Le Québec a besoin de bébés qui deviendront grands et qui travailleront et qui paieront les retraites, consommeront, feront à leur tour des bébés et ainsi va la vie. Du coup, la province encourage (et pas qu’un peu) les adultes en âge de procréer à procréer.
Et quel meilleur moyen d’encourager femmes et hommes à se reproduire que de leur offrir un congé parental de compétition internationale? Ce congé est long (jusqu’à un an), relativement bien payé (entre 55 et 75% du salaire si je ne m’abuse) et surtout, complètement normal pour les employeurs.
Dans leur très grande majorité, les bébés restent ainsi dans les jupes de leur mère (ou de leur père, non mais) pendant un bon moment. Lorsque j’ai su que j’étais enceinte, je me suis dit : «Chouette chouette chouette, je vais rester presque un an avec mon bébé à la maison et grâce à ça, il sera un adulte dépourvu d’angoisses, épanoui et la crise d’adolescence ne passera pas par lui.»
Cela fait donc six mois que Babychou et moi partageons nos journées. Et depuis une semaine, je vois comme des signes qu’il est peut-être temps, comme dirait l’autre, de reprendre une activité normale.
D’abord parce que à force de chanter à tue-tête et de dire «Coucou!» ou encore de demander à mon fils :«Elle est rigolote ta maman?» (lui, il trouve ça drôle), mes voisins doivent me prendre pour une folle. Je l’ai réalisé alors que je me cachais derrière un torchon pour amuser mon fils, et lorsque j’ai baissé le bout de tissu, je suis tombée sur le regard circonspect de ma voisine sur son balcon, qui ne voyait pas que j’avais un public.
Ensuite parce que l’autre jour, en cherchant mon rouge à lèvre dans mon sac à main, je suis tombée sur une tétine, un livre qui chante des chansons, Sophie la girafe, un jouet pour soulager bébé qui fait ses dents, un bavoir, des lingettes, mais point de rouge à lèvre.
Enfin parce que toute la journée, je parle à la troisième personne. «Bon, on va manger, d’accord?», «On va changer la couche, hein?», «On va s’habiller, Babychou, et puis après on va aller se promener.» Alors ce matin, j’ai dit à la prunelle de mes yeux : «Aujourd’hui, on va visiter une garderie, d’accord?» Et comme toujours quand je lui pose une question, cela n’appelait pas de réponse.