Décidément, il est réellement difficile, en ce début d'année, qui est aussi un début de campagne, de comprendre les enjeux économiques auxquels la société, notre société, se trouve confrontée : qu'est-ce qui réellement est en jeu, ce que l'on peut gagner ou perdre ?
Prenons par exemple la croissance. D'un côté, les médias nous serinent sur tous les tons que, de ce point de vue, 2012 est l'année de tous les dangers : consommation, investissement, commerce extérieur - les trois moteurs de la croissance devraient tourner au ralenti. Si la conjoncture paraît aussi "sombre", c'est bien parce qu'on compte sur la croissance pour résoudre la crise.
Mais d'un autre côté, que fait-on, comment agit-on ? Tous les États font de la "rigueur" le maître-mot de ces temps de crise. Certes, on comprend que la rigueur, à terme, allégera les dettes souveraines, qui sont une des causes de la crise. Mais tout axer sur la rigueur c'est, immanquablement, tuer la croissance. Alors ? Que veut-on ? La croissance, pour résoudre la crise - ou la rigueur, qui tue la croissance censée résoudre la crise ?
Mais, au fait, quel est le véritable enjeu de la croissance ? Tout miser sur la croissance, n'est-ce pas une sorte de fuite en avant ? Sans la croissance nous serions morts (notre modèle économique est mort). Mais où conduit la croissance pour la croissance ? Les nations industrielles se sont organisées autour de l'idéologie de la croissance indéfinie. Le but, on pourrait presque dire de la vie, c'est de consommer plus, d'amasser plus, d'élever le PIB, le PNB etc. tous produits monnayables, quantifiables - au détriment de toute équité. La croissance mais pas pour tous. Et inévitablement, à moyen terme, l'épuisement des ressources de notre planète, la pollution généralisée, la terre nourricière épuisée, les sources de vie taries.
En ce début de campagne électorale, à cent jours du premier tour des présidentielles, alors que nous allons être, nous sommes déjà submergés par un flot de paroles charriant pêle-mêle le vrai, le faux, des approximations sur tous les sujets, assaillis de "petites phrases" qui n'apportent rien au débat - c'est le bon moment [le "kairos" des grecs, le moment opportun] pour tenter de considérer les choses en elles-mêmes, pour ce qu'elles sont, hors des idées reçues et des propagandes.
La poursuite de la croissance n'est pas inéluctable. Le modèle nous fait aller dans le mur : cultivons, développons la conscience qu'il nous faut nous dés-installer de cette soit-disant "norme" non discutée, et justement la discuter, sortir de la pensée unique.
Et accompagnons cette prise de conscience d'une (re)prise de pouvoir sur nos propres existences. Incarnons une politique autre dans les actes de la vie quotidienne : achats, déplacements, nourriture etc. Des mini-décisions, concrètes, personnelles, qui accompagnent et développent cette prise de conscience qui sera le moteur du changement.
Je partage les convictions de Pierre Rabhi :
"Seul le changement individuel par l'éveil de la conscience nous sauvera. Il incombe à toute personne convaincue de cette nécessité de prendre librement en compte sa propre transformation.
Je pense ainsi qu'au-delà des catégories, des nationalismes, des idéologies, des clivages politiques et de tout ce qui fragmente notre réalité commune, le temps est venu de faire appel à l'insurrection et à la fédération des consciences pour mutualiser ce que l'humanité a de meilleur et éviter le pire".
[Manifeste pour la Terre et l'Humanisme]
Suivez-moi sur Twitter : @voilacestdit http://twitter.com/#!/voilacestdit