J'ai écrit ce texte en pensant à Gaston Couté* et à tous les "fait d'terre " que j'ai pu connaître un jour, à la campagne, et qui regardaient les gens de la ville avec le regard de ceux qui ne "s'en font pas conter".
Un autre temps...
Tous ces gens-là d’la ville
Quand chez nous il en vient
Pour y rester tranquilles
Sont fous comme des lapins
Y continuent d’courir
Sans même qui s’en rendent compte
Tous ces gens-là d’la ville
Qui font rien qu’à causer
Y sont pis qu’les pintades
Qui s’arrêtent pas d’caqu’ter
Y causent y causent y causent
Tant, qu’y z’entendent plus rien
Tous ces gens-là d’la ville
Qui savent même plus rien voir
Et qui savent tout sur tout
Tant qu’y en sont rasoirs
Y continuent d’penser
Qui savent tout, sans savoir
Tous ces gens-là d’la ville
Quand y passent faut les voir
Plus fiers que les dindons
Qui s’dandinent en mangeoire
Et ça vous fait la roue
Et ça a peur du noir
Tous ces gens-là d’la ville
Croyez en c’que j’vous conte
Z’ont oublié l’patois
Qu’la nature nous raconte
Comprennent plus rien à rien
Et z’en ont même pas honte
Tous ces gens-là d’la ville
Sont un peu comme mon chien
Qu’a perdu l’odorat
Et qui n’retrouve plus rien
Comme ce corniaud d’Médor
Qui pleure après son os
Tous ces gens-là d’la ville
Écoute bien c’que j’te chante
Savent même pas qu’les patates
Ça pousse pas dans les branches
Y sont bêtes comme des courges
Et nous disent bêtes comme chou
Tous ces gens-là d’la ville
Qui nous traitent de bouseux
Y sont pis que l’mildioux
Et j’suis pas malheureux
Quand c’est qu’l’été s’termine
D’les voir r’partir chez eux.
©Adamante
Gaston Couté est né en 1880 à Beaugency dans le Loiret il est mort à 31 ans en 1911 à la suite d'une phtisie galopante, de trop nombreuses années de privations et usé par l'alcool.
Il a connu une période de succès dans les cabarets parisiens dont "les chansonniers de Montmartre".
Il était un grand poète qui s'exprimait avec le patois et l'accent du terroir, il chantait les gueux, la misère, sonnait le tocsin des révoltes, pleurait sur l'injustice infligée aux moins que rien.
Non conformiste, révolutionnaire, anarchiste ; ses poèmes sans concession, directs, parfois violents, parlaient aux imaginations et étaient appréciés du peuple.
Il disait détester la ville et en 1910, malade et déprimé, il était revenu au pays, à Meung sur Loire, disant que là, au sein d'un modeste logis la vie était simple et paisible.
Mais l’alcool, qu’avec la maladie il ne supportait pas, rendait son caractère insupportable à ses proches qui s’occupaient de lui. Il revint à Paris où il mourut.
Son père, qui ignorait son œuvre, avait dit en voyant ses nombreux amis et fervents admirateurs suivre sa dépouille mortuaire :
« Jamais je n'aurais cru que Gaston avait tant d'amis. Maintenant qu'il est mort, vous pouvez bien me le dire... Mon fils... il avait donc du talent ? »
Et si vous voulez le découvrir je vous invite à écouter "la complainte des ramasseux d'morts".
Pour en savoir plus : ICI