C’est mignon, un chamallow, c’est tout rose, tout mou et tout sucré. Mais depuis le jour où la prof d’anglais a cru faire un bon mot en raillant Mathieu et ses misérables performances scolaires, tout le monde s’est mis à l’appeler « Chamallow ».
Déjà que ce n’est pas facile de quitter le primaire et devenir un grand, déjà qu’il s’était retrouvé dans une classe sans ses amis, déjà qu’il est la risée des autres parce qu’il s’habille en survêtement décath, qu’il aime le PSG et qu’il s’est étalé de tout son long le premier jour devant toute la classe… Elle commence très mal, cette nouvelle vie au collège.
Mais voilà, ce n’est pas fini.
Car Mathieu Propranet est persécuté par Alexis. Alexis le populaire, celui qui s’habille avec des vêtements de marque, qui a un smartphone, qui a des tas d’amis et un compte facebook… Tout le monde se moque de lui, les professeurs semblent ne rien voir, les parents s’inquiètent et Mathieu ne veut pas passer pour un pleurnichard, alors il se tait. Et ça continue jusqu’à l’inévitable, évidemment.
Ce livre de Anne-Marie Job, édité chez Numériklivres, fait écho a une situation qui a énormément ému le Québéc, il y a quelques mois : une adolescente s’est suicidée après avoir fait l’objet d’une véritable campagne de harcèlement de la part de ses camarades de classes. Harcèlement qui avait lieu au quotidien dans son lycée, mais à une échelle bien plus vaste via internet et Facebook. Ironie, la principale harceleuse, suite à ce suicide, a, à son tour, subi un harcèlement brutal de ces mêmes personnes qui se moquaient avec elle, mais également de nombreuses autres, émues de la situation qu’elle avait provoquée. Comme quoi, internet réveille des instincts bas et particulièrement méchants, chez les gens, bien à l’abri derrière leur écran et leur anonymat. Une leçon à méditer.
Ici, on n’en arrivera pas jusque là. Les parents de Mathieu alerteront l’établissement, on frôlera la catastrophe mais finalement tout finira bien. La fin d’ailleurs me paraît trop idyllique, mais c’est un roman pour enfant alors il faut bien de l’espoir au bout du tunnel. Ça se lit très facilement et c’est agréable, même pour un adulte. L’idéal serait de le lire en famille pour que chacun explique son point de vue, que la discussion s’installe et la réflexion germe (manque de pot, mon aîné est encore un peu trop petit pour ça
Il est parfait pour sensibiliser au harcèlement scolaire et ses dérives de plus en plus fortes. Car ce qui de mon temps se limitait à l’enceinte de l’école et à l’apparence physique/capacité scolaire, devient de nos jours, une affaire beaucoup plus grave : une affaire technologique. Car Mathieu n’a pas de portable dernier cri et n’a pas le droit d’aller sur internet. Or, c’est à travers ces nouveautés technologiques qu’un fossé va se creuser: son portable est un dinosaure, et il n’a pas de compte Facebook. Normal penseriez-vous, à 11 ans, qu’est-ce qu’il en ferait ?
Oui, mais les autres enfants, eux, ont des smartphones, échangent et se moquent de Mathieu sur Internet.
Ce livre ouvre les yeux sur beaucoup de chose, et je le conseille à tous les parents (ou futurs parents) d’ado : le vécu du harcelé et surtout, cette non-éducation au respect et à internet. D’un côté, les parents de Mathieu n’y connaissent rien à internet (et trouvent juste affligeant que leurs deux aînés – 15 et 17ans- y passent leur journée), de l’autre, les enfants qui s’approprient cet espace à l’insu des adultes, recréant un univers où les lois et les règles de bonne conduite disparaissent.
A lire même si l’on n’est pas harcelé évidemment : car il y a peu de différences au final entre le harceleur, le complice et le harcelé, les situations peuvent survenir sans prévenir, se retourner et il vaut mieux être préparer à y réagir (tant enfant qu’adulte)
A partir de 10-11ans
Le garçon qui avait un chamallow à la place du cerveau
de Anne-Marie Job
2,99 €
Editions Numériklivres
(format ePub-mobi)
Photo chamallow de Coralie Ferreira (CC-by)