Comme convenu, je reviens sur la question déjà évoquée lundi dernier, de l'influence du droit communautaire sur le financement des services culturels par les collectivités publiques.
Pour noter d’abord qu’elle figure au centre des préoccupations du Comité national de liaison des EPCC, lieu pertinent d’échanges et de réflexions sur les questions relatives aux politiques culturelles des collectivités publiques. Je cite :
Pour mener à bien ce programme, la Plénière de Novembre 2011 a décidé de mettre en place 3 groupes de travail thématiques articulés autour de la question centrale de la coopération.
«Structuration des politiques publiques » : les coopérations au regard des réformes à venir des collectivités territoriales et de l’Etat, et des nouvelles modalités de gouvernance ;
«Services culturels publics » : les coopérations au regard des évolutions du cadre réglementaire européen et ses déclinaisons dans le droit national (paquet ALMUNIA) ;
«Responsabilités des EPCC » : les coopérations culturelles et les responsabilités des EPCC au plan social, territorial, économique, éducatif, professionnel, environnemental.
Ces groupes sont ouverts à tous les membres dans un double objectif : contribuer aux débats publics actuellement en cours et mettre à disposition de chacun des membres des éléments utiles à son propre projet.
Mais il importe aussi de signaler une série de notes publiées sur cette même question d’urgence par l’excellent Cultural Engineering Group Weblog animé par Philippe GIMET
Le 1er mai dernier il signalait que le groupe de travail sur l’influence du droit communautaire sur le financement des services culturels par les collectivités territoriales a rendu ses conclusions au Sénat au début du mois d’avril.
Le communiqué de presse qui nous est parvenu avec la synthèse du rapport du président du groupe de travail Monsieur Vincent Eblé témoigne de la complexité et de l’importance du sujet.
En effet, le droit communautaire évolue. Le paquet Monti-Kroes, datant de juillet 2005, a été remplacé par le paquet Almunia, adopté par la Commission européenne le 20 décembre 2011 et applicable en France depuis le 1er février 2012. S’adressant à l’ensemble des pouvoirs publics, nationaux et locaux, il émet un principe général d’interdiction des aides d’État, tout en autorisant certaines compensations notamment pour la fourniture de « services d’intérêt économique général » (SIEG). Au-delà d’un certain seuil de subvention, le seuil de minimis, qui devrait prochainement être fixé à 500 000 euros sur trois ans, toute compensation fait l’objet d’une notification.
Ceci est lourd de conséquences pour la culture et plus généralement pour l’écosystème culturel. Des mutations profondes s’annoncent. Plusieurs de nos membres sont très mobilisés sur cette question et nous aurons l’occasion d’y revenir très prochainement en détail.
Après avoir publié le premier la lettre de Jean-Michel Lucas au sénateur Eblé (également citée ici), il revient plus longuement sur la question.
Nous en avons déjà fait mention plusieurs fois ces derniers jours car le sujet ne fait aucune vague ou presque, en tout cas dans les médias, et il faut absolument en parler car ce quasi silence radio donne la fausse impression qu’on se résigne à laisser nos politiques, certains d’entre eux en tout cas à gauche comme à droite, louvoyer non sans opportunisme et porter sans conviction des visions qui trahissent un aveux d’impuissance criant.
Nous nous serions résignés à subir ce qui nous nous est présenté par ces mêmes politiques comme inévitable et qui est posé d’emblée comme une guerre de tranchées entre droit communautaire et droit souverain.
Dans tous les secteurs, le rôle des acteurs des territoires est d’éclairer le politique, de lui confier leur expertise. Les acteurs sont les premiers à pouvoir témoigner de l’impact des actions et des projets qu’ils mènent dans un éco-système où le politique cherche à traduire et porter une volonté, des valeurs, des visions. Cet éco-système est d’ailleurs très largement régi par la répartition des compétences entre Etat et Collectivités territoriales qui doivent s’exercer en étroite collaboration. Les acteurs territoriaux, dont certains reçoivent des financements publics pour mettre en œuvre une part de ces compétences selon des objectifs ciblés, sont au contact du terrain et exercent, appelons en chat un chat, un part de la mission de service public.
Ils contribuent ensemble à animer, valoriser, renforcer et enrichir la qualité du cadre de vie de nos territoires.
Cette gouvernance public-privé, disons-le tout net, ne peut tout réussir ni tout résoudre mais il est clair que l’architecture de notre contrat social repose en grande partie sur cette coopération étroite. Or cette coopération étroite évolue au gré des réformes, s’adapte au fil des grands changements sociétaux mais n’a jamais été bouleversée en profondeur depuis les premières lois de décentralisation.
Or la construction européenne, que certains accusent à tort, par crainte ou par ignorance, de tous les maux, modifie la donne acquise depuis des générations, elle amène à considérer non pas qu’il convient d’uniformiser nos espaces souverains et nos cultures mais de les harmoniser (ce qui est bien plus qu’une nuance), de placer le vivre ensemble souverain dans une dimension communautaire. En d’autres termes, l’Europe en marche est l’Europe qui fixe un minimum de règles communes et de principes partagés. Cela signifie qu’il convient d’instituer ces règles et ces principes, au travers du droit communautaire, capable de s’appliquer à tous pour que chacun puisse participer à construire l’identité européenne à partir de sa propre culture et de ce qu’il en tire pour sa propre culture.
De ce point de vue, transposer une directive européenne en droit souverain appelle nécessairement des adaptations d’une part et des dérogations de l’autre, ceci étant nécessairement l’objet de négociations plus ou moins âpres. C’est le lot quotidien du politique que d’assurer que l’intérêt général puisse prévaloir à chaque instant dans ces transpositions qui sont bien plus que du juridique ou du langage technocrate comme disent les eurosceptiques.
La responsabilité est donc grande, ce qui oblige à ce que le dialogue soit fort entre le niveau local, national et européen.
(…)
Il est désormais vital que politiques, techniciens et acteurs culturels prennent collectivement leurs responsabilités car, comme dit le proverbe chinois, c’est au pied du mur qu’on voit le mieux le mur. Nous y sommes.
Fin de la première partie.
LIRE L’INTEGRALE DE LA NOTE de Philippe GIMET
On attend avec impatience la deuxième partie
Fils d'actualités très vivement conseillés :
La lettre du réseau culture sur Territorial.fr
Le "netvibes" de l'Observatoire des politiques culturelles
Les net-actualités sur le site d'Arteca
Le tableau de bord des Think tank (Netvibes)
Le calendrier francophone en sciences humaines et sociales, Calenda
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