Le carnaval, héritage des Saturnales, des Bacchanales, des Lupercales des Anciens, de la fête des Fous ou de l'Âne, a
toujours été jugé scandaleux de par ses travestissements et excès de tous genres, mais il n´en a pas toujours été ainsi dans le monde antique. Ce n´est que sa dégénération qui obtient comme
résultat d´être interdit maintes fois dans l´Histoire.
Le carnaval est une tradition archaïque liée aux cycles saisonniers et agricoles. On fait dériver le mot carnaval de carne
(pour caro, chair) et levare (lever, enlever, ôter) pour se dédommager de l'abstinence imposée pendant le Carême.
Les coutumes sociales extravagantes du carnaval rappellent les célébrations de l’équinoxe du printemps, dont les Sacaea
babyloniennes (akitu assyrien) et le Norouz iranien : on y célèbre la victoire du nouvel an sur l’ancien.
L’Akitu était à l’origine la fête du printemps sumérienne consacrée au couple Inanna/Ishtar (déesse de l’Amour et de la
guerre, identifiée à la planète Vénus, Étoile du matin) et Dumuzi (dieu-pasteur et dieu de la fertilité, berger-roi – le cinquième roi légendaire antédiluvien qui régna avant -2 900 sur
Bad-Tibira uni à Inanna) dans un très ancien rite de mariage sacré.
Dans la Descente d'Inanna aux Enfers, il est choisi par sa parèdre (« qui est assis à côté de : divinité souvent inférieure
en prérogative, habituellement associée dans le culte à un dieu ou une déesse plus influent, ici Inanna) pour la remplacer aux Enfers. Il est donc mort (ce qui a donné naissance à des textes de
lamentation), et est alors considéré comme une divinité infernale. Il se fait cependant remplacer une moitié de l'année par sa sœur Geshtinanna. Ainsi le passage des saisons trouvait une
explication dans la vie des dieux, le retour de Dumuzi sur terre étant vu comme le début du renouveau de la nature. Cela est notamment marqué dans les rituels mésopotamiens par le Mariage sacré
(Hiérogamie, cf. Institutionnalisation et encadrement de la masculinité dans la reproduction), dans lequel les rois
sumériens interprétant Dumuzi s'unissaient rituellement à la déesse Inanna, pour marquer le retour du printemps.
Le cours de la nature dépend donc du roi (« Souveraineté et Fécondité sont des puissances solidaires », dit Dumézil), son
affaiblissement et la mort naturelle qui s'ensuivraient compromettraient la vigueur de tous. On tue donc le roi quand il commence à décliner parce qu'il ne faut pas que sa maladie se communique à
son peuple. D'autre part, on renouvellera périodiquement sa vigueur (par exemple au moment de l'année où tout est censé repartir à zéro) en le supposant mort, puis ressuscité. Pendant son
éclipse, un autre prendra sa place c'est ainsi que Phaéton se substitue au Soleil et périra aussitôt, laissant le roi recommencer un nouveau règne avec l'appoint des
forces libérées par la mort de la jeune victime.
Chaque hiver, on pensait que Marduk était obligé de vaincre les monstres du Chaos pour renouveler le monde. L'humain devait
aider son dieu créateur dans ce combat et pour cela les Mésopotamiens tenaient un festival du nouvel an, appelé Zagmuk (en sumérien et Akitu en akkadien, signifiant « commencement de l'année »),
durant les douze premiers jours du mois de nisan (« premiers fruits » : avril).
La fête célébrait la victoire annuelle du Soleil et commémorait aussi le premier Zagmuk, celui qui vit la première victoire
de Marduk sur les divinités chaotiques. Prières et incantations, purifications et offrandes rythmaient la cérémonie qui se déroulait en plusieurs parties. Les cérémonies commençaient le premier
jour de nisan coïncidant avec l'équinoxe du printemps.
Le rituel des Sacaea babyloniennes est connu par des auteurs grecs. Dans le IVe discours de Dion Chrys. sur la royauté (ch.
69), Diogène raconte l'histoire à Alexandre pour lui montrer la vanité des attributs royaux.
Comme à Rome, les esclaves y devenaient les maîtres et, dans chaque maison, un esclave habillé en roi et portant le titre
de Zoganes (roi des valets) exerçait un éphémère pouvoir. En outre, il existait un roi des Sacaea, dont Dion Chrysostome rapporte : « Ils prennent un des prisonniers condamnés à mort et le font
asseoir sur le trône royal ; ils le revêtent des habits royaux et le laissent boire, s’amuser et user des concubines du roi pendant plusieurs jours. Mais ensuite ils le dépouillent de ses
vêtements, le flagellent et le mettent en croix. »
Etant donné la quantité d’informations mythologiques/historiques/astronomiques que nous devons synthétiser pour
donner une vue précise de tous les tenants et aboutissants de ces célébrations, l’article complet sera mis en ligne à l’occasion de l’équinoxe de printemps (21 mars).