Magazine Journal intime
Souvenir de Pâques
Publié le 08 avril 2012 par ClaudelPâques. Un billet de Michèle Bourgon sur ses souvenirs de cette fête m’a rappelé les miens. Certaines bonnes années, quand c’était tard en avril, Pâques voulait dire : on va au chalet, au lac Simon. Trois heures de route et la dernière, souvent dans la bouette. Pas d’eau courante, la baie à peine dégelée. Mais un printemps plein d’espoir qui nous donnait hâte à l’été, aux vacances.
Mais mon souvenir le plus original, le plus mémorable fut celui de 1963, à Lévis. J’étais dans les guides. Pour Pâques, nous avions une activité spéciale, pour amasser des fonds, nous devions vendre des billets. Du chocolat à gagner : quatre petits paniers, deux moyens et un énorme. Je déteste vendre des billets, je suis nulle en sollicitation. J’ai réussi à vendre un calepin de dix billets à mon père et un autre à ma mère. Vingt billets au nom de mon frère et du mien. C’est la seule famille que j’avais à Lévis, les autres membres demeuraient encore à Montréal. Je savais que je ne serais pas la meilleure vendeuse qui pourrait remporter le gros chocolat en lapin, mais qu’importe, j’avais fait ma part.
Le jour du tirage, nous encerclions les paniers dans notre petit local, la cheftaine au centre qui tenait les énormes sacs verts remplis de billets vendus. Le curé, notre aumônier, devait tirer les billets gagnants. Il s’exécute quatre fois pour les paniers moyens. Il ne reste que le plus gros. Je spécifie que ledit curé ne s’entendait pas tellement avec mon père et je crois bien qu’il ne voulait plus jamais à avoir à prononcer le nom de Lamarche. Circonstances que j’ai racontées dans le livre Jacques Lamarche, un homme une époque. Le curé plonge la main dans le grand sac, il retire un billet, je suis tout juste derrière lui, je crois voir mon nom, mais j’ai peine à croire que parmi les centaines, voire les milliers de billets, un de mes pauvres petits vingt billets puissent sortir du lot. Le temps de me concentrer pour être certaine que j’ai bien vu, je vois le prêtre remettre le billet dans le sac. C’était sans compter la célérité de la cheftaine qui, sans voir le nom du gagnant, a quand même vu la main hésitante. Elle se précipite sur le billet et lit le nom. C’est bel et bien le mien. Le curé ne s’éternise pas en longue homélie, bénit tout le monde et s’en va.
Le vendredi soir, mon père dut venir chercher le cadeau gagnant qui couvrait toute la banquette arrière de l’automobile : un gros lapin de 3 pieds de hauteur, 4 oursons ou lapins, je ne me rappelle pas trop, de 2 pieds, 8 autres chocolats de 12 pouces et des centaines d’œufs en chocolat de toutes sortes de grosseurs et de couleurs. Ça formait un énorme sapin de Pâques et trônait sur la table du salon. À cette époque, nous ne pouvions pas manger de bonbons pendant le carême et encore moins le Vendredi saint. Ce n’est que le samedi soir que nous avons été autorisés à y goûter. Pas question de s’empiffrer. Ma mère a soigneusement cassé les lapins, oursons, a séparé les morceaux dans des petits sacs, a tout congelé. On a eu beau en donner, on en a eu… jusqu’en juin.
Je n’ai jamais rien gagné de semblable avant et jamais depuis. Joyeuses Pâques à tous!