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Notte di Poghju

Publié le 14 janvier 2012 par Angèle Paoli


Willem de kooning, dark pond, 1948.
Willem de Kooning, Dark Pond, 1948
Enamel on composition board, 46 3/4 × 55 3/4”
Frederick R. Weisman Art Foundation, Los Angeles
© The Willem de Kooning Foundation/Artists Rights Society (ARS), New York
Source


NOTTE DI POGHJU

C’est très doux comme
main ça    mais c’est froid un peu
même à travers la peau du jean
c’est doux comme
cheveux    ces boucles et blondes
même si ― comme ne le dit pas le poème ―
Walter va au jardin & bande*

.

― le chien   se couche sur le dos
cuisses ouvertes langue haletante ―
qu’a-t-il à dire à faire comprendre
est-ce appel sans détour ?

.

la lumière lance
ses oiseaux-tulipes
         reflets de lampes
dans les vitrées
         fenêtres ouvertes
sur le ciel
         ouvertes ― non ― fermées

les grands panneaux aveugles
absorbent la moire

nuit entière dans le verre

.

le parfum d’herbes
glisse jusqu’aux narines
liseuses blotties dans les laines
et les coussins   moelleux
fenouil séché   couché
en larges branches
              et par brassées
dans le vaste vaisseau
d’osier corbeille du maquis
ombelles et graines

cueillies de main experte
par la signadora

.

le sanglier mijote
odeurs d’agrumes douces
les lumières de l’église
ont disparu
rien de Ginevra Bel Messer
n’arrive jusqu’ici
   ni son sourire ni sa plainte

― le chien gratte derrière la porte
derrière la vitre le chat sommeille ―

.

blême de silence d’absence
ouvert sur le plafond d’étoiles
le défunt dort
cercueil d’ébène

gardé par le Christ noir

Christ noir sauvé des eaux
veille dans son miracle
les vivants et les morts

la grotte est loin
qui accueillait sous sa voûte
déferlement de vagues
et vaisseaux naufragés

par quel édit muselée
sous la citadelle

.

les grandes baies de verre
absorbent le village
la nuit boit

― engloutie
l’encre des montagnes ―

plus rien n’existe

ni la rousseur des vignes
ni les chevelures boisées
ni l’effilochement des brumes

la plongée dans l’échancrure
des vallons se réfugie
dans la mémoire

la chaleur du dedans
retient les voix dans sa lumière

.

un point se déplace
dans le vide
zèbre le verre noir
qui avale la nuit

― le filancu** suspend
son élan silencieux ―

le cavalier de l’orage
rôde plein vent

sous les nuages

Angèle Paoli
D.R. Texte angèlepaoli


* Paul Blackburn, Journaux
** Milan royal des montagnes corses


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