Comment définiriez-vous la ligne chez Jackson Pollock ?
Pollock ramène la peinture à son indexicalité première. On ne parle plus de représentation; la forme se dissout. Pollock peint des traces de sa présence et non pas le contour de quoi que ce soit. La ligne est au centre de toutes ses créations.
Jackson Pollock, Guardians of the Secret, 1943; painting; oil on canvas, 48 3/8 in. x 75 3/8 in. (122.89 cm x 191.47 cm); Collection SFMOMA, Albert M. Bender Collection, Albert M. Bender Bequest Fund purchase; © 2011 Pollock-Krasner Foundation / Artists Rights Society (ARS), New York
On peut voir dans Guardians of the secret comment il dissout les formes et tend vers une abstraction totale. Mural, étant constitué pratiquement que de lignes, donne l’impression d’un tableau qui n’a ni commencement ni fin, et qu’il n’est pas contenu dans son cadre. Avec ces lignes, Pollock réussit à produire une composition dite all over, soit une composition où il n’y a aucun point de focalisation important sur toute la surface picturale. Que l’on regarde un tel tableau dans son ensemble ou par fragment, l’effet est sensiblement le même.
Ainsi, on peut comprendre pourquoi la ligne de Pollock est si remarquable. En effet, la tradition veut que la ligne délimite une forme, la détache du fond, et nous permette ainsi de l’identifier. Or, tel que nous avons pu l’observer dans Mural, la ligne de Pollock ne délimite rien; elle a ni extérieur ni intérieur; elle est pure ligne dans l’espace. Aussi, elle ne détache pas la forme du fond; à la limite, il n’y a pas de fond. D’ailleurs, ce phénomène est criant dans Number 29, ce fameux tableau peint sur du verre. Finalement, la ligne de Pollock se supporte elle-même. À la rigueur, elle ne veut plus rien dire. Elle n’est plus rien sauf la trace du peintre.
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