Nous reprenons ici, la traduction du Prologue de l'ouvrage "Développement et vitalité de l'Eglise", du Père J. G. Arintero, si utile à méditer dans les conflits qui opposent au sein de l'Eglise, aujourd'hui comme hier, les anciens et les modernes - entre lesquels seule une voie moyenne d'équilibre et de "juste milieu" est sage [cf. article précédent].
*
* *
e défaut de don de science fait perdre le vrai sens de la réalité et jusqu’à la capacité même, dans la pratique, d’offrir la vérité sous tous ses aspects. Celui qui ne sait présenter que l’ancien sans rien de nouveau, ou l’inverse, quoi qu’il en pense, n’est pas versé dans les choses de Dieu, car s’il l’était, il tirerait avec sagesse de l’inépuisable trésor de la divine Tradition le nouveau de l’ancien (Matthieu 13, 52). Selon l’ordre des choses, il y a lieu de tirer d’abord le nouveau, qui est ce qui attire le plus, sans omettre ce sans lequel il n’est rien : «Nova et vetera». Il se garderait aussi d’enfermer le vin nouveau - celui des progrès légitimes - dans des outres si vieilles et si usées qu’elles le gâtent ou le gaspillent faute de pouvoir le contenir sans qu’il ne se corrompe (Luc 5, 37). « Le vin nouveau doit être mis dans de nouvelles outres » (Marc 2, 22).
Ainsi, il ne suffit pas qu’une chose soit ou paraisse nouvelle pour qu’on doive la tenir pour mauvaise ou suspecte ; toutes les grandes rénovations, les inventions ou les institutions par lesquelles Dieu est venu au secours de son Eglise, ont commencé comme des nouveautés, et, de fait, elles furent dénoncées comme telles par les paresseux et les pusillanimes (1). Il est donc nécessaire de les examiner et de les éprouver pour en retenir ce qui est bon (1 Thess. 5, 21). Ce bon et ce nouveau dont nous avons tant besoin - au regard des conditions nouvelles de la vie - les coeurs assoiffés de justice les sentent ou les pressentent bien avant les intelligences curieuses et subtiles qui ne veulent rien voir qu’à force de syllogismes ou, ce qui est pire, selon de pauvres visées humaines, toujours si disproportionnées et si éloignées des pensées divines (2).
(à suivre)
_______________ (1) Tel fut le cas de la réforme réalisée par sainte Thérèse. « Elle est nouvelle », s’exclamait le P. Bañez - en la défendant contre ceux, nombreux, qui tentaient de la détruire comme une innovation (cf. Chronique carmélitaine, L. I, c. 45), « elle est nouvelle, je l’avoue ; et comme telle elle a causé les effets que produit ordinairement la nouveauté chez les médiocres. Ce n’est pas une raison pour qu’il en soit de même chez les gens graves et prudents, car toute nouveauté n’est pas répréhensible. Est-ce qu’autrement les autres ordres religieux auraient été jamais fondés ? Les réformes que nous voyons chaque jour, et celles qu’ont connues nos prédécesseurs ne sont-elles pas survenues lorsqu’on les attendaient le moins ? L’Eglise chrétienne n’a-t-elle pas été elle-même de nouveau réformée ? Assurément, jamais rien ne pourrait être augmenté en elle, si excellent que ce soit, si nous succombions tous à la peur pusillanime de la nouveauté. Ce qui est introduit pour la plus grande gloire de Dieu et la réforme de nos moeurs ne doit pas être appelé nouveauté ou invention, mais rénovation de la vertu, toujours ancienne. Les arbres sont-ils nouveaux parce qu’ils se revêtent au printemps, et le soleil, qui naît chaque jour ? Pourquoi serait-il alors répréhensible aux ordres religieux de se renouveler ? Qu'y a-t-il de plus répréhensible pour eux, de perdre leur antique splendeur ou de la recouvrer ? »(2) Cf. Rom. 8, 5-8 ; 1 Cor. 1, 18-25 ; 2, 6-16 ; 3, 18-20 ; C’est pourquoi la Doctrine de Apôtres dit ceci : « Tout prophète qui parle en esprit, ne le mettez pas à l'épreuve et ne le jugez pas, car tout péché sera remis, mais ce péché-là ne sera pas remis » (Cf. Didaché, XI, 3). Cf. Mt 12, 32 ; Lc 12, 10.