliennes. D’ailleurs, je me pose des questions sur le viol (qui est un des sujets vu qu’Ayla en subit pas mal en quelques semaines/mois, sans jamais s’y faire) : les femmes néandertaliennes sont soumises et acceptent toutes relations sexuelles parce que c’est comme ça. A croire qu’elles ne sentent rien, ni dans un sens, ni dans l’autre. Par contre Ayla, elle, n’apprécie guère et le sent très bien (ou plutôt très mal). Voilà un sujet que j’ai trouvé stéréotypé (comme tout le roman), comme si les femmes néandertaliennes étaient des animaux qui n’ont pas de plaisir à s’accoupler, quand les cro-magnonne auraient une conscience plus évidente de la sexualité (vis à vis du plaisir et de la reproduction).  Encore un argument féministe vieilli, qui assimile soumission à absence de conscience de soi.

C’est donc pétri de bons sentiments, avec une héroïne agaçante, tant elle est géniale en tout, et belle, et forte, et grande, et habile, et intelligente, et bonne poire, et survivor à la mode « Princesse Sara » (si, si, je vous jure). Pour le style, y’a pas de tare, ça se lit. Pour les descriptions, c’est précis, sans âme, et donc… chiant. Parce que la technique de taille Levallois, je la connais, c’est déjà pénible à lire quand t’es obligée de l’apprendre ! Alors quand on t’explique en long en large et en travers (4 ou 5 pages)  que Mlle Cro-magnon regarde le type faire (description du processus pour te sortir des lames en silex super parfaite d’un seul coup) et qu’elle sait quasiment tout de suite reproduire le geste, c’est trop.

J’hésitais à lire la suite au cas où ça s’améliorerait, et j’en ai parlé à ma tante (une autre qui, elle, n’a pas aimé les livres) qui m’a convaincue en m’affirmant, rieuse, que dans les bouquins suivants, Ayla allait domestiquer tous les animaux qu’elle croiserait. En entendant ça, j’ai lâché l’idée. Trop caricatural pour moi.

(Allez donc voir le film AO le dernier néandertalien, c’est le même genre à l’inverse : les méchants sont cro-magnons, les néandertaliens sont des gentils pacifiques exterminés… dans le genre c’est pas tellement mieux. Pourquoi a-t-on toujours une image si stéréotypée de la préhistoire ?)


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