Je l'ai peut-être déjà dit ici : dans ce bunker de luxe qu'est la Grande Bibliothèque, la qualité du silence et de la concentration des centaines de lecteurs isolés ensemble - plutôt que réunis - des heures durant, est impressionnante. Pour un peu, le cliquetis discret des claviers évoquerait le grincement des plumes sur les parchemins dans les scriptoriums conventuels.
Hier matin je consultais Bibliothèques en détresse, un document émouvant écrit par Suzanne Briet en 1949 pour appuyer l'appel aux dons lancé par l'UNESCO en faveur du relèvement des bibliothèques et des collections détruites en Europe et en Asie. Elle y cite Maria Rainer Rilke écrivant dans ses Carnets :
“ Bibliothèque Nationale. Je suis assis et je lis un poète. Il y a beaucoup de gens dans la salle, mais on ne les sent pas. Ils sont dans les livres. Quelques fois ils bougent entre les feuillets... Ah ! qu'il fait bon être parmi les hommes qui lisent ! pourquoi ne sont-ils pas toujours ainsi ? ”