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Jour 79

Publié le 17 avril 2012 par Miimii
Jour 79
Les personnes qui me connaissent ne trouveront rien de bizarre à ce que je m'apprête à raconter.  Effectivement, j'ai reçu des commentaires de lecteurs qui me disaient qu'ils appréciaient le "personnage adouci". En réalité, je comprends mieux certaines choses, peut être, mais ce n'était qu'une trêve.
Après avoir rencontré les parents de D., j'ai passé une ou deux semaines à me poser des questions. Quelle est la différence entre ses parents et les miens? Quelle est la différence entre lui et ses frères et soeurs, et moi et les miens?
Bien entendu, cette étude comparative m'a poussée dans les bras de mes pires démons.  J'ai arrêté d'aller chez mes parents. Et je n'ai plus vu D. non plus.
J'ai voulu croire que j'étais enfin en bonne voie. Avec un homme que j'apprécie, qui est équilibré et heureux. Mais je suis une fille envieuse et jalouse. Je suis jalouse de lui et de sa vie. Au lieu de l'aimer plus fort et de partager son bonheur, j'ai eu des envies de destruction sur son bonheur. Partir pour qu'il souffre, le quitter pour qu'il morfle, rompre pour qu'il déteste la vie comme moi.
Flashback: J'ai côtoyé les parents pendant quelques jours, jusqu'à ce qu'ils me proposent de leur expliquer ce qui se passe entre nous.
A partir du 3eme entretien avec les parents, ce que je leur racontais de moi n'était que superficiel et "politiquement correct". Le père, pas né de la dernière pluie, voyait que je cachais des choses.... mais il respectait.
La maman essayait de m'avoir à l'affectif. "Ma fille", "ma chérie", ... elle me torturait chaque fois qu'un de ces mots sortait de sa bouche. Et je voyais le sourire suffisant de D., heureux en pensant m'avoir amadouée, guérie et rendue heureuse en coupant les ponts avec mes vieilles manies.
Le quatrième entretien, encore chez eux, avec tous leurs enfants, a été bref. Je l'ai écourté... je n'avais pas envie de faire de la figuration dans une famille d'emprunt que je ne connaissais pas et avec qui je ne peux pas être "moi" car je courais le risque d'être rejetée si je montrais mon vrai visage.
Si ma famille n'a pas hésité à me laisser partir, pourquoi pas eux? pourquoi pas lui sous leur influence à eux? J'ai l'air perturbé et je le suis.
J'avais prétendu avoir fait une insomnie la nuit précédente et de n'avoir que très peu dormi, pour pouvoir rentrer. Les effusions, les "ma chérie", les "ravis de t'avoir parmi nous", "tu es chez toi ici" m'avaient dégoutée.
Encore une fois, me voila encore une fois, en train de plomber une réunion familiale, celle d'une famille qui n'est même pas la mienne... en partant.
J'avais envie de dire "Pardon Maman, mais finalement ce n'est pas de ta faute... c'est juste moi."
Mais je n'y croyais pas. On ne naît pas en détestant le mot "famille", et d'ailleurs pourquoi ce mot là et pas un autre? Tiens si, il y a bien "relation" que je déteste aussi.
D. m'a accompagnée à la maison, il a proposé de monter, je ne l'en ai pas empêché. Nous sommes restés tous les deux dans mon canapé, l'un dans les bras de l'autre, dans le noir et en silence.
Il me caressait les cheveux et moi j'entendais mon coeur battre dans mes oreilles, ma tension artérielle était élevée, je le sentais. J'étais bien dans le noir, je ne voulais pas le voir, j'avais juste pas envie d'être seule. ça aurait pu être n'importe qui.
Je l'envie, l'ENVIE, le pêché capital...
Il a de la chance et je suis une mauvaise fille.
J'avais passé une sale nuit, je ne l'ai plus rappelé pendant des jours. J'avais besoin de solitude.
La vie me fait peiner en ce moment. Je suis chez moi, dans mon pays et je me sens comme une étrangère. Je ne reconnais plus les gens, mais en les croisant dans la rue, je sens un malaise commun. Moi, qui craignait les gens, les inconnus j'ai toujours souris à tout le monde (comme faisait ma grand mère, paix à son âme, elle me disait que le prophète (saaws) était toujours aimable, souriait et saluait tout le monde et que ce que je faisais témoignait d'une grande bonté.  Depuis elle, je garde cette habitude).
 Tunis a changé, la Tunisie aussi. Elle est occupée. Qui sont ces gens dans les rues? J'ai un grand respect pour les divergences d'opinions, bien que fermée comme je le suis, je ne veux débattre de sujets aussi épineux que la religion ou la politique, ce qui n'exclut pas des principes fermes. Je suis musulmane, croyante et pratiquante. Je suis consciente de ne pas pratiquer à 100%, mais je considère que ceci est le Djihad personnel, lutter contre ses démons. Celui qui commence avec soi même, celui qui nous pousse à s'améliorer. Par ailleurs, si ma famille m'a inculqué des valeurs d'islam, c'est bien respecter, tolérer, écouter, conseiller.
Politiquement, je pense qu'il y a des rouages, qui nous dépassent et de très loin. Maintenant, je pense qu'il y a un impératif majeur, que n'importe quel état, devrait assurer au citoyen, il s'agit de se sentir en sécurité dans son propre pays. Tunis est fragile, le citoyen tunisien est fragile, dépassé, indécis, apeuré et démotivé, le flic tunisien est désarmé.
Bref, je n'ai rien contre aucun précepte, il me semble impératif que chaque tunisien, se sente en sécurité dans son bled et qu'il ait la liberté de pratiquer sa religion en respectant celle d'autrui. (celle=pratique surtout, mais religion aussi).
Tout ceci me démotive profondément, moi qui souhaiterait créer une entreprise, qui ne trouve pas de réponse, pas d'investisseur, pas de conseiller, pas de courage pour me jeter à l'eau. N'est ce pas un impératif de pouvoir travailler, pour son bien être et celui de son pays?
Je suis dans la tournante de la dépression... mon pays, je ne veux pas te quitter. Ma vie, je voudrais reprendre sans peur.
Braquage sur braquage, même en plein jour, dans des croisements et feux fréquentés. Peut-on en vouloir à celui qui marche à côté de ne pas nous défendre, il a peur pour sa vie et ne saurait qui appeler à l'aide.
Ne plus sortir? Ne plus travailler? Ne plus vivre? Ne plus penser à l'avenir?
Depuis ces quelques jours, je n'ai plus le courage de venir ici pour me confier. Je suis sûre que chaque personne qui me lit souffre également d'un mal similaire. Il y a la vie et il y a la mort. La première est un couloir, qui mène indéniablement à l'autre. Nous y allons, c'est à sens unique. Mais pour vivre conformément à ses principes pour affronter la mort, il faut d'abord pouvoir vivre.
En espérant que Dieu, le même pour tous, puisse tous nous guider vers le droit chemin, vers un point d'entente, vers l'amour de notre patrie et de notre prochain... laissons lui une Tunisie habitable !
En dix jours, un mois, je ne sais plus... On se perd.
Jour 79

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