La culpabilité me bouffe de l’intérieur. Je crois que cela a toujours été le cas, d’aussi loin que je me souvienne, pourtant je n’ai mis de mots dessus qu’assez récemment.
Par exemple, ma relation avec les professeurs et les études est encore aujourd’hui dominée par la culpabilité. Quand je ne fais pas un travail (rare) ou que je le « bâcle » (ce qui, pour moi, veut le plus souvent dire ne pas le fignoler outre mesure), je me sens coupable. Quand je suis absente, je me sens coupable. Quand je m’y prends « au dernier moment » pour réviser, je me sens coupable.
Bon, j’ai progressé là-dessus, surtout depuis que j’ai pris conscience du problème. Mais il n’empêche que c’est le naturiste qui, comme tout un chacun le sait, a une fâcheuse tendance à revenir au bungalow[1].
En y réfléchissant, je constate que cela remonte à mes relations affectives avec l’école et les enseignants en primaire puis au collège. Je pense que les enseignants sont la partie visible de l’iceberg et que mon problème est plus profond que ça. C’est peut-être de la psychologie de comptoir (et après tout c’est mon droit de la pratiquer sur moi plutôt que de l’infliger aux autres qui n’ont rien demandé), mais je pense que cela pourrait être une réaction à mon sentiment d’inadaptation au système scolaire. Ce n’est pas vraiment de devoirs et d’absences qu’il s’agit mais plutôt du moule dans lequel je n’ai jamais pu rentrer – ce qui expliquerait que ce ressenti ressorte aussi facilement dès que je suis plongée dans une ambiance scolaire, malgré mes progrès sur d’autres fronts, car je reste fondamentalement inadaptée !
Et même si mes conceptions intellectuelles ont évolué (ce n’est pas moi la « bête bizarre » mais le système qui ne convient qu’aux gens « dans la moyenne », qui n’est fait ni pour les introvertis ni pour les perfectionnistes ni pour les gens plus avides de connaissances que la moyenne – ni d’ailleurs pour tout un tas d’autres types de personnalités…), ma réaction conditionnée reste la même.
La culpabilité s’est aussi répandue dans d’autres aspects de ma vie. Comme la santé. Je crois qu’elle y est entrée par le biais de l’école. En effet, comme je l’ai rabâché sur ce blog à maintes reprises, j’ai été absente pendant un mois en 4ème, prélude à mes problèmes de thyroïde qui n’ont été diagnostiqués que bien plus tard. Les réactions de mes camarades mais aussi de mes professeurs n’ont pas toujours été des plus intelligentes, ce qui n’était que la cerise sur le gâteau de l’incommensurable angoisse que mon retour en classe m’inspirait.
Un mois de maladie, c’est un mois enfermé chez soi et on devient vite agoraphobe à ce rythme là. Alors quand en plus on est ultra timide et que l’on ne rêve que de se fondre dans la masse… Ajoutez à cela la fatigue due à la convalescence et aux traitements, et l’incapacité à répondre aux questions (ben oui, les gens ils voulaient un joli diagnostic avec un nom compliqué de maladie grave pour pouvoir m’octroyer leur pitié…) et de manière plus générale, à me défendre.
Et ensuite, avec la découverte de mes problèmes de thyroïde, une autre culpabilité s’ajoute : à chaque fois que je tombe malade, je risque de les aggraver. Dur à gérer à 15 ans. Et pas facile encore maintenant. Mettre ma vie sur « pause » dès que j’ai mal à la gorge, c’est faisable. Énervant, mais faisable. Rester au chaud, prendre mon homéopathie… une routine bien huilée.
Mais quand malgré tout ça je n’arrive pas à tuer le rhume dans l’œuf, la culpabilité débarque. N’aurais-je pas dû réagir plus tôt ? Mieux me couvrir, éviter les courants d’air ? N’aurais-je pas dû m’éloigner de ce grippé dans le métro ? N’étais-je pas distraite ? Cela va-t-il avoir une influence sur ma thyroïde ? Et à cette dernière question, l’on a de réponses que lors des prochaines analyses de sang, et encore rien de certain – tant de facteurs peuvent entrer en jeu…
Là où le bât blesse et où le serpent se mort la queue, c’est que la culpabilité, qui se transforme en angoisse et en stress, non seulement n’est pas très constructive, mais peut avoir des conséquences sur ma santé. Le rôle du stress et de l’état d’esprit en général est en effet capital dans les maladies auto-immunes (de par leur lien avec le système immunitaire), et particulièrement pour la thyroïde – qui est une glande endocrine, c’est-à-dire qu’elle sécrète des hormones. Hormones, stress… Vous voyez le rapport ?
Gérer cette culpabilité inopportune n’est donc pas simplement un enjeu de bien-être au long cours, mais bien un objectif important dans ma lutte pour protéger ma petite thyroïde. Je fais de mon mieux pour la canaliser, et déjà simplement la repérer. Ce n’est pas toujours facile au quotidien, mais je l’aurai, un jour, je l’aurai !
[1] Rendons à César ce qui est à César, ce brillant jeu de mot n’est pas de moi mais du célèbre Chat de Geluck.