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la petite histoire trépidante d’un gros billet de banque

Publié le 09 avril 2012 par Jacquesh

 bettencourt,billet 500 euros

La petite histoire trépidante d’un gros billet de banque
Ça faisait longtemps que je l’avais dans mon porte monnaie cette moitié de SMIC que l’on a qu’a rebaptiser pour l’occasion le "Bettencourt".

Je suis sorti ce matin bien décidé à le casser, mon Bettencourt, comme on dit dans le jargon. Il fallait que j’achète une boite de préservatif et une bobine de ficelle à la quinquaillerie du coin. Treize euros cinquante.

­— Il est onze heure du matin, nous n’avons pas la monnaie, désolé Monsieur. Le mieux est sans doute d’aller à la banque.

Je me rends à la Société Générale. Une jeune fille au guichet :

   Oui monsieur c’est pour quoi ? 

   Euh, je voudrais la monnaie de ce billet de 500 euros s’il vous plait.

   Désolé, nous n’acceptons pas les billets de 500 euros.

   Ah bon, mais... euh, c’est un vrai !

   Désolé monsieur.

— Woerth n’est pas aussi difficile que vous !

   Comment Monsieur ?

   Le ministre, Monsieur Woerth, dis-je, il n’était pas aussi difficile que vous ! Elle ne sourit pas. ça n’est pas drôle.

Je sors de la Banque et décide d’acheter du saumon d’Alaska au Shopi du coin en plus de quelques citrons verts. Quitte à casser mon billet autant le casser pour un produit de luxe. La cohérence dans ma vie a de l’importance. Arrivé à la caisse. Douze euros quatre vingt dix. Je sors mon Bettencourt. Désolé monsieur on ne prend pas les billets de 500 euros ! me dit la caissière en me montrant du doigt un panneau sur lequel c’est écrit noir sur blanc. Vous n'avez qu'à aller à la banque, vous avez la Société Générale, juste là, au coin de la rue…

   — Mais ils n’en veulent pas à la banque  !

   Ah bon ? Et bé désolé !

   Peut être faut-il que j’aille voir monsieur Woerth ?

   Comment ?

   Non… je plaisante. Un magasinier qui a compris ma blague sourit. Peu de chance qu’il vote pour Sarkozy.

Sur le chemin je m’arrête dans un bureau de tabac.  Est ce que vous acceptez le Bettencourt dis-je à haute voix, brandissant mon billet de 500 euros sous le nez d’un gros moustachu. Sourires derrière le comptoir. Non, Monsieur, je ne fais pas de politique.  Ah ah ah, tout le monde rit dans le bar. Un peu plus loin me voilà dans une boulangerie.

— Bonjour vous acceptez les billets de 500 euros ? En deux secondes mon billet m’est prit des mains, il s’en va vers un endroit où j’aperçois de la farine, et reviens en petite coupure de 20. Comme quoi, il fallait bien au moins une boulangerie pour blanchir mon Bettencourt. La vrai économie est dans les boulangerie, et non pas à la Société Générale, où l’on est prêt à perdre des milliards dans des placements virtuels douteux, mais où l’on refuse à un client de changer un vrai billet de banque.  ça fait une sacré liasse. Je remercie la boulangère qui ne me demande même pas si je souhaite une baguette.

— Pas plus tard que le mois dernier, un samedi au Monoprix, j'avais rempli mon chariot de courses, et arrivé en caisse :  « désolé madame, on ne prend pas les billets de 500 euros » qu'on me dit, me raconte la boulangère avec un sourire complice sur un ton confidentiel.

   Mais saviez, vous que les banques le refusent également ? Oui. Me répond-elle s’en pour autant s’inquiéter de la manière donc elle écoulera celui que je viens de lui confier. (Elle est grecque, et c'est pratique pour transporter des fortes sommes en liquide lors du retour au pays parait-il; las bas ils prenent volontiers les billets de 500 euros...)

Je venais donc d'apprendre que le Bettencourt était refusé dans les banques françaises, du moins quand il arrivait dans les mains d’un petit porteur, mais aussi par les chaînes de grands magasins, autrement dit par le Système. Paradoxalement il est accepté par certains petit commerçants qui s'en servent pour rapatrier des sommes en liquides au Portugal ou en Grèce. Ce billet au fond était à l’image de l’Europe, il avait des odeurs d’économie souterraine et de banqueroute. Je suis content d’avoir pu m’en débarrasser. J’avais c’est vrai cette impression qu’il s’agissait d’une espèce de monnaie de singe. Un billet qui facilite sûrement les transports de fonds lors des campagnes électorales,  le paiement des rétro commissions du commerce des armes, ou l’achat de stock de drogue… 

Je retourne finalement à la Société Générale en pensant à tout ça, avec ma baguette à 90 centimes, que j’ai entamé sur le chemin.

— J’ai réussit à changer mon billet de 500 euros à la boulangerie, dis je à la guichetière qui baisse les yeux immédiatement. Je tenais à vous le dire. Comment se fait-il qu’une banque refuse de changer un billet de 500 euros et que se soit une boulangerie qui fasse le travail ? Pas de réponse. Un type en costume de mauvaise qualité— genre Jérôme Kerviel— sort d’un bureau et assiste à la scène sans broncher.

À quoi servent les banques si elles refusent même les billets de banque ? Etre obligé de changer mon billet de 500 euros dans une boulangerie vous vous rendez compte ? dis-je en prenant à témoins des retraités qui n'y sont pour rien. Une centenaire me répond sur un ton confidentiel… Et encore mon bonhomme vous avez eu de la chance… souvent ils ne les prennent pas ! 

Ça en dit long sur la confiance qui règne au sein notre économie !


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