Ariège | Chasse
Chronique de Philippe Serpault, suite à la visite de Nicolas Sarkozy, président de la République à Pamiers (Ariège) le 18 janvier 2012.
La question se pose avec une acuité particulière à chaque échéance électorale tant ces adeptes d’un loisir pas comme les autres savent faire preuve de constance dans leurs prises de position et leurs actions de lobbying. La chasse reste effectivement un loisir qui pourrait être comparable à la randonnée, au ski ou au golf, à cela près que ce loisir se pratique avec une arme qui, comme toute arme, est potentiellement dangereuse quel que soit son porteur.
Les trop fréquents accidents de chasse, causant souvent la mort d’un chasseur voire d’un randonneur ou d’un ramasseur de champignon, sont là pour l’attester. Il serait intéressant de convoquer un psychologue sur ce qui fait courir le chasseur, celui-ci se renferme dans sa bulle cynégétique au point de ne plus voir ce qui l’entoure, ou plutôt, ceux qui l’entourent.
Le président de la fédération de chasse de l’Ariège, Jean-Luc Fernandez, est un cas d’école. Celui-ci fut le représentant du mouvement CPNT (Chasse, Pêche, Nature et Traditions) dans ce département, il se présenta même aux élections cantonales à Saint-Girons (Ariège) en 2004 sous cette bannière et il obtint royalement 8,25% des voix.
Mais une faible audience électorale est largement compensée par un activisme forcené et un charisme à toute épreuve, ce qui lui vaut de prendre le contrôle de la fédération départementale de la chasse de l’Ariège et de durcir la position de celle-ci vis-à-vis de ce qu’il a nommé : « Le verdissement des politiques. » On ne compte plus les communiqués vengeurs contre le monde écologique et les menaces de rétorsion électorale vis-à-vis des élus locaux, lesquels se soumettent volontiers à ce petit jeu à défaut d’avoir une quelconque idée au sujet de l’environnement.
La visite du candidat-président Nicolas Sarkozy en Ariège le 17 janvier dernier est révélatrice de cette volonté d’isolement social du monde de la chasse. Alors que le président de la République délivre ses vœux au monde rural, des manifestants postés non loin de là sont violemment repoussés par les CRS, jusque-là, tout se passe comme prévu, le scénario est désormais devenu tristement banal. Sauf qu’après cette visite et les dégâts collatéraux qui en ont résulté, Jean-Luc Fernandez se dit satisfait, non pas de la charge des CRS, il n’est vraisemblablement pas au courant et d’ailleurs il n’en a cure, il est satisfait que le président ait publiquement contesté une décision de justice, ce qui est interdit par la loi.
La décision en question émane du Conseil d’État qui enjoint les préfets à interdire la chasse aux oiseaux d’eau au plus tard le 31 janvier, au lieu du 10 février. Ce qui devrait relever de l’anecdote pour un citoyen lambda empêtré dans des fins de mois de plus en plus difficiles, devient un problème crucial pour un chasseur.
La crise financière qui entraîne une régression sociale sans précédent ? La répression policière en marge d’une visite du plus haut représentant de l’État ? Tout ceci n’existe pas pour les chasseurs, accrochés à leurs fusils comme une huître à son rocher, le seul problème qui vaille est celui de la chasse. On objectera que tous les chasseurs ne sont pas à ce niveau, ce qui est tout à fait vrai ; il se trouve cependant que ce sont les représentants des chasseurs qui profèrent des positions aussi caricaturales. Il paraît que l’on a les représentants que l’on mérite…
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