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Ringer, future série annulée
Publié le 20 mars 2012 par VinshC'est vraiment dommage de se dire que les fans de Buffy ont attendu le come back de Sarah Michelle Gellar pendant sept ans pour finalement lui faire faux bond dans les audiences. Surtout que ce n'est pas vraiment la qualité de la série qui est en cause... Bon, ok, Ringer, c'est simplement du soap opera amélioré, une intrigue policière chez gens riches qui passent quand même le plus clair du temps entre salons cossus, tours de golden boys et limousines, avec du rebondissement grossier à tous les étages et du changement de robe de créateur trois fois par jour. Bref, c'est une série de la CW, la chaîne de Gossip Girl, et ça se voit.
Forcément, quand on a été habitué à voir Sarah Michelle Gellar mettre des coups de pieds aux fesses de tous les agresseurs fictifs qu'elle croisait, la voir toute faiblarde en socialite new yorkaise incapable de se défendre face à des vilains mafieux, ça fait toujours un peu bizarre. L'héroïne féministe et vaguement crypto-lesbienne de notre adolescence nous fait une impression étrange, dans son rôle de grande bourgeoise friquée, belle-mère d'une lycéenne (!!) et héroïne d'une série au climat totalement différent de celle qui a fait sa renommée mondiale.
Ringer est une série de genre, comme Buffy contre les vampires était une série de genre. Quand la seconde était une série comico-horrifique (qui avait quand même sérieusement tourné au drama sur la fin), Ringer est plutôt un soap. Pas de quoi, a priori, décontenancer le public qui avait tant aimé la série de Joss Whedon, puisque beaucoup de ceux qui ont suivi les aventures de Buffy jusqu'au bout savent apprécier un peu de second degré et de culture camp. Mais apparemment, ça ne prend pas.
Pourquoi ? Déjà, parce que la consommation des séries a beaucoup changé. En France, aujourd'hui, qui prendrait encore le temps d'attendre six mois à un an après leur diffusion aux Etats-Unis pour voir des épisodes de Ringer dans une VF douteuse dans la Trilogie du samedi ? Le public des séries, le public de Sarah Michelle Gellar, celui qui prétend aimer ces contenus, est en fait celui qui a le plus facilement recours au streaming ou au téléchargement illégal. Ce que tu télécharges, ami internaute, n'entre pas en compte dans les mesures d'audiences de la CW. D'ailleurs, quand bien même, les épisodes disponibles sur le web sont expurgés des coupures publicitaires, et donc de la raison essentielle qui pousse une chaîne à maintenir la diffusion d'une série. Diffusée auprès de son public international telle qu'elle l'est actuellement, Ringer n'est tout simplement pas rentable pour son diffuseur.
Dans cette perspective, il n'y a désormais plus que les gros "hits" (genre Glee ou CSI) qui obtiennent les honneurs d'une vraie diffusion en prime time sur des chaînes à forte audience (en gros, les chaînes hertziennes). Les séries "de genre", à l'audience forcément un peu plus confidentielle, bénéficient au mieux d'une programmation honorable sur Canal Plus, avant d'échouer dans les grilles d'après-midi de TF1 ou de troisième partie de soirée de France 2. Des séries comme Brothers & Sisters, Six Feet Under ou The West Wing ont ainsi connu le triste destin d'une programmation de second plan sur nos chaînes hertziennes, tandis que des hits un peu moins énormes que Les Experts héritent d'une diffusion, certes en prime time, mais à la bourre et par paquets de douze épisodes (Private Practice, Lie To Me, Ugly Betty, Modern Family). La vérité, le jour où quelqu'un aura l'idée de proposer, sur un canal gratuit de la TNT, les épisodes de séries en V.O sous-titrés proprement dans les deux jours suivant leur diffusion US, il sera le roi du pétrole auprès de la ménagère de moins de 30 ans, même s'il colle une page de pub. Cela aurait également l'avantage de ré-établir des rendez-vous fixes pour le public avec chaque série. Après, j'imagine bien qu'en termes d'accords avec les différents diffuseurs américains, ce serait très compliqué à mettre en place, mais bon...
Par ailleurs, Ringer pâtit également de son rythme de diffusion un peu foireux (près de deux mois de pause dans la diffusion pour les vacances de Noël) et d'une intrigue relativement obscure (quoique de plus en plus intéressante) (on n'est visiblement pas dans une série "à la Lost" où on sera laissés sans réponses à la fin), qui a malheureusement mis un peu trop de temps à s'installer (le pauvre Malcolm séquestré dans une cave pendant environ 58 épisodes, l'intrigue autour de Gemma qui se finit en "tout ça pour ça", le personnage d'Henry qui sert un peu à rien et qui a un brushing de dessous de bras...). Pourtant depuis quelques épisodes, il y a du twist et du tournant jaw-dropping à tous les étages, et on s'amuse franchement.
Un peu comme un autre soap qui, lui aussi, est dans sa première saison et a su récompenser ceux qui se sont accrochés : Revenge...
L'annulation de Ringer, comme celle de Revenge, serait fort triste vu ce que ces deux séries ont commencé à nous montrer. D'autant plus que, par la nature même de leurs sujets (une quête de vérité et une quête de vengeance), on ne peut qu'être curieux, en tant que public décérébré fossilisé dans son canapé, de répondre à l'épineuse question : comment poursuivre cette même intrigue sur plus d'une saison, comment répondre aux questions et en poser d'autres, bref, comment répartir l'intrigue de manière crédible et satisfaisante sur un nombre d'épisodes impossible à prévoir d'avance ? C'est, peut-être, la difficulté de répondre à cette question qui amène tant de séries à disparaître ou à perdre de l'audience, tandis que les séries qu'il n'est pas nécessaire de "suivre" de manière assidue (en gros, les sitcoms et les séries policières) peuvent envisager de voir leur audience augmenter de manière significative avec le temps... C'est aussi pour cela que les séries "ambitieuses" à la Lost ou à la Homeland se feront de plus en plus rares faute de devenir des phénomènes de société (jusqu'à mourir péniblement de leur belle mort comme Desperate Housewives) tandis que les Modern Family et autres NCIS resteront au sommet des grilles de programmation TV des prochaines années. Le seul format intermédiaire auquel je pense, pour nourrir une intrigue un peu suivie et se foutre complètement d'une potentielle annulation surprise en fin de saison, c'est celui de la série qui change de décor et d'intrigue à chaque saison. Seul exemple récent : American Horror Story. Pas exactement un bon candidat pour meubler la case prime time de Grey's Anatomy ou The Mentalist sur TF1, toutefois...