De quel avent, témoignons nous ? S’agit-il d’une attente d’un « Godot » imaginaire
Ou d’une attente, vivante parce que portée par une expérience, elle –même signe de Vérité.
Ainsi, humainement, en est-il - de l’espérance pour une société plus juste, plus fraternelle – parce que portée par la vérité des « droits de l’homme »…
Cette réflexion s’est amorcée en moi, à la lecture d’un texte de Václav Havel, en 1992, qui partagea ces mots sur « l’attente », dans
un discours. Son propos concernait la dissidence dans l’espace
« Il y a plusieurs manières d'attendre.
« En attendant Godot », en tant qu'incarnation de la rédemption ou du salut universels, se situe à une extrémité de la large palette qui recouvre les différentes formes d'attente.
( …) dans l'espace communiste (…) les individus perdirent tout espoir de trouver une issue, la volonté d'agir et même le sentiment de pouvoir agir. Bref, ils perdirent l'espoir. Et pourtant ils ne perdirent pas le besoin d'espérance, ils ne pouvaient même pas le perdre car sans espoir la vie se vide de son sens. C'est pourquoi ils attendaient Godot. Faute de porter l'espérance en leur sein, ils l'attendaient de la part d'un vague salut venant de l'extérieur. Mais Godot — celui qui est attendu — ne vient jamais, simplement parce qu'il n'existe pas. Il n'est qu'un substitut d'espérance. Produit de notre impuissance, il n'est pas un espoir mais une illusion. Un bout de chiffon servant à rapiécer une âme déchirée, mais un chiffon lui-même percé de trous. L'espérance d'individus sans espoir.
A l'autre bout de la palette, une autre sorte d'attente : l'attente en tant que patience. Une attente animée par la croyance que résister en disant la vérité
est une question de principe, tout simplement parce qu'on doit le faire, sans calculer si demain ou jamais, cet engagement donnera ses fruits ou sera vain. Une attente forte de cette conviction
qu'il ne faut pas se soucier de savoir si, un jour, la vérité rebelle sera valorisée, si elle triomphera, ou si, au contraire, comme tant de fois déjà, elle sera étouffée. Redire la vérité a un
sens en soi, ne serait-ce que celui d'une brèche dans le règne du mensonge généralisé. Et aussi, mais en deuxième lieu seulement, une attente inspirée par la conviction que la graine semée
prendra ainsi racine et germera un jour. Nul ne sait quand. Un jour. Pour d'autres générations peut-être.