Petit compte-rendu d’entretien…
C’était dans un café parisien, Michaël commande modestement un Coca et commence à me raconter son parcours. Jeune diplômé de l’école Maryse Eloy et anciennement élève aux Beaux-Arts de Toulouse, je le félicite pour son CDI tout neuf.
Parce que j’ai été particulièrement intéressée par une de ses expérimentations dans le domaine de l’édition réalisée en commun avec une de ses camarades de promotion. Le sujet est simple : concevoir le programme du FRAC (Fond Régional d’Art Contemporain) de Basse Normandie. C’est en faisant équipe avec Sophie Drouard que Michaël met en place ce petit bijou de l’édition fait-main.
Je n’ai malheureusement pu rencontrer que Michaël, merci pour ses explications !
Un objet à manipuler
Tout l’intérêt est dans le ressenti. Il ne s’agit pas d’une simple mise en page avantageuse, le travail d’édition va loin et rien n’est anodin. Ce programme, on ne le consulte pas, on le découvre. Un travail à quatre de mains de qualité, qui devrait donner exemple à tous les apprentis graphistes !
À première vue, il s’agit d’un petit cahier tout à fait classique. Seule la typographie est jolie, le format n’est pas tellement original. Mais dès la première page, on sait qu’on n’est dans un autre monde. La vision est troublée par des nuances de gris qui se superposent jusqu’à perturber la lecture.
Diantre, comment accéder au programme ?
Le lecteur est alors invité à donner un peu de lui même. Il va devoir manipuler le plioir fourni pour découper les pages. Car chacune des pages est en réalité constituée d’une page soigneusement pliée. Découpez la tranche de la page à la manière d’une enveloppe pour enfin découvrir le contenu du programme.
Typographies choisies
Je laisse ici la parole à Michaël pour nous expliquer les choix typographiques qu’il a réalisé avec Sophie Drouard.
Renner et Rosewood
La Renner que nous avons utilisé est une version sans sérif de la Renner Antiqua, elle a un dessin propre, rond et s’inspire de la futura mais avec plus de finesse. Elle permet un contraste très fort avec la Rosewood, typo caractéristique des westerns et créée à la fin du 18e siècle. Elle fait partie des typos inutilisables, parce que trop marquée, trop voyante, beaucoup trop imposante. Mais c’est précisément ce qui nous a plus dans cette typo. C’est un défi, un challenge de l’utiliser. Et pour créer un contraste avec la Renner, la Rosewood remplit son rôle, elle ne mange pas la Renner visuellement, mais la souligne. Elle permet d’accrocher le regard, pour ensuite, inciter la lecture du texte courant.
“Graphiste” n’est pas la maîtrise d’un logiciel
Cet objet d’édition est une jolie démonstration de la nature du métier de graphiste. Être graphiste, ce n’est pas savoir se servir de Photoshop. Michaël souligne l’importance de la théorie en terme de gestion des couleurs, de choix typographiques, de formes… et surtout de la culture visuelle.
Parce que finalement ce qui fait la valeur ajoutée d’un objet d’édition ou encore d’une identité visuelle, c’est bien la richesse de la recherche qui a été menée pour aboutir à ce résultat. Et bien que le public ne ressente pas forcément le processus de travail, il voit bien la différence entre un travail de recherche créatif et un autre assez pauvre rempli de clichés.
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