Les dames de Rome, par Françoise Chandernagor

Publié le 28 mars 2012 par Lauravanelcoytte

Françoise Chandernagor poursuit son tour de l'Antiquité avec le séjour sur le Palatin de Séléné, la fille de Cléopâtre. L'art de l'Histoire et du récit. 

On a laissé Les Enfants d'Alexandrie, Alexandre-Hélios, Cléopâtre-Séléné et Ptolémée-Philadelphe, dans une ville dévastée par Octave, le nouveau maître de Rome. Leur mère, la reine d'Egypte Cléopâtre, et leur père, l'empereur d'Orient Marc Antoine, ont été contraints au suicide. Malheur aux vaincus ! Et à leurs rejetons. Les voici prisonniers, sur le chemin de Rome, "ville rouge qui cuit à l'étouffée dans ses vieilles murailles", où ils vont être exhibés à la populace lors du Triomphe d'Octave, ce défilé où l'"imperator" assoit son pouvoir et écrit sa légende. 


C'est par cet épisode, en 29 avant Jésus-Christ, que s'ouvre le deuxième tome de la trilogie antique de Françoise Chandernagor, Les Dames de Rome. D'emblée, on reconnaît le ton de connivence bienveillante avec le lecteur, le style classique dopé par des formules familières et des mots latins, la volonté de mêler les incises savantes aux propos les plus crus, le souci de concilier exigence historique et nervosité du récit. Pourquoi, diable, Françoise Chandernagor changerait-elle une si belle formule ? 

Comme dans le premier volume, la romancière justifie dans une "note de l'auteur" ses choix - l'Antiquité recèle de nombreuses zones d'ombre - et son parti pris de "faire parler le silence" (Michelet). Situé à la fin du livre, ce texte passionnant sur les métiers d'écrivain et d'historien mérite d'être lu avant. Quant au plaisir de lecture, il est intact. On suit avec curiosité les tribulations de Séléné au milieu de toutes ces matrones. A commencer par la plus merveilleuse d'entre elles : Octavie, petite-nièce de César, ex-femme de l'empereur déchu, soeur du nouveau (et meurtrier du précédent) - un sacré pedigree ! - devenue la mère nourricière de tous les enfants au sang bleu orphelins par la cruauté des hommes. 

"Dans l'Histoire, j'entre où il me plaît", clame Françoise Chandernagor. Ses effractions sont une aubaine.