Les préparatifs apocalyptiques terminés. Concentrons-nous sur la Foire du Livre de Bruxelles.
A bout de nerfs, j'arrivais à la foire du livre de Bruxelles sans aucune marchandise. Fkitkov avait beau m'avancer ses nouvelles trouvailles. Cela ne me rassurait pas du tout. Que du contraire. A notre débarquement à Bruxelles, il courut dans un café internet pour choper et photocopier les textes, ici présents sur le blog. Il se frottait les mains, avançant avec entrain notre future réussite. Des centaines de photocopies furent reliées avec de simples agrafes. Comme un syllabus, sans numérotation, sans pages de garde, sans couverture. Une qualité nazistique qui ferait passer un cahier de brouillon pour un cahier haut-de-gamme flambant neuf . Je me tapais la tête contre le mur. Il était impossible qu'une personne ne s'intéresse, ne pose même un instant les yeux sur ma production. Le réalisme était de mise. Avec du matériel aussi insignifiant, de si mauvaise qualité, on ne pouvait espérer atteindre un public de lecteurs habitués voir même de débutants. Il s'en foutait totalement, il n'avait aucune connaissance du marché. Au fond de moi, je pense que les 90 000 euros de dettes le faisait stresser comme pas possible. Il voulait combattre jusqu'au bout le sort, la fatalité funeste qui s’annonçait. Personnellement, après mon séjour dantesque dans l’hôpital psychiatrique (dont je ne tarderai pas à vous narrer la suite), je ne voyais pas ce qui aurait pu m'arriver de pire. Je l'aidais non-nonchalamment sans rien espérer. Mon ventre était légèrement noué, je dois l'avouer. Les réminiscences de ma première et lamentable expérience en public, sans doutes.
Le boulot finit, nous nous dirigeâmes vers la Foire du Livre. Flitkov ne manqua pas de noter l'état délabré de nos routes.
- CA ETRE PIRE QUE CHEZ NOUS FAUT LE FAIRE.
Absent, je ne lui donnais aucune réponse. Mon retour en Belgique me donna un coup de plus sur la tête. Que la ville était blême. Qu'il faisait grisâtre. Comme les gens avaient l'air triste. La même moue. Partout dans la ville. Était-ce cela la civilisation du 21ème siècle. Des gens qui courent, courent derrière je ne sais quoi, qui courent à en crever derrière l'oseille qu'on veut bien leur donner. Ils grimacent, suintent la peur, la défaite, le mal de vivre. Je me posais quelques questions existentielles. Suis-je aussi blafard ? Sans vie ? Flitkov me mit une claque à la joue gauche. Je ne sursautai pas. Je réagis à peine.
- CA Y ETRE ARRIVE. PRENDRE LE MATOS LES AFFICHES ET ON RENTRE. BUSINESS BUSINESS.
- Pourrais-tu un peu baisser le ton ? Je suis stressé. Je n'ai pas envie d'aller à ta foire. Si j'avais produit une nouvelle ou un roman, cela me gênerait pas. Mais ici, nous n'avons rien. Strictement rien. Que de la merde en boîte inconsommable même pour un putain de chat privé de gout et d'odorat.
- TOI AVOIR EU LE TEMPS ! NOUS AVOIR TES TRAVAUX. CA DEJA ETRE BIEN.
- Restons lucides. Personne, je dis bien, personne n'achète des travaux avant même qu'un auteur n'est produit un minimum. C'est d'une logique implacable. Tu comprends !?
- QUI TENTER RIEN NA RIEN.
C'est ainsi que nous nous dirigeâmes vers l'abattoir, vers la Foire du Livre de Bruxelles. Vers l'infâme boucherie pour tout scribouillard amateur qui aurait l'audace d'y proposer ses travaux de dégénéré.