Les défenseurs de l'ours dans les Pyrénées pressent le président Nicolas Sarkozy de montrer lors d'un déplacement dans la région mardi qu'il ne sacrifie pas la biodiversité aux intérêts des lobbies de l'agriculture, de l'industrie ou de la chasse.
Communiqué de presse Pays de l'Ours - ADET / FERUS
Monsieur le Président,
Il y a quelques semaines, nos associations ont déposé auprès des Préfets des Pyrénées-Atlantiques et de la Haute-Garonne deux demandes d'autorisation de lâcher d'ours dans les Pyrénées.
Vous avez décidé de sursoir au lâcher d'une ourse en Béarn l'an dernier et c'est pourquoi nous tenons aujourd'hui à attirer votre attention sur ce dossier qui est plus complexe qu'il n'y paraît.
Vous trouverez ci-joint les premières 5 000 signatures de soutien à nos demandes de lâcher, réunies en à peine trois semaines. Cela confirme l'intérêt des Français pour la sauvegarde de cette espèce et corrobore les études d'opinion et sondages réalisés sur la question depuis 20 ans :
- 2010 : TNS Sofres : 95% des Français estiment importante la préservation de la biodiversité ; 61% estiment que les réintroductions d'ours ont un impact positif sur la biodiversité ;
- 2008 : IFOP pour DREAL MP : 76% des Français (très) attachés au maintien d'une population d’ours dans les Pyrénées ;
- 2005 : IFOP pour Pays de l’Ours-Adet : 84% des habitants des Pyrénées centrales (très) attachés au maintien d’une population d’ours dans les Pyrénées ;
- 2004 : Arsh pour la République des Pyrénées (64) : 77% des habitants des Pyrénées-Atlantiques (très) favorables à la réintroduction d’ours ;
- 2003 : IFOP pour WWF & Pays de l’Ours-Adet : 72% des Français sont (très) favorables au lâcher d’ours supplémentaires ;
- 1992 : SOFRES pour Artus : 85 % des Français (très) attachés à l’existence de l’ours.
Nous n’ignorons pas l’opposition à la présence de l’ours, mais le " bruit " qu’elle fait ne doit pas occulter qu’elle reste minoritaire, y compris au sein des Pyrénées.
Nous tenons également à rappeler que la conservation de l’ours brun n’est pas un "délire d’écolos" inconscients des réalités, notamment économiques. Chez nos voisins espagnols ou italiens, des régions entières ont depuis des années misé sur la présence et l’image de l’ours pour leur développement économique. Quand nous entendons des élus italiens des Abruzzes affirmer que l’ours attire deux fois plus de touristes à Pescasseroli que la station de ski locale, nous mesurons à quel point nous négligeons en France le potentiel de développement que représente le patrimoine naturel.
La conservation de l’ours brun étant par ailleurs une obligation légale en regard de la directive européenne 92/43 dite " Habitats ", nous ne pouvons envisager que deux alternatives :
- soit l’ours n’est considéré et géré que comme une contrainte, et le conflit perdure, ce qui ne nous exonère pas de nos obligations ;
- soit on accepte l’idée qu’il constitue également un atout sous la forme d’un potentiel de développement et de valorisation inexploité, et nous avons une chance de concilier les enjeux économiques et écologiques, c'est-à-dire de mettre en œuvre un véritable développement durable.
Il y a là pour la France et les Pyrénées une opportunité à ne pas manquer, c’est notre combat, et nous ne laisserons personne le déformer en le caricaturant.
Monsieur le Président, en venant en Ariège le 17 janvier prochain présenter vos vœux au monde rural, où le soutien à l’ours est majoritaire, vous serez sans doute interpelé à ce sujet. Au nom des millions de Français qui sont favorables à la conservation de cette espèce emblématique, nous vous demandons de choisir la conciliation et le développement durable plutôt que le conflit et l’opposition des enjeux.
Nous pouvons, nous devons, le faire et en tant que chef de l’Etat, garant du respect des lois et des engagements internationaux de la France, vous avez à la fois le pouvoir et la responsabilité d’en décider et d’initier cette nouvelle dynamique.
Nous n’ignorons pas l’activisme des lobbies agro-industriels et politico-cynégétique, et leurs interventions auprès de vous pour s’opposer à la conservation des espèces potentiellement prédatrices.
S’ils sont sans doute dans leur rôle, nous ne pensons pas pour autant que les activités qu’ils représentent justifient d’un droit de véto sur les espèces protégées, patrimoine universel de l’Humanité et des générations futures.
Convaincus que vous choisirez l’intérêt général dans une vision ouverte sur l’avenir, sans céder à des intérêts catégoriels à court terme, nous vous prions de recevoir, Monsieur le Président, l’expression de nos sentiments respectueux.
François ARCANGELI
Président de Pays de l’Ours–Adet, conseiller régional Midi-Pyrénées, maire d’Arbas
Gilbert SIMON
Président de Ferus
Photo ours : Pascal Etienne