PARFOIS
Parfois je te rêvais
La clé de tous les lieux,
Des abrupts, des arides
Comme des bienheureux.
Tes gestes moutonnaient,
Ta parole, appuyée
Au chambranle du vent,
Était lampe allumée
Au seuil du vieux pays.
Parfois je te voulais
De chaume et d’ajoncs.
Tu ne disais rien
Des maisons rapiécées,
Des tiges bancales,
Mais quand le grand ciel d’hiver
Tisonnait la peupleraie morte,
Déjà tu maraudais sous la terre
Les couleurs boréales.
Je te parlais
De visages ébranchés,
De tas de mots,
Jetés ici et là,
Recouverts de mousse têtue.
Tu t’insinuais alors
Sous la fente du jour
Et soulevais à pleines mains
Les murs dégringolés,
Le salpêtre des heures
Inassouvies.
Parfois je te pensais
Sillage et chemin de verveine.
À vouloir alléger le ciel
De ses pensées nocturnes,
Tu recevais des ailes
Par brassées.
Parfois je savais
Ton toucher de fougères,
Ta peau, loquace,
Qui s’accroissait d’un arpège.
Le lit, grand et défait,
Valsait dans l’univers.
Brigitte Broc
poème inédit pour Terres de femmes (D.R.)
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