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J'ai aimé voir:«Nocturne au parc royal de Bruxelles» de William Degouve de Nuncques. (détail)

Publié le 28 février 2012 par Lauravanelcoytte

93fa75d45a.jpgÀ Orsay, la magie fragile des pastels réalistes ou symbolistes

«Le mystère et l'éclat» au Musée d'Orsay est l'outsider des expositions de l'automne : réussite totale, accrochage harmonieux et intelligent, œuvres superbes, fragiles et lumineuses, signées Édouard Manet, Edgar Degas, Auguste Rodin ou de ce génie trop méconnu qu'était William Degouve de Nuncques (1867-1935).

Son Nocturne au Parc royal de Bruxelles, une abstraction de 1897 scandée comme un poème d'Émile Verhaeren, est une mélodie envoûtante.

Dans chaque salle, Philippe ­Saunier, conservateur au Musée d'Orsay, a su restituer, du réalisme au symbolisme, la force de ce médium alors très à la mode, le pastel.

C'est aussi la preuve que pour réussir une exposition, on peut se passer de prêts onéreux, de valeurs d'assurances mirobolantes et de publicité tapageuse : ces pastels d'Orsay, dont bon nombre viennent d'être restaurés, craignent la lumière et les chocs des convoiements, ils méritent d'être à l'honneur aux cimaises… du Musée d'Orsay !

«Le pastel craint la lumière prolongée. Aussi bien il la désire, ne serait-ce que pour activer la délicieuse alchimie dont il résulte» , écrit joliment Guy Cogeval le président de l'institution, dans la préface du catalogue.

CE TABLEAU FAIT PARTIE DES


dix tableaux
qu'il faut avoir vus

Valérie Duponchelle, Adrien Goetz, Eric Bietry Rivierre Mis à jour le 10/11/2008 à 10:35 | publié le 05/11/2008 à 10:34
«Maison de Giverny vue du jardin aux roses» de Monet exposé au Musée Marmottan.

«Maison de Giverny vue du jardin aux roses» de Monet exposé au Musée Marmottan. Crédits photo : The Bridgeman Art Library  

Parmi les nombreuses expositions de l'automne qui se déroulent à Paris et en province, «Le Figaro» propose un choix commenté des dix œuvres incontournables exposées dans les musées. De Mantegna au Louvre à Hans Arp à Strasbourg, en passant par Picasso au Grand Palais.

Rien ne remplace le face-à-face avec un tableau. Contempler un chef-d'œuvre, c'est prendre le temps d'en lire sa composition. C'est en voir les détails, se surprendre à en trouver sans cesse de nouveaux, savourer le relief, la pâte, le geste, les couleurs. Méditer sur le ou les sens donnés, consciemment ou pas, par l'artiste… Le public ne s'y trompe pas qui, à l'heure d'Internet et de la reproduction quasi gratuite, visite, sans cesse plus nombreux, aussi bien les collections permanentes des musées que leurs expositions temporaires. Mais comment s'orienter ? Impossible de tout voir, de tout absorber. Sur les cimaises des grandes institutions parisiennes autant que sur celles des centres de la province qui rivalisent souvent de travail et d'imagination, l'offre est riche cet automne.

Le Figaro vous propose donc un choix de très belles œuvres à ne rater sous aucun prétexte. Comme, par exemple, ce Monet du Musée Marmottan*. Comprendre de l'intérieur la vision de Claude Monet (1840-1926), c'est en effet ce que permet l'actuelle exposition organisée dans ce musée parisien. Une exposition expérimentale où, grâce notamment aux études de l'académicien Yves Pouliquen, on comprend pourquoi Cézanne disait du père de l'impressionnisme : « Monet n'est qu'un œil, mais quel œil !»

Parmi les plus belles toiles de sa dernière période, cette Maison de Giverny vue du jardin aux roses, datant de 1922-1924, perdue dans un flot de couleurs mauves, bleues et rouges. Elle apparaît à la fois comme un témoignage de la lutte du peintre contre la maladie oculaire qui le ronge et comme un des chefs-d'œuvre dont sortira l'art du XXe siècle, jusqu'à ­Jackson Pollock. Et si le Monet du XXe siècle était finalement plus intéressant que le Monet impressionniste, son soleil couchant meilleur que le chef-d'œuvre qui fait la gloire de ce musée, Impression, soleil levant ?

» Au Musée Marmottan- Claude Monet, jusqu'au 15 février.

La Mort de la Vierge d'Andrea Mantegna (détail)

La Mort de la Vierge d'Andrea Mantegna (détail)

• Le tableau coupé en deux d'Andrea Mantegna

Triste, cette Mort de la Vierge venue du Musée du Prado à Madrid ? Andrea Mantegna (1431-1506) n'a-t-il laissé aucun espoir à cette pauvre femme gisant sur un dur catafalque entre saint Jean l'Évangéliste et les premiers fidèles affligés ?

Pas plus le rameau ou les cierges allumés tenus par ces derniers que la vue pourtant belle du pont ­San Giorgio, des lacs et des marais formés par la rivière Mincio à ­Mantoue ne suffisent à apaiser le spectateur. La rigoureuse perspective centrale soulignée par le sol en damier et doublée par le paysage d'arrière-plan ne débouche-t-elle donc au loin que sur une minuscule rive à églises ? Déprimant point de fuite.

Alors, serait-ce bien une mort ­définitive et non, comme le genre le développe d'habitude, une­ ­«Dormition» ? Où se trouvent donc l'Assomption et le Couronnement de la Vierge ?

Mais c'est que le tableau a été coupé lors d'un déménagement. Il faut imaginer qu'à l'origine ses arcades se poursuivaient avec, en leur centre, figurant en gloire, Le Christ avec l'âme de la Vierge, petit bois de 27,5 × 17,5 cm, aujourd'hui propriété de la Pinacothèque de ­Ferrare. L'ensemble, peint vers 1460-1464, ornait une salle - probablement la chapelle - du château de Francesco Gonzaga, le principal mécène du peintre. Ce pieux personnage y trouvait, au contraire de nous, la certitude de l'au-delà et de la rémission des péchés du monde.

» Au Louvre , jusqu'au 5 janvier.

Antoon Van Dyck, «Portrait d'homme» (détail)

Antoon Van Dyck, «Portrait d'homme» (détail)

• Van Dyck ou l'impossible impassibilité de l'être

Figé ? Immobile ? Il s'agit bien sûr d'un portrait peint. Nous ne sommes ni devant un miroir, ni au cinéma. Et pourtant. Sous le pinceau d'Antoon Van Dyck (1599-1641), Virginio Cesarini semble tellement vivant. Dans la toile prêtée par le Musée de l'Ermitage de Saint-Pétersbourg au Musée ­Jacquemart-André, il est représenté dans une curieuse position, à demi retourné sur son siège. Comme brusquement interpellé par un mystérieux interlocuteur placé en dehors du cadre.

Qui appelle donc ce jeune aristocrate romain en costume de jésuite ? La Mort sans doute. Van Dyck a représenté Virginio Cesarini avec un corps frêle et des joues maigres. Membre de l'élite savante de son temps, ami et éditeur de Galilée, très lié au futur pape Urbain VIII, cette belle tête qui allie la foi, les arts et la science était promise à un brillant avenir.

Malheureusement poitrinaire, Virginio Cesarini s'éteignit à 28 ans. Van Dyck nous le rend dans sa fragilité et sa fugacité, comme épuisé par les veilles d'étude et miné déjà par la maladie. Ce faisant, il s'impose comme un grand peintre capteur de moments transitoires. Une révolution dans l'art du ­portrait guetté depuis toujours par le hiératisme. Du malheureux ­Virginio Cesarini subsiste aussi à Rome un buste funéraire attribué à Du Quesnoy ou au Bernin. Deux immenses artistes eux aussi.

» Au Musée Jacquemart-André, Paris, jusqu'au 25 janvier.

La «Maja desnuda» de Goya (détail)

La «Maja desnuda» de Goya (détail)

• La «Maja desnuda» : Goya avant Picasso

«Ce que je cherche, disait Picasso, c'est le mot qui dise “nu” sur ma toile, d'un seul coup, sans histoires !» Comme on peut le constater dans la confrontation exceptionnelle intitulée «Picasso et les maîtres», visible au Grand Palais, le nu fut d'abord celui d'un mythe ou une histoire. Voir par exemple Vénus se divertissant avec l'Amour et la Musique, de Titien. Composition que Picasso trouvait «idiote» avant d'ajouter «et pourtant, c'est magnifique !».

Le Minotaure allait réussir à trouver ce nu brut, simplement fait de seins, de pieds, de mains, d'une tête et d'un ventre. Un nu direct, objectif, à mi-chemin entre l'abstraction et le canon idéal, ni divin ni démoniaque, tout à la fois sensuel et indifférent. Mais il reconnaissait qu'avant lui Francisco Goya (1746-1828) y était parvenu le premier. Sa Maja desnuda à l'ineffable sourire qu'on ne peut même pas tout à fait qualifier de tentateur, peinte toute de face entre 1797 et 1800, les parties érogènes traitées au même plan que les autres, et qui est pour la première fois visible en France grâce à la générosité du Musée du Prado de Madrid, s'impose comme le premier nu de cette peinture ibérique dont Picasso est l'héritier. Notons pour la petite histoire que la Maja vestida, l'exact équivalent vêtu de la Maja desnuda, peinte au même moment, est restée au Prado. Et que seul le nu avait été dénoncé comme «obscène», en 1815, par l'Inquisition. Indifférence ?

» Au Grand Palais, jusqu'au 2 février.

Hans Jean Arp : «Composition» (détail)

Hans Jean Arp : «Composition» (détail)

Marcel Duchamp avait raison : à Strasbourg, «Art is Arp»

«J'ai quatre natures. J'ai deux choses. J'ai cinq sens.» Ainsi se définit en 1931 Hans (Jean) Arp, né en 1887, à Strasbourg, d'un père allemand fabricant de cigares et d'une mère alsacienne. «La cathédrale de Strasbourg est une hirondelle», répétera le fondateur du dadaïsme. La statuaire sacrée paraît lointaine dans ses reliefs peints des années 1916-1917 et dans ses sculptures galets d'après-guerre, Cerveau de rocher, Concrétion humaine, Larme de galaxie. Entrer dans son monde réservé, cérébral et sensuel, c'est pourtant voir l'esprit en marche et la poésie d'un artiste se délier en une fugue éternelle.

Il faut une dévotion pleine de tact et de sensibilité pour réunir 180 œuvres et leur donner à cha­cune la valeur d'un jour, le poids d'une idée, la mesure d'un geste. Pédagogue dans l'âme, l'historienne de l'art Isabelle Ewig a composé là un cours magistral qui donne envie de tout voir, de tout lire, de tout revoir.

Peint à la veille de la guerre, ­Composition, Crucifié, Crucifixion (bois peint, 1914) est le «premier tableau essentiel» d'Arp, qui a détruit la plupart de ses œuvres de jeunesse. Comme chez les cubistes, il ne s'agit plus d'imiter la nature à la perfection, mais de renverser les valeurs, de «déshabiller les corps», de les «désincarner» pour en extraire les «formes absolues».

» Au Musée d'art moderne et contemporain de Strasbourg. Jusqu'au 15 février.

Raoul Dufy, «Barques à Martigues» (détail)

Raoul Dufy, «Barques à Martigues» (détail)

• Quand Raoul Dufy, écarlate, sort de la cage aux fauves

«Quand j'aurai terminé quelques toiles de la colline de la Garde et des voiliers ancrés au pied, tableau qui encadre la fenêtre, j'irai dans ma petite campagne (…) pleine de pinèdes et de traverses charmantes, où les maisons sont roses avec des volets verts», écrit en 1907 Raoul Dufy (Le Havre, 1877, Forcalquier, 1953), heureux à Marseille et à ­Martigues. Éternel outsider de l'art ?

En 1905, Dufy flirte avec le fauvisme dominé par Derain et Matisse, puis fait un passage éclair (une saison en 1908) au sein du cubisme. «Sans s'encombrer de théorie, souligne l'historienne de l'art Brigitte Léal, Dufy fait la synthèse entre fauvisme et cubisme, entre couleur et dessin : de pauvres barques échouées dans le port de Martigues lui suffisent pour lancer une suite de variations sur le motif, comme Cézanne pour qui peindre d'après nature, c'est enregistrer des sensations colorées.»

Perspective relevée, point de vue en surplomb, cadrage rapproché serré, espace construit par des tons saturés et complémentaires, aplats liquides d'émeraudes et de vermillons, aucune figure… La petite série Les Barques aux Mar­tigues marque une «rupture avec les gentilles peintures normandes de la période fauve». En dépôt au ­Courtauld Institute of Art, ce tableau luxuriant comme un ­Gauguin nous vient de Londres.

» Au Musée d'art moderne de la Ville de Paris, jusqu'au 11 janvier

Auguste Herbin, Vendredi II (détail)

Auguste Herbin, Vendredi II (détail)

• Auguste Herbin ou la ligne pure

C'est l'affaire dont tout le milieu de l'art a parlé. La galerie Lahumière présente une exposition capitale alors que les organisateurs de la récente Foire internationale d'art contemporain à Paris n'ont pas retenu, cette année, cette maison au nombre des exposants.

En montrant ensemble une trentaine d'œuvres d'Auguste Herbin (1882-1960) et de son cercle, Jean Dewasne, Aurélie Nemours ou Véra Molnar, datant des années 1950, la galerie Lahumière restitue ni plus ni moins qu'un moment important de l'histoire de l'art. Il n'y a qu'à découvrir, par exemple, Vendredi 2, peint en 1951 (collection de la galerie), pour s'en convaincre.

Dans la préface du catalogue, ­Serge Lemoine, qui créa la chaire de l'art du XXe siècle à l'École du Louvre et dirigea le Musée d'Orsay, écrit que la dernière période d'Auguste Herbin, qui avait commencé dans le goût impressionniste et avait été cubiste, «constitue l'accomplissement de son art».

Ces tableaux géométriques ont eu un immense retentissement. Toujours selon Serge Lemoine, ­Auguste Herbin, au Salon des réalités nouvelles en 1949, rayonna autant que Jean Auguste Dominique Ingres parmi ses élèves. De fait, Herbin, c'est la pureté absolue de la ligne, cultivée comme une subtile et sublime ascèse.

» Galerie Lahumière, 17, rue du Parc-Royal, Paris. Jusqu'au 21 novembre.

«La Vie du Christ» (cycle complet) d'Emil Nolde (détail)

«La Vie du Christ» (cycle complet) d'Emil Nolde (détail)

• La religiosité rustique d'Emil Nolde

Sa foi, l'Allemand Emil Nolde (1867-1956) l'avait ancrée dans les sables et la glaise du Schleswig, son plat pays à cheval sur la frontière du Danemark. Son christianisme, comme on peut le comprendre actuellement à Paris, et bientôt à Montpellier, est ainsi indissociable des esprits archaïques germains et du merveilleux de la nature.

Nietzschéen ? Artiste simplement instinctif ? Vaste débat. Quoi qu'il en soit, la religiosité explose dans sa peinture colorée, dissonante, hardie, dans ses aplats gras et francs, et ses visages à la fois naïfs et raffinés, caractéristiques de l'expressionnisme allemand que Hitler voua aux gémonies. Le grand polyptyque en neuf parties La Vie du Christ, terminé en 1912, est, en ce sens, le chef-d'œuvre de Nolde. Il ne résulte d'aucune commande mais de la seule nécessité intérieure. En dépit de cela, il fut refusé à l'Exposition internationale d'art religieux de Bruxelles ainsi qu'au Sonderbund de Cologne. Il faudra attendre 1921 pour qu'enfin il entre dans une église (Sainte-Catherine de Lübeck). Las : ce sera l'occasion d'un nouveau scandale. Nolde, digne héritier des peintres de retables gothiques allemands, sera qualifié par un critique de «grand malade». En 1937, son polyptyque sera le clou de la tristement fameuse exposition d'«art dégénéré».

» Au Grand Palais, jusqu'au 19 janvier puis au Musée Fabre de Montpellier, du 7 février au 24 mai.

Le futurisme à Paris, avant-garde plus explosive que prévue

«Vos yeux habitués à la pénombre s'ouvriront bientôt à de plus radieuses visions de la clarté […] Nos tableaux, auprès de ceux des musées, resplendiront comme un jour aveuglant opposé à une nuit ténébreuse.» Carlo Dalmazzo ­Carrà signe, le 11 avril 1910, à Milan, le Manifeste futuriste, comme ses compatriotes Umberto Boccioni et Luigi Russolo, le Romain Giacomo Balla et le Toscan de Paris Gino Severini.

Le postulat futuriste est de faire table rase du passé, jouer de la simultanéité spatio-temporelle qui combine ce dont on se souvient et ce que l'on voit. «Primitif à la sensibilité renouvelée» , comme il le dit lui-même, Carrà évoque dans ces Nageuses (Nuotatrici, 1910-1912) la disparition de corps emportés dans un courant tumultueux. Lors des soirées futuristes, Marinetti a souvent lu le poème En nageant dans le Tibre de Libero Altomare.

Composition en diagonale pour traduire l'énergie, touche nerveuse pour le mouvement de l'eau, ce tableau célèbre la vitesse, vertu futuriste, mais pas la machine ni le monde urbain. Comme d'autres futuristes, Marinetti le premier, Carlo Carrà sera séduit par le fascisme de Mussolini. L'exposition ne va pas jusque-là et préfère étudier comment cet Italien a géométrisé les corps selon la leçon cubiste. Le parti pris en a choqué plus d'un.

» Au Centre Pompidou,jusqu'au 26 janvier

http://www.lefigaro.fr/culture/2008/11/05/03004-20081105A...


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