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Cyrano de Bergerac

Publié le 18 mai 2012 par Naira
Cyrano de Bergerac
Du 11/05 au 30/06 au Théâtre Le Public, 64-70 rue Braemt à 1210 Bruxelles. Les tarifs sont de 7 à 25 €.
D'Edmond Rostand
Mise en scène: Michel Kacenelenbogen
Avec: Olivier Massart, Christian Crahay, Pierre Geranio, Jeanne Kacenelenbogen, Gaëtan Lejeune, Quentin Minon, Guy Theunissen, Luc Van Grunderbeeck, Marc Weiss, Martine Willequet, Claire Beugnies, Baptiste Blampain, Benjamin Boutboul, Julien De Broeyer, Julien De Visscher, Xavier Delacollette, Vincent Doms, Sophie Jonniaux, Alexis Julemont, Caroline Kempeneers, Agnieszka Ladomirska, Nicolas Legrain, Virgile Magniette, Marvin Mariano, Mirabelle Santkin, Shérine Seyad, Chloé Struvay et Emilienne Tempels.
"L'esprit et le courage, à défaut d'un physique avantageux, c'est ce que possède en abondance Cyrano de Bergerac. C'est aussi ce qui manque au baron Christian de Neuvillette, avec qui la nature s'est montrée plutôt généreuse pour conquérir la belle Roxane dont il est amoureux. Cyrano aussi aime la belle précieuse, mais quand il apprend que Roxane a succombé au charme de Christian, et que les deux amoureux ont besoin de son aide pour être heureux, il se résout à mettre son don pour les mots au service de cet amour."
Qui ne connaît pas cette pièce d’Edmond Rostand ?
Adapter une œuvre colossale en respectant à la fois la rigueur et la beauté du texte originel mais aussi la soif d’action bien moderne d’une salle de spectateurs animés, voilà assurément un défi d’exception.
Le théâtre a comme trait essentiel, et c’est en cela qu’il diffère tant du cinéma, le refus de la passivité du spectateur. Sollicité sans cesse par l’histoire, invectivé par les acteurs, bousculé par un timbre de voix ou un silence prolongé sur scène, on attend de lui qu’il réagisse et entre dans la pièce. Ce sont les premières minutes de ce processus qui déterminent toute la suite, et Cyrano de Bergerac n’a pas fait exception à la règle.
La pièce démarre en un tourbillon de rires, de moqueries, de jeux mondains interprétés avec brio par les seconds rôles. Un mot sur ces acteurs, ils le méritent : ce sont eux en effet qui donnent toute leur saveur à la pièce. Quel que soit l’endroit où se pose le regard, il y a partout une curiosité pour l’œil, un dialogue à saisir, un murmure échangé entre deux bourgeoises en éventail, la moue de dédain d’un petit marquis, le geste audacieux d’un tire-laine dans la poche d’un distrait bourgeois. C’est un tableau aux mille détails, mais vivant. Ce tourbillon étourdissant entraîne, passionne et donnerait presque le tournis.
D’emblée pourtant, un malaise. Ayant lu et relu Edmond Rostand à l’adolescence, je ne m’identifie pas dans ce grand braillard caractériel qui arpente la scène en déclamant les vers bien aimés, cherchant la bagarre sous n’importe quel prétexte. De même, Roxane m’apparaît tout d’abord trop discrète, trop pâle, presque insignifiante.
Mais, coup de théâtre - et c’est là la magie de cet art : à force de le voir se battre, espérer, croire et déclamer son insolence aux étoiles, le personnage joué si efficacement par Olivier Massart commence à émouvoir, à m’apparaître comme humain, faillible et superbe à la fois. Et c’est alors que je comprends pourquoi le personnage ne pouvait être aimé dès le lever du rideau. Il fallait cette ambivalence, cette exubérance propre au théâtre, provoquant un léger agacement même, afin que l’acteur soit réellement Cyrano, un être authentique, insaisissable, mal aimé et pourtant d’une grâce infinie.
Ainsi Roxane sort-elle de l’ombre, son visage se nimbe-t-il de grâce et de lumière. Au fur et à mesure que l’intrigue se noue, que son amour grandit et que son courage la transfigure, elle perd sa distance, ses airs de chipie pour incarner la plus belle des âmes perdues. Et, dans la mélancolie de cet automne, au fond d’un couvent, on retrouve deux êtres mis à nus, qui se livrent pour la dernière fois dans un mélange d’ironie et de sincérité.
Au fond, Cyrano de Bergerac, c’est l’histoire de chacun d’entre nous, nos laideurs et nos caprices, nos reflets abîmés dans une glace, ces ennemis quotidiens contre lesquels Cyrano se bat à l’heure de son agonie : la lâcheté, le mensonge, et ces petits compromis tristes. Avec des acteurs d’emblée lisses et brillants, la magie de la pièce n’aurait simplement pas fonctionné.
Cyrano de Bergerac est une pièce à aller voir absolument. Malgré la longueur du spectacle, aucune scène n’est de trop et jamais l’ennui ne pointe. Le temps s’envole et ne reste, au fond de chaque esprit, volé par les spectateurs à la scène finale lorsque le lourd rideau retombe, qu’un brin de panache.
Pour lire les autres articles, rendez-vous sur le site de Culture et Compagnie: www.culturetco.com!

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